HABABOU Julien, Les joueurs américains dans le basket-ball français au XXe siècle, Maîtrise [Michel Dreyfus, Jean-Louis Robert], Univ. Paris 1 CHS, 2002, 226 p. + 83 p. d’annexes
Le basket-ball, parent pauvre de la production historique, mérite, autant que toute autre activité sportive, I’attention de l’historien. Notre recherche a pour but d’apporter une modeste pierre à l’édifice que constituerait une étude générale du basket-ball en France. Elle porte sur les joueurs américains et d’origine américaine (naturalisés Français et Franco-américains) ayant évolué dans le basket-ball hexagonal depuis le début du siècle, et, plus particulièrement, dans le Championnat de France de division nationale, équivalent à la première division, à partir de 1967.
Dès cette époque — et après un demi-siècle de rencontres sportives, succinctement rappelées, entre des Français et des pionniers américains au rôle prépondérant — chaque équipe de l’élite française, ou presque, compte deux Américains en son sein. L’étude que nous avons réalisée, essentiellement à partir de la presse écrite spécialisée, est alors au croisement de multiples approches historiques.
Nous avons souhaité, tout d’abord, étudier des hommes, dresser un portrait de groupe des quelque 800 joueurs d’origine américaine ayant foulé un parquet français au cours du XXe siècle. Ce portrait s’attache à la fois à recenser les itinéraires sportifs de ces joueurs, et à étudier l’intégration, souvent très temporaire, de ces migrants privilégiés — travailleurs sportifs non immigrés — à la société française, par le prisme, certes paradoxal, des travaux des spécialistes de l’immigration. Nous montrons alors que leurs itinéraires et leurs personnalités en font des précurseurs d’un sport mondialisé, d’un marché sportif globalisé.
Nous accédons, ensuite, à l’histoire d’une institution, la Fédération française de basket-ball, et à sa politique, heurtée et très ambivalente, quant à l’accueil de joueurs étranger ou naturalisés qui sapent — dans un mouvement comparable a celui suivit par le football français, souvent pris comme modèle — les fondements de la constante nationaliste du sport de haut niveau. Nous approfondissons la vision institutionnelle de l’ouverture à ces joueurs étrangers de très bon niveau et analysons comment l’ambivalence se personnifie dans l’instabilité des règlements fédéraux et la multiplicité des débats organisés autour de la présence américaine ou naturalisée, qui, pourtant, va grandissante en s’institutionnalisant. Cerre politique est non moins fréquemment discutée par un autre acteur fondamental, la presse sportive spécialisée, qui de source devient alors l’objet d’une étude critique. Le lien avec l’histoire politique et particulièrement législative est, ici, plus fort qu’on pourrait le croire : lois sur l’organisation et la professionnalisation du sport, questions posées aux ministères concernés quant aux droits des naturalisés français, etc.
Nous étudions enfin les conséquences de leur impact fondamental sur un sport qu’ils maîtrisent bien mieux que les Europeens, sur le développement du basket-ball, et du sport français dans son ensemble : modeste étude de la pratique sportive qui se prête volontiers à un décryptage statistique exploitable par l’historien ; rôle joué sur la transition du basket-ball, encore profondément ancré dans la tradition du sport de masse, vers la modernité du sport spectacle et de la professionnalisation du haut niveau, deux mouvements, parfois décriés, facilités par la philosophie marchande qui entoure les joueurs d’outre-Atlantique.
Succès populaires et sportifs, spectacularisation et professionnalisation du sport français, etc., soit autant d’avancées vers la modernité sportive qui font des joueurs américains des compagnons indiscutables du basket-ball français au XXe siècle.