Les choix littéraires de l’Action française 1908-1914. Naissance d’une école de goût

ANTOINE Émilie, Les choix littéraires de l’Action française 1908-1914. Naissance d’une école de goût, Maîtrise [Pascal Ory], Univ. Paris 1 CHS, 2000, 269 p.

Dans le système de pensée de l’Action française, le fait littéraire occupe une place de choix : doctrine politique et réflexions esthétiques sont inséparables, à l’instar de l’œuvre de Charles Maurras. L’objet de notre recherche porte sur la période d’avant 1914 et tend à prouver l’influence décisive de la critique littéraire de l’Action française dans les milieux littéraires contemporains, notamment par le biais de la Revue critique des idées et des livres ; influence qui s’explique, à n’en pas douter, par la rigueur et par la précision des principes concourant à l’élaboration d’une esthétique néo-classique de la littérature. Cette esthétique, de par les nombreux esprits qu’elle séduit, rencontre une adhésion suffisamment large pour laisser présager, avec la faciliter de juger à postériori, la future hégémonie intellectuelle de l’Action française dans les années 1920.

Les principes de cette esthétique reposent avant tout sur le respect de règles classiques de l’écriture (style, composition, distinction des genres…). Leur application généralisée devrait permettre, dans l’esprit des critiques littéraires de l’Action française, d’enrayer définitivement la « décadence littéraire » héritée du XIXe siècle. Le respect de la tradition littéraire française est l’autre point fondamental sur lequel insistent sans relâche les critiques. Selon la méthode maurrassienne de l’« Empirisme organisateur », la critique ne conserve que les œuvres dignes d’appartenir à cette tradition, qui fut à l’origine de la gloire des lettres françaises au XVIIe siècle. Dans la mesure où, dans l’esprit de l’Action française, restauration littéraire et restauration sociale sont liées, il revient également au critique d’encourager, par des choix conformes à la « tradition psychologique » de la France, des valeurs morales et sociales traditionnelles. On aurait tort de croire que ces choix se résument à de simples considérations théoriques : dans l’esprit des critiques, il est indispensable d’allier la parole à l’action et, pour servir ce dessein, il n’est pas exclu de soulever l’agitation, voire de recourir à la violence.