L’encadrement de la Fédération Communiste de Seine-Ouest (puis Hauts-de-Seine) de 1953 à 1968

BOULLAND Paul, L’encadrement de la Fédération Communiste de Seine-Ouest (puis Hauts-de-Seine) de 1953 à 1968, Maîtrise [Claude Pennetier, Jean-Louis Robert], Univ. Paris 1 CHS, 2000, 317 p.+ 56 p. d’annexes

Ce mémoire se propose d’étudier la direction de la fédération du Parti commu­niste français de la banlieue Ouest de Paris. Depuis la création de la fédération en 1953 jusqu’en 1968, nous avons cherché à analyser, sous des angles divers, le groupe des militants qui donnaient corps à cette équipe dirigeante. La structure du Comité fédéral se trouve en effet à l’intersection de deux problématiques au cœur de l’histoire et de l’analyse du PCF. Elle pose la question des mécanismes de la promotion au sein du Parti et, de façon plus générale, celle des pratiques politiques, militantes et sociales mises en jeu par celui-ci. Nous tentons de déterminer la composi­tion de ce groupe et comment celui-ci s’inscrit dans un environnement géographique, social et politique au cœur de la politique et du discours communistes.

Dans les années 50, on remarque l’évolution d’une équipe dirigeante en construction et, de façon générale, l’existence de certaines étapes importantes du renouvellement, comme l’année 1964, qui révèle les aménagements apportés à la direction fédérale à une date charnière de l’histoire du PCF. Du point de vue des individus, il est surtout intéressant de noter que le Comité fédéral était une structure composée de militants issus de divers horizons de l’organisation communiste. Nous avons tenté de les classer en différents types qui s’organisent selon les attributions du Comité fédéral, depuis les gestionnaires des organismes locaux jusqu’aux cadres supérieurs du Parti ou aux notables communistes.

Derrière l’unité des processus individuels de l’engagement militant, nous décelons les évolutions qui ont pu déterminer l’existence de plusieurs générations militantes. On peut en particulier s’attarder sur l’identification d’une génération originale, issue de la période de la Guerre d’Algérie. Cette distinction est à mettre en lien avec le renouvellement important de l’année 1964, qui marque son avènement. La question des femmes apparaît également décisive, notamment par ce qu’elle révèle du fonctionnement de l’organisation communiste. On voit en effet que le militantisme féminin restait marginal au sein du Parti communiste, du fait de l’incapacité à surmonter les contraintes sociales pesant sur les militantes. De son côté, la classe ouvrière représentait un élément d’unité essentiel, jusque dans la représentation d’autres catégories sociales. Marqué par le poids des ouvriers qualifiés, le groupe l’était aussi dans une certaine mesure par la distance prise avec les réalités de la condition ouvrière. Par les importantes responsabilités qui incombaient aux permanents, l’essentiel du travail politique et organisationnel était de fait pris en charge par des militants qui sortaient du cadre strict des réalités et de la sociabilité ouvrières, tandis que les mécanismes de la promotion façonnaient une identité sociale et politique propre aux militants. La structure fédérale participait activement à la cohésion de l’organisation communiste, notamment par son rôle auprès des organismes de base, et elle contribuait au travail en direction de l’ensemble de la population, par une pratique ancrée dans le territoire placé sous sa responsabilité.

La fédération Seine-Ouest apparaît de façon générale comme un espace privilégié de la pratique communiste. Les militants tentaient d’y créer une forme d’asso­ciation entre identité locale et identité communiste et ils contribuaient ainsi à la for­mation et à la pérennité du mythe de « la banlieue rouge ». À ce titre, la banlieue ouest était un espace placé en permanence sous le regard de la direction nationale. De façon générale, l’étude de la direction de la fédération Seine-Ouest permet de révéler certaines évolutions ou certains mécanismes décisifs du point de vue de l’ensemble du Parti communiste français. Les modifications apportées dans cette pério­de au corpus doctrinal autant qu’aux pratiques militantes, modifications traduites en termes de recrutement et de promotion, semblent ainsi montrer que la période de la fin des années 50 et des années 60 fut essentielle dans l’histoire du PCF.