PARIZOT Fernand, Le Service Diplomatique des Prisonniers de Guerre (SDPG) ou la Mission de Georges Scapini (1940-1945), Maîtrise [Pascal Ory], Univ. Paris 1 CRHMSS, 1999, 179 p. + annexes
Durant l’été, quarante plus d’un million et demi de soldats et d’officiers français : abasourdis par la soudaineté et l’ampleur de la défaite, prenaient le chemin des camps en Allemagne. La Couvention de Genève de 1929 sur le traitement des prisonniers de guerre prévoyait qu’un pays neutre surveillerait les conditions de la détention et mènerait les négociations avec la puissance détentrice (des prisonniers) sur les éventuelles libérations. Les États-Unis, dès la déclaration de guerre, en septembre 1939, avaient été chargés de ce rôle.
Les Allemands rendirent vite la tâche impossible aux Américains et, dès novembre 1940, ils transférèrent à la France, avec l’accord empressé du gouvernement de Vichy, les responsabilités de la Puissance protectrice. Dans ce cadre, le Service Diplomatique des Prisonniers de Guerre (SDPG) a été créé spécialement pour mener les négociations, notamment sur les libérations et sur I’application des termes de la Convention de Genève. Mais, face à la puissance absolue des vainqueurs, il était rapidement constaté que les prisonniers n’étaient en définitive pour les nazis qu’un réservoir de mains-d’œuvre et d’otages qui leur garantissaient la bonne « compréhension » de Vichy. Dans un tel contexte, les marges de manœuvre du chef du SDPG, Georges Scapini, ambassadeur, aveugle de la Grande Guerre, étaient forcément réduites. Il mena pourtant sa difficile mission avec un indéniable succès, réussissant même I’exploit de sauver tous les prisonniers juifs. Scapini, par son habileté négociatrice, par une obstination toute tendue vers la défense des captifs, comme le soulignent toutes les archives consultées, évita de dramatiques représailles. Finalement, l’armée prisonnière rentrait saine et sauve, le tiers des prisonniers avait même été libéré avant la fin du conflit.
Le bilan sous-entend, bien évidemment, des compromis, des déclarations imprudentes, des louanges à la Révolution nationale. Mais, c’est peut-être — et malgré son acquittement en 1952 par un tribunal militaire — de sa fidélité jamais démentie au Maréchal, et pour l’obstinante et sulfureuse étiquette « Vichy » qu’elle impliquait, dont souffre encore aujourd’hui la mémoire de Georges Scapini dans le souvenir de nombreux anciens prisonniers de guerre.