Le Front National et les femmes (1972-1995)

MONTICOLO Laurence, Le Front National et les femmes (1972-1995), Maîtrise [Jean-Louis Robert-Claire Andrieu], Univ. Paris 1 CRHMSS, 1999, 152 p.

Notre étude se propose d’analyser le discours que le FN tient sur les femmes, selon une démarche à la fois thématique et argumentative. Autrement dit, au lieu de nous limiter à une dénonciation stérile du FN en tant que parti machiste, nous avons renté de définir et d’analyser les tenants et aboutissants de sa politique familiale et féminine, en I’occurrence ses enjeux manifestes ou latents. Discours antiféministe et sexiste, l’image de la femme qui s’en dégage est toujours associée à un projet politique qui va bien au-delà d’une simple conception conservatrice des relations entre les sexes, fondée sur la domination masculine et sur le système patriarcal.

En effet, et c’est là tout l’intérêt de notre étude, sur ce terrain prétendument apolitique de la construction de la féminité autour de l’univers symbolique de la famille, du foyer et de la maternité, ce sont de multiples revanches qui s’expriment, révélant des enjeux éminemment politiques. Il nous a fallu identifier les énonciateurs, définir leur appartenance idéologique, le FN se présentant en effet comme un parti composite aux sensibilités diverses. Notre étude se propose donc aussi de déceler les éléments de continuité et/ou de rupture en ce qui concerne l’élaboration de ses représentations de la femme. Y a-t-il un dénominateur commun unissant ces divers groupes, malgré leurs divergences idéologiques ?

Ce parti d’extrême droite se distingue des antiféministes ordinaires, dans la mesure où sa vision des femmes et de leur place dans la société lui offre l’occasion de justifier son idéologie raciste qui consiste à éliminer tous les éléments indésirables souillant la pureté et la grandeur d’une France mythique : les juifs, les francs-maçons, les immigrés, les homosexuels, les idéologues égalitaires. Le recours au mythe de l’éternel féminin, qui impose l’idée d’une « nature » féminine éternelle, vient au secours d’une vision antidémocratique et antimoderniste, le FN réalisant par là un consensus entre les différentes familles idéologiques catholiques intégristes et traditionalistes, nationalistes révolutionnaires, nostalgiques de Vichy et de l’ordre nazi, anciens membres de l’OAS, solidaristes, légitimistes, qui s’accordent à faire des femmes françaises le pilier et l’instrument de leur politique nationaliste, identitaire et de défense de la « race » blanche.