JEANNE Vincent, Le service de censure de presse sous le régime de Vichy : juillet 1940-avril 1942, Maîtrise [Antoine Prost, Claire Andrieu], Univ. Paris 1 CRHMSS, 1997, 2 volumes, 187 p.
La mise en place d’un contrôle étatique de l’information, de manière officielle et à grande échelle, n’est pas une innovation du régime de Vichy. Mais en reprenant le service fonctionnant lors de la « Drôle de Guerre », Vichy va lui assigner un autre but : promouvoir un ordre nouveau. Quoi de plus lié à Vichy, en effet, que la censure de I’information. Une fois considérée la majeure partie des militaires, qui composaient l’essentiel des membres du service sous la IIIe République, c’est un personnel idéologiquement dévoué qui prend ses fonctions. Mais ce service, a priori essentiel au régime, traverse une crise continue sur le plan administratif qui s’étend sur toute la période étudiée. Relativement mal doté, il est en permanence soumis à la pression d’instances concurrentes, françaises ou allemandes.
Parallèlement, la censure de presse fait très tôt l’objet de multiples réformes. Devant l’uniformité de la presse, gravement nuisible à sa crédibilité et donc aux liens entretenus par le gouvernement avec la population, on tente de transformer les journalistes, manquant parfois d’enthousiasme et d’originalité, en une nouvelle sorte de propagandistes. Pour y parvenir, le régime accorde aux journaux une infime marge de manœuvre, en pariant qu’elle sera utilisée pour faire l’éloge du régime. D’emblée, dans une démarche hautement contradictoire, Vichy se plaçait donc dans une certaine forme de rapport de dépendance vis-à-vis des journalistes. L’étude des relations conflictuelles entretenues par quatre quotidiens avec la censure montre le peu de prise qu’ont pu avoir les réformes successives sur le comportement de certains organes de presse. C’est le signe de l’échec d’une politique de censure — qui ne se voulait pas seulement coercitive — et de la politique administrative qui lui était liée.