La place de l’image dans le discours historique. Les Annales, 1935-1998

MAZURIER Emmanuel, La place de l’image dans le discours historique. Les Annales, 1935-1998, Maîtrise [Jean-Louis Robert], Univ. Paris 1 CRHMSS, 1999, 206 p.

Ce mémoire est un travail d’historiographie, dans le sens où il s’appuie sur une étude des productions d’historiens dans la revue des Annales, depuis 1929 jusqu’à nos jours. Mais surtout il a la particularité de s’appuyer sur l’image, prise en tant que représentation du discours historique de la revue.

La place attribuée aux images, caractérisée par une marginalité récur­rente, n’en est pas moins importante, parce qu’elle véhicule, des valeurs sociales et culturelles, inhérentes au domaine de l’édition, et qui mettent en jeu « les conditions de production du discours », selon les mots de Michel De Cerreau. En effet, l’image intervient quand la représentation des sources de l’historien est rendue nécessaire, du point de vue de la démonstration du fait historique ; et l’image intervient dans ce cas comme une preuve supplémentaire, voire incontournable. Aussi, l’image est-elle vectrice de l’innovation de l’écriture de l’histoire. Toutefois, parce qu’elle incarne des caractéristiques inconscientes des mentalités des sociétés passées, elle met en jeu des questions propres à la mémoire de la perception visuelle. Et, à ce niveau, il s’agit de distinguer clairement le visuel de l’imaginaire, lequel est un critère qui permet au récit de s’élaborer. Cet enjeu, au sens où I’entend l’historien des Annales, met l’accent sur la matérialité de la source, prise en tant que trace pourvue de valeurs authentiques, propre à fournir des informations véritables.

Cet enjeu est resté une constante du discours des Annales, mais au prix de remises en causes liées à la conjoncture intellectuelle du XXe siècle. Des théories de Pierre Francastel, durant les années 50-60 sur « l’objet figuratif », qui aboutissent à « la sociologie de l’art », en passant par celles de Louis Marin qui, durant les années 70, a initié les bases critiques du langa­ge de l’image, le contexte de l’histoire des représentations demeure une pro­blématique en proie à des antagonismes, que Roger Chartier évoque en termes d’exergue de l’histoire socioculturelle.