L’aurore des patriarches. Les grèves de 1947 et 1948 dans le Pays-Haut

VENTURINI Eric, L’aurore des patriarches. Les grèves de 1947 et 1948 dans le Pays-Haut, Maîtrise [Antoine Prost], Univ. Paris 1 CRHMSS, 1987, 234 p.

Fondée essentiellement sur les très importantes archives de l’un des protagonistes de ces conflits et la presse régionale, cette monographie étudie la génération ouvrière qui a entamé la conquête politique de cette contrée à la faveur de ces grèves. À la Libération, le redémarrage de la sidérurgie du bassin de Longwy propulse au premier plan une nouvelle vague d’ouvriers. Fils d’immigrés (Italiens essentiellement) disposant d’un niveau d’ins­truction et de qualification supérieure à celui de leurs pères, ils cherchent leur légitimité dans la société française. Marqués par l’exemple de la Résistance, ils s’identifient au PCF qui représente à leurs yeux la symbiose de l’idéal antifasciste de leurs parents et d’une certaine respectabilité acquise au cours de la guerre. De difficiles conditions de vie et de travail (mauvais ravitaillement, salaires rognés par l’inflation, longs horaires de labeur) et l’affaiblissement du patronat local débouchent, une fois le PCF sorti du gouvernement, sur un cycle de grèves violentes et décisives.

Déclenché en novembre-décembre 1947, le premier grand conflit s’inscrit dans le cadre de l’épreuve de force qui secoue alors le pays.

La nouvelle génération saisit l’occasion pour y affirmer son existence et marque d’un sceau très (trop ?) résolu la grève. Les leçons en seront tirées et PCF et CGT mettront ensuite l’accent sur l’unité d’action avant tout. C’est la suite d’un accord départemental CGT-CFTC-MPF qu’éclate la seconde grève en septembre 1948. Cela marque le regroupement de la grande majorité de la population autour de la nouvelle génération. Des actes de violence symbolique entérineront le changement des rapports de forces dans le Pays-Haut et un compromis très favorable aux grévistes met un terme à la grève. Forts de ce succès historique les ouvriers de l’après-guerre vivront ensuite’ leur expérience politique sur l’acquis de ces « grèves-fondatrices ».