La mémoire déportée : du témoignage des déportés des camps nazis dans l’édition en langue française 1944-1993

MANNARINO Damien, La mémoire déportée : du témoignage des déportés des camps nazis dans l’édition en langue française 1944-1993, Maîtrise [Antoine Prost], Univ. Paris 1 CRHMSS, 1994, 456 p.

La connaissance des camps de concentration nationaux-socialistes passe nécessairement par le récit des déportés. Dès leur retour, ils ont commencé à le communiquer, notamment au moyen de livres. Leur recension s’imposait afin de pouvoir appréhender l’importance de ces témoignages, et d’en découvrir les dates et les rythmes de production et, par voie de conséquence, l’accueil qu’ils rencontrèrent. Le corpus, plus de six cents titres, ainsi obtenu permet de dégager trois périodes : le retour (1944-1950), le refoulé (1951-1980) et le réveil (1981-1993, provisoirement). L’expérience décrite est essentiellement celle des Français, mais les traductions la complètent. D’une période à l’autre, la représentation et la mémoire de la déportation se modifient, passant des résistants aux victimes juives. Buchenwald, camp emblématique à la Libération, cède la place à Auschwitz devenu synecdoque de la déportation et du génocide. Ce dernier ne s’inscrit que partiellement dans le système concentrationnaire, mais les camps en furent l’instrument indispensable. La réunification des mémoires de ces déportations, différentes, mais combinées, permet de rendre au nazisme qui en dressa les plans et en poursuivit l’exécution son visage entier : celui du Mal radical, concrètement historique et politique, et non celui d’un mal absolu métaphysique et incommunicable. Ainsi, la mémoire des déportés, ramenée à nous, peut servir à construire un savoir nécessaire et utilisable pour notre temps. Tel est le sens de cette histoire qu’il fallait reprendre depuis le début.