1946-1978, La presse italienne, questions juives et mémoires divergentes. (rencontre entre mémoire officielle collective et mémoires plurielles privées)

MINKOWSKI Simon, 1946-1978, La presse italienne, questions juives et mémoires divergentes. (rencontre entre mémoire officielle collective et mémoires plurielles privées), Maîtrise [Pascal Ory], Univ. Paris 1 CHS, 2000, 221 p.

L’étude propose de porter un regard ciblé et à la fois élargi sur la presse quotidienne italienne (à travers six titres quotidiens, L’Avanti, Il Corriere della sera, Il Messaggero, L’Osservatore Romano, La Stampa et L’Unità, pour tenter de souligner le rapport évolutif entre information, mémoire collective et émergence-reconnaissance d’une mémoire juive italienne.

Avant toute recherche effective, il fallait s’interroger dans un premier temps, sur la démarche choisie de dépouiller la presse et les rapports bien précis et spécifiques du couple Histoire-Mémoire. La lecture des titres quotidiens allait donc se faire suivant une grille soulignant et renforçant le poids des dates commémoratives à fortes valeurs émotives, historiques, mnémoniques… Il fallait respecter la séparation qualitative, symbolique et scientifique entre histoire et mémoire, limite rendue parfois floue compte tenu de la proximité chronologique des faits historiques avec l’actualité quotidienne de la République italienne.

L’Italie à travers l’étude de la presse quotidienne montre une attitude spécifique à la péninsule, évolutive, mais véritablement marquée par des comportements contradictoires, opposés et violents. On voit ainsi, juste après la Seconde Guerre mondiale, se construire une mémoire officielle parallèle à la vérité historique, refusant de reconnaître et donc d’accueillir certaines mémoires, comme la mémoire juive.

De façon très progressive, sans être continue (marquée par des retours en arrière, des silences imposés…), la mémoire historique en constitution tente de modifier localement la mémoire officielle et collective, de la rapprocher de façon responsable de l’histoire nationale italienne, que cette dernière peine et refuse d’admettre dans sa totalité, dans sa réalité historique. L’évocation de la Shoah et surtout des responsabilités nationales italiennes dans la participation et la réalisation du génocide juif demeure timide, refoulée encore en 1978, marquant l’échec de la presse quotidienne italienne dans son devoir d’information.

Enfin, l’étude a été orientée sur les causes de cette exception italienne et les conséquences de cette vulgate historique, également sur les carences de la mémoi­re collective à travers l’Italie contemporaine, pour arriver, en 1988, à l’émergence d’un véritable débat national, et remarquer la résurgence parallèle de vieux fantômes à travers des comportements ouvertement amnésiques et antisémites d’une Italie qui peine à faire face à son Histoire nationale, et qui paie le prix d’un cin­quantenaire d’oublis, de silences et de trous noirs du discours officiel et de la mémoire collective.