Les rapports entre Jean Vilar et le TNP : une logique de service public ?

MICHEL Bertrand, Les rapports entre Jean Vilar et le TNP : une logique de service public ?, Maîtrise [Danièle Tartakowsky, A Prost], Univ. Paris 1 CRHMSS, 1992, 168 p. (14 cassettes d’entretiens).

Dans le contexte de volontarisme politique de la Libération, le projet artistique de Vilar et la politique de certaines personnalités de l’État redonnent naissance à un Théâtre national et populaire. L’État définit le cahier des charges du TNP et Vilar établit une esthétique de la modernité, un répertoire populaire. Autour de Vilar se forme un groupe de résistants, de peintres, de compagnons de la semaine d’art dramatique en Avignon. L’École Charles Dullin, au sein du TNP, forme la génération de comédiens de l’après-guerre. La participation active de Gérard Philippe et de Maria Casarès favorisera une relation inédite au public que Jean Rouvet, administrateur du TNP et aventurier de la culture, établit avec rigueur.

Sa qualité de directeur rend J. Vilar financièrement responsable de la gestion du TNP, ce qui est par ailleurs précisé dans le cahier des charges. Pour réaliser au mieux sa mission, il met en place une structure administrative chargée des relations avec le public et du fonctionnement de la troupe.

L’État pour sa part, aide chichement une structure dont il se méfie. Par un excès d’exigences, les gouvernements de la IVe République : le Sénat et la presse de droite attaquent le TNP qu’ils stigmatisent comme révolutionnaire sans connaître le groupe, confondant ses méthodes novatrices, le répertoire, et les opinions de ceux qui y travaillent. La démission de Vilar, le 21 février 1963, marque la fin de ces expériences théâtrales : Le TNP, par nécessité financière et par vocation, oblige les acteurs à se plier aux règles de ce nouveau service public. Ceux-ci jouent beaucoup, parfois dans des lieux difficiles, à Chaillot, en banlieue et à l’étranger. Le rapport conflictuel de Vilar à l’État a pour conséquence des rapports sociaux dirigés selon une méthode de recours au public, sans l’établissement de conventions collectives. Les relations entre les acteurs et Vilar sont individualisées et se caractérisent par un ensemble de discours ou de comportements spécifiques. L’identité de la troupe est assurée par une politique salariale précise et une attribution des rôles équitable. L’appartenance à un établissement national et son implantation en milieu populaire, la force du rôle de Vilar comme fédérateur du groupe, ont permis la réussite du projet et assuré la renommée du TNP et des formes d’art qu’il exerçait dans la société.