Résumés des mémoires de maitrise – Années 1980

1989

AKOUN Myriam, L’image des manifestations dans Paris-Match de 1949 à 1968, Maîtrise [Antoine Prost, Danièle Tartakowsky], Univ. Paris 1 CRHMSS, 1989, 221 p. + 3 vol. d’illustrations.

À partir d’un corpus de cent cinquante reportages, cette étude propose une analyse particulière du phénomène de la manifestation à travers la photographie de presse.

En effet, elle s’inscrit dans un cadre délimité par Paris-Match, dans la mesure où celui-ci nous impose sa propre vision de l’événement en faisant paraître des clichés préalablement triés. Or, la manifestation, bien qu’elle s’exprime de manière complexe, met toujours en jeu, à des degrés divers, la totalité du corps social.

Étudiée sur vingt ans, du premier numéro de l’hebdomadaire à la fin du mouvement de Mai 68, l’image des manifestations témoigne, donc, de l’histoire d’une société dont les contours sont dessinés par Paris-Match.

ANDREU Corinne, Les Petits Bonshommes : un journal pour l’enfance dans l’immédiat après-guerre, Maîtrise [Antoine Prost, Jean-Louis Robert], Univ. Paris 1 CRHMSS, 1989, 194 p.

Les Petits Bonshommes est le titre d’un hebdomadaire pour les enfants lancé par le Syndicat national des instituteurs en 1921.

Les instituteurs et les institutrices proposent une revue originale éducative et distrayante, afin de contrebalancer « l’influence néfaste de certaines publications enfantines ».

Tout en se basant sur une idéologie républicaine et sur celle des milieux de gauche, les membres du syndicat mettent en place une conception d’éducation. Cette dernière est fondée sur plusieurs notions : tout d’abord, il est nécessaire de former l’esprit quantitativement par les connaissances, la lecture, et qualitativement par le raisonnement, la critique personnelle, mais également grâce à l’imaginaire et le ludisme. D’autre part, le corps doit être modelé par des exercices physiques, des jeux, le travail manuel. Ensuite, un encadrement des enfants et de la famille est indispensable à la réalisation de cette éducation. Enfin, les animateurs veulent inculquer aux enfants une morale laïque basée sur le développement de convictions, telles que : la famille, l’altruisme, l’internationalisme, le travail.

Cette conception d’éducation cherche à préparer l’enfant à sa vie d’adulte, en le rendant autonome et libre, l’enfant devenant un citoyen responsable, bon, généreux, capable de faire face aux grands problèmes de son temps.

ARDENTI Marino, Contribution à l’étude de l’immigration italienne en France : les immigrés italiens à Paris de 1926 à 1936, Maîtrise [Jean-Louis Robert, Antoine Prost], Univ. Paris 1 CRHMSS, 1989, 2 vol., 164 p. + 92 p. d’annexes

Notre principale source, les dénombrements de la population de 1926 et de 1936, a été l’objet d’un dépouillement systématique. Celui-ci a été opéré, du fait de l’importance de cette population, sous la forme d’un sondage au cinquantième. Le traitement informatique à l’aide du logiciel SPSS nous a obligés à élaborer une codification, afin d’appréhender le maximum d’informations.

Cette étude a porté sur deux niveaux. Tout d’abord, nous avons dégagé les principales caractéristiques de l’immigration italienne à Paris. Puis nous l’avons replacée dans l’espace parisien.

La population italienne est la première population immigrée présente à Paris : 48 275 Italiens à Paris en 1926 et 40 830 en 1936. Elle est principalement constituée d’hommes, qui sont âgés de 26 à 45 ans. Ceci n’est pas surprenant pour une population immigrée. Par contre, l’étude du cadre familial nous a permis de mettre en évidence les éléments d’un début d’intégration. Le mariage domine ainsi que la famille nucléaire et les ménages de moins de cinq personnes. Nous avons noté aussi une augmentation entre les deux recensements des mariages mixtes. Cependant, cette intégration n’a pas encore abouti. Ceci se constate aisément à travers le statut professionnel et les professions des immigrés italiens. Nous constatons que la grande majorité des hommes sont des salariés, bien que le groupe des « à son compte » ait augmenté (il s’agit essentiellement de petits commerçants et d’artisans), alors que la plupart des femmes n’exercent pas d’emploi. D’autre part, les professions restent du domaine du travail manuel et surtout elles sont peu qualifiées bien que la situation ait tendance à évoluer en 1936.

L’étude spatiale va nous révéler les lieux de l’immigration italienne à Paris. Nous en avons dénombré trois qui correspondent en fait au découpage social de la capitale. Dans l’est, la majorité de notre population, celle qui exerce des emplois manuels, mais aussi celle qui constitue le creuset de l’intégration. Dans le centre, essentiellement des artisans et des petits commerçants qui sont sans doute déjà intégrés, car ils sont certainement présents en France depuis de longues années. Et enfin l’ouest de Paris qui est constitué de deux types de populations. D’une part I’« élite » qui seule a pu s’installer dans ces quartiers résidentiels et d’autre part de nombreux domestiques et personnels de service qui forment une population peu stable, du fait même de leurs emplois.

BARBIER Christophe, La campagne électorale de Jean-Louis Tixier-Vignancour pour l’élection présidentielle de 1965, Maîtrise [Jacques Girault, Antoine Prost], Univ. Paris 1 CRHMSS, 1989, 323 p. + 1 vol. d’annexes

Jean-Louis Tixier-Vignancour fut un grand avocat promis à la postérité, mais en aucun cas un penseur politique de premier ordre. Néanmoins, et malgré de nombreuses compromissions, sa carrière politicienne satisferait bien des ambitions, couronnée qu’elle fut par la candidature à la magistrature suprême en décembre 1965. Dans cette élection présidentielle, première de son genre, Tixier-Vignancour est chargé de défier de Gaulle et d’unifier l’extrême droite atomisée par le conflit algérien. Il investit sans retenue son personnage dans cette aventure, aidé par un mouvement improvisé, porté par des alliés disparates et développant un programme aussi riche de propositions que dépourvu d’argumentations.

La voix mythique de l’avocat de Sôlan résonne donc, au cours d’une longue campagne truffée d’originalités ; toutefois, cette dernière n’a que l’apparence d’une campagne « à l’américaine » : le travail de propagande n’est pas scientifiquement organisé ni correctement relayé. Le succès partiellement inutile de la tournée des plages de l’été 1965 est encadré par deux échecs : la mauvaise campagne télévisée réalisée par Tixier et la fratricide participation aux municipales parisiennes de mars. Au cours de ces élections locales éclate la rivalité entre les deux factions du Comité TV : les « modérés » qui inspirent par la suite la dérive centriste de Tixier et les « durs », à la tête desquels Jean-Marie Le Pen jette les bases de ce qui deviendra le Front National.

Car si la médiocrité du score atteint le 5 décembre 1965 et la brouille qui déchire le Comité TV en janvier 1966 semblent consacrer un double échec de l’aventure Tixier, la véritable importance de celle-ci est ailleurs. La candidature Tixier-Vignancour voit la fin d’une certaine extrême droite, inspirée en proportions diverses par l’avant 1945, le poujadisme et la lutte pour l’Algérie française (extrême droite d’arrière-garde), et l’apparition virtuelle d’une nouvelle extrême droite, qui va mettre dix ans à bâtir son appareil, quinze ans pour trouver son créneau idéologique et vingt ans avant de connaître le succès des urnes. Dans cette transition est toute l’importance historique de la candidature Tixier-Vignancour à la présidentielle de 1965.

BENILAN Anne-Laure, La première campagne de presse sur le contrôle des naissances : octobre 1955 – juin 1956, Maîtrise [Antoine Prost, Lucette Le Van-Lemesle], Univ. Paris 1 CRHMSS, 1989, 2 vol., 118 p. + 97 p. d’annexes

L’étude de cette campagne de presse peut permettre la mise en perspective, à une date précise, des opinions des politiques, religieux, femmes, couples, scientifiques, médecins… sur un sujet qui touche chacun dans son intimité : sa sexualité et sa conséquence directe que pouvait être l’enfant.

Sujet privé par excellence, la « conception » est abordée publiquement par l’intermédiaire de la presse. Une perception chronologique du débat permet de distinguer trois périodes. Tout d’abord, les partisans s’appuient sur un nouveau modèle familial, basé avec l’aide des méthodes contraceptives sur une parenté consciente et non plus subie. Ensuite, les premières oppositions apparaissent avec les démographes, garants du chiffre de la population française et les catholiques, garants de la morale. Enfin dans un troisième temps, ce sont les communistes qui interviennent condamnant le birth control dans la mesure où il représente une fausse solution aux problèmes de la masse des prolétaires.

Sous les feux conjugués de ces trois oppositions, la campagne s’éteint à l’été 1956. Elle a provoqué sur l’échiquier politique français une double scission de la gauche : partis de gauche (des progressistes aux radicaux­socialistes) face aux communistes et direction du Parti communiste français face à toute une frange des militants.

BERTON Sylvie, L’Italie vue par quelques journaux de la presse parisienne repliée : mai 1940 – août 1944, Maîtrise [Antoine Prost, Jacques Girault, Philippe Gut], Univ. Paris 1 CRHMSS, 1989, 213 p.

De mai 1940 à août 1944, le Petit Journal, la Croix, le Figaro, l’Action Française et le Journal des Débats ont consacré une partie de leurs éditoriaux à l’Italie. La fréquence de ces articles a varié en fonction de trois grands critères :

D’une part, l’importance des événements qui se déroulaient en Italie a conditionné ou non la rédaction d’articles. D’autre part, les services de la censure de Vichy ont fortement dicté l’attention des journalistes aux faits italiens. Et enfin, les tendances et caractéristiques des différents quotidiens ont suscité à divers degrés l’intérêt des éditorialistes pour la sœur latine.

À l’issue de l’étude, on constate que l’Action Française et la Croix se sont largement intéressées à l’Italie, et ceci non pas seulement quand l’intérêt de la France était en jeu, comme l’ont fait principalement les autres journaux.

Ces cinq quotidiens de droite, pro-Italiens, et anti-Allemands, ont rapporté les événements italiens pendant ces quatre années en essayant tant bien que mal d’exprimer leur propre opinion, tout en soutenant, du moins en apparence pour certains, les idées du gouvernement de Vichy.

BORNET Laurent, Les syndicats et le Premier mai de 1945 à 1949, Maîtrise [Danièle Tartakowsky, Antoine Prost], Univ. Paris 1 CRHMSS, 1989, 145 p. + annexes

Ce mémoire repose sur le dépouillement de la presse de gauche (syndicale, communiste, socialiste) nationale, mais surtout régionale, car l’aspect provincial est primordial pour notre sujet (une vingtaine de départements représentatifs ayant été sélectionnés), et sur l’analyse des témoignages de certains acteurs de cette période.

Dans un temps historique court, mais chargé (1945-1949), marquant le départ d’une nouvelle ère pour la France, la vie syndicale et la journée du Premier mai, point culminant de l’année ouvrière, subissent des transformations profondes et durables. Ainsi, notre mémoire s’oriente vers deux idées directrices complémentaires permettant une approche globale du sujet.

Dans un premier temps, nous nous attachons à l’étude au niveau local et national de la préparation et du déroulement de cette journée organisée par la CGT. L’ensemble de la propagande orale, meetings préparatoires et écrits, journaux, tracts et affiches, présenté, nous abordons la réalisation de ce jour où deux aspects, l’un syndical, l’autre national, cohabitent. Seul aspect du Premier mai au début du siècle, le caractère syndical (pointage des cartes, repas fraternel, pétition) voit son importance diminuer au cours de notre période, mais son axe central, le meeting, garde, surtout en province, une importance non négligeable. Si le déclin de ce caractère est réel, il se réalise au profit du deuxième aspect de ce jour, composé du défilé et des réjouissances de fin de journée permettant de regrouper l’ensemble de la population et symbolisant le renouveau syndical.

Après cette décomposition des phases du Premier mai entre 1945 et 1949 avec ses permanences et ses influences nouvelles, nous étudions dans un deuxième temps les conséquences de la scission syndicale sur les Premier mai de 1947 à 1949. Cette partie se décompose en deux points. Tout d’abord, nous tentons de déterminer l’influence de l’affaiblissement syndical et des prémices de la scission sur le Premier mai 1947. La scission réalisée nous décrivons l’attitude de la CGT-FO face à cette journée, puis la réaction de la CGT devant cette nouvelle situation.

Cet essai tente donc de montrer la rapide évolution du syndicalisme dans l’immédiat après-guerre à travers le Premier mai. En effet d’une fête de masse célébrant la Libération en 1945, le Premier mai se transforme en 1949 en une journée de désunion où les deux syndicats CGT et CGT-FO ne savent plus quel moyen employer pour endiguer cette phase de déclin.

COHEN Dyana, Les juifs pendant et après Vichy, Maîtrise [Antoine Prost], Univ. Paris 1 CRHMSS, 1989, 118 p. + annexes

Un des principaux objectifs de ce travail est de montrer comment les Juifs ont survécu sous Vichy, avec l’aide des non-juifs notamment.

Le second objectif est d’étudier, dans la mesure du possible, leur devenir après Vichy, en fonction de leur vécu sous Vichy, le cheminement de leur identité juive étant l’un des aspects de ce devenir.

Le matériau : – Soixante questionnaires ont été envoyés aux USA, en Israël, en France. Vingt réponses ont été obtenues. – Deux films américains ont été utilisés.

Certaines archives ont pu être consultées, notamment : les archives de Ylva (Centre de recherches Juif à New York), les archives de Yad Vachem à Jérusalem, les archives du CDJC (Centre de documentation juive contemporaine), les archives de l’OSE (Œuvre de Secours aux enfants).

Il ressort de cette étude que les plus profondes mutations ne se sont pas produites dans le domaine de l’« identité juive », mais sur d’autres aspects de la personnalité. Cependant, ces mutations profondes ne sont pas toujours reconnues par les survivants.

Il nous semble également que ceux qui ont conservé des séquelles dont ils sont conscients sont plus aptes à se souvenir de leur vécu.

La multiplication des écoles juives depuis la guerre signifie-t-elle une véritable révolution culturelle ou religieuse ? Elle semble plutôt être dictée par la crainte d’assister à la disparition du peuple juif.

Des événements marquants personnels sont interprétés différemment et poussent soit vers l’assimilation, soit vers un renforcement de la judéité. Le climat psychologique dans lequel une personne rencontre le judaïsme a une grande importance.

Les interviewés ont mis la lumière sur leurs souffrances collectives et ont passé sous silence celles qui leur étaient particulières.

Ce qui est gravé dans les mémoires, parfois plus que les souffrances, ce sont les différentes personnes et organisations non-juives qui ont contribué au sauvetage des interviewés.

DAKHLIA Jamil, L’Institut Gramsci piémontais (1974-1988) : entre l’actualité du PCI et la mémoire ouvrière turinoise, Maîtrise [Antoine Prost, Danielle Tartakowsky], Univ. Paris 1 CRHMSS, 1989, 228 p.

Cette recherche, menée en particulier à l’aide d’enquêtes orales, entend retracer l’évolution de l’Institut Gramsci turinois depuis sa création en 1974 jusqu’à sa transformation en fondation en 1988. L’histoire de cet organisme spécialisé dans les sciences économiques et sociales met en scène deux générations de communistes turinois déterminant successivement deux politiques culturelles contrastées. Après avoir connu pour la plupart leur premier engagement marxiste en luttant contre le fascisme à la fin de la Seconde Guerre, les pères fondateurs de l’Institut Gramsci ont contribué au développement des théories néoconsiliaristes dans le Turin des années cinquante, axant la thématique initiale de l’établissement sur le schème de la « centralité ouvrière ». Des travaux historiographiques et archivistiques apportant alors une consécration à la tradition de luttes sociales propre au berceau du communisme italien. Lorsque, à la fin des années soixante-dix, l’institut passe sous le contrôle d’universitaires issus de la « génération de 1968 », l’établissement, désormais investi d’une vocation purement scientifique, oblitère son militantisme originel et s’efforce d’accroître son autonomie à l’égard de la fédération turinoise d’un parti qui traverse une grave crise d’identité. L’institut se détache progressivement de la tradition marxiste locale et soumet l’œuvre des grandes figures du communisme italien (Gramsci, Togliatti) à une relecture iconoclaste. L’idéologie de ses fondateurs s’éloigne de l’actualité politique pour entrer dans le domaine des archives, pendant que le PCI s’engage sur la voie de la social-démocratie et doit pour cela s’abstraire de ses racines historiques.

DUHAMELLE Alain, Les Analyses économiques de la CGT de 1923 à 1935 à travers les congrès confédéraux, Maîtrise [Antoine Prost, Jean-Louis Robert], Univ. Paris 1 CRHMSS, 1989, 146 p. + annexes

Cette recherche a pour objet de mettre en exergue la pensée économique du syndicat durant l’entre-deux-guerres, en s’intéressant particulièrement aux théories, aux idées économiques qui influencent le raisonnement cégétiste. De même, nous avons cherché à montrer l’action qu’exerce l’idéologie, la stratégie révolutionnaire sur les analyses économiques de la Confédération générale du Travail.

De ce fait, nous avons fait débuter notre étude à la fin de la Première Guerre mondiale, étant donné qu’il nous semblait que l’expérience syndicale tentée au sein de « l’union sacrée » marquait un tournant idéologique majeur. En effet, elle annonçait le socialisme réformiste que pratiquera tout au long de la période la CGT.

Par ailleurs, c’est durant l’entre-deux-guerres que le syndicat prend conscience de l’importance de l’étude des questions économiques. Pourtant, sa pensée économique reste subordonnée à l’idéologie réformiste, en d’autres termes, la CGT se préoccupe plus d’obtenir des réformes sociales que de transformer le système capitaliste. C’est la raison pour laquelle le syndicat abandonne la lutte des classes au profit de la conciliation et de l’entente sociale, car il espère tirer, de cette attitude nouvelle, des avantages sociaux primordiaux. En dépit des efforts syndicaux et de son pragmatisme, l’expérience se solde par un échec, même si elle a permis la prise en compte de la nécessité d’une éducation économique du mouvement ouvrier et malgré qu’elle ait favorisé la propagation d’idées ou de thèmes économiques qui seront à la base de la croissance économique qui suivra la Seconde Guerre mondiale (l’importance d’un plan ; les nationalisations ; une vision macro­économique ; …).

FRABEL Marle-Claude, Vision du syndicalisme anglo-saxon par la Fédération Syndicale Mondiale ? Maîtrise [Antoine Prost, Jacques Girault], Univ. Paris 1 CRHMSS, 1989, 192 p. + annexes

Organisation unique jusqu’en 1949 du Mouvement Syndical International, la Fédération Syndicale Mondiale (FSM) connaît cette date une grave crise qui entraîne le départ de quelques syndicats issus pour l’essentiel de pays capitalistes avec, à leur tête les syndicats anglais et américains.

Cette étude illustre la différenciation que la FSM établit entre les divers éléments du syndicalisme anglo-saxon, entre « réactionnaires » et « progressistes » et la modification de cette différenciation de 1946 à 1956 avec un apogée de l’hostilité au milieu de la période et une amorce d’apaisement en fin de période.

La FSM détaille longuement les conditions politiques et économiques de vie des travailleurs dans les pays capitalistes et cette étude a aussi pour but de déterminer à partir de quel type de données la FSM analyse cette situation.

Le mémoire se termine sur le rôle central accordé aux travailleurs et aux syndicats dits « progressistes » dans l’avenir du syndicalisme anglo-saxon ; sur l’espoir placé en eux et qui pour une large part ne correspond pas à un réel accord de ces hommes aux objectifs de la FSM.

FRETIGNE Jean-Yves, Les lectures de Gramsci en France entre 1968 et 1975, Maîtrise [Antoine Prost, Danielle Tartakowsky], Univ. Paris 1 CRHMSS, 1989, 245 p. + annexes

Nous nous sommes efforcés, dans ce mémoire, d’étudier la signification et les enjeux de l’actualité de Gramsci en France dans les années 1970 au travers des commentaires de son œuvre.

Nous avons d’abord dégagé la nature de cette actualité. Dans les années 1950, l’action politique de Gramsci est principalement mise en avant, tandis que, sous l’influence décisive de Louis Althusser, les aspects théoriques et en particulier philosophiques de ses écrits sont privilégiés durant la décennie 1960. L’actualité de Gramsci entre 1968 et 1975 réalise la synthèse de ces deux approches de son œuvre puisqu’elle se manifeste sous la forme d’une influe ce théorique et politique qui s’exerce sur des penseurs de la gauche française. Le débat sur cette actualité philosophique et politique de Gramsci s’articule autour de son marxisme-léninisme. Deux enjeux se dessinent.

– Le premier enjeu porte sur la nature même de l’œuvre de Gramsci. Il s’agit de déterminer si elle échappe au marxisme ou si elle s’y rattache. Cette dernière interprétation est dominante, mais elle doit s’affirmer contre la lecture qui juge les analyses gramsciennes plus proches des thèses syndicalistes-révolutionnaires et contre celle qui tend à faire du penseur italien un auteur qui inverse, par rapport à Marx et à Lénine le rapport entre l’infrastructure et les superstructures.

– Le second enjeu de l’actualité de Gramsci en France entre 1968 et 1975 est interne à l’interprétation dominante de son œuvre. Parmi les lecteurs de Gramsci qui affirment le caractère marxiste-léniniste de ses thèses un clivage politique se dessine entre ceux pour lesquels l’œuvre de Gramsci constitue un héritage que peuvent revendiquer avec raison les Partis communistes français et italien, et ceux pour lesquels les concepts politiques gramsciens sont seuls authentiquement révolutionnaires et ne sauraient s’inscrire dans les projets réformistes et révisionnistes du Parti communiste français et du Parti communiste italien.

GUILLEMOLES Alain, La tentation terroriste. L’extrême gauche et la violence en France de 1968 à 1974, Maîtrise [Antoine Prost, Danielle Tartakowsky], Univ. Paris 1 CRHMSS, 1989, 188 p.

À la fin des années 1970, les Allemands et les Italiens ont vu se développer chez eux un terrorisme de plus en plus violent. En France, il n’en a pas été de même. Pourquoi ?

C’est d’abord à travers une étude des différents groupuscules de l’extrême gauche française au lendemain de mai que l’on peut tenter de répondre en vérifiant dans quelle mesure, et pourquoi ces organisations ont résisté à la tentation de la violence. Deux d’entre elles sont tout particulièrement étudiées pour s’être les plus approchées du point de non -­retour : la GP et le GARI.

Grâce à la lecture de leur propagande et de nombreux témoignages, on arrive à reconstituer le climat interne de ces organisations, et d’expliquer comment leurs militants ne sont pas devenus terroristes – du moins pas avant les années 1980 et la courte épopée d’Action Directe.

Mais c’est seulement au terme d’une réflexion sur l’emploi du terme même de « terroriste » que l’on peut conclure et voir que si la France n’a pas engendré, dans les années 1970, « son » terrorisme d’extrême gauche, c’est peut-être parce qu’elle a su rester, plus longtemps que ses voisins, à l’écoute de sa jeunesse contestataire et entendre certaines de ses aspirations.

HERMELLIN Nathalie, La grève des mineurs en 1963 : perception nationale et souvenir local (le cas des Cévennes), Maîtrise [Antoine Prost, Lucette Le Van-Lemesle], Univ. Paris 1 CRHMSS, 1989, 2 vol., 158 et 146 p.

La grève des mineurs de mars-avril 1963 est le fruit de la lente dégradation du pouvoir d’achat relatif au mineur, et de la prise de conscience, par les intéressés, du caractère général de la crise des houillères. Les chiffres témoignent de l’ampleur du mouvement : 35 jours de grève (le plus long conflit depuis la naissance de la Vème République), 200 000 grévistes, 196 000 tonnes de charbon perdues par jour de grève, 30 millions de francs nouveaux récoltés à l’intention des mineurs. Devant l’importance de ce mouvement, le gouvernement riposte par la réquisition générale, après deux journées de grève effectives. La population, dans son ensemble, estime que cet ordre, signé par le général de Gaulle, est une atteinte au droit de grève et considère que les revendications des grévistes sont justifiées. De là naît un consensus national soutenant le mouvement des mineurs. Son unanimité tient en échec le pouvoir. La grève de 1963, à de nombreux égards, est une grève réussie. Tout d’abord se constitue une union de tous les syndicats, ensuite le mouvement bénéficie du soutien moral et financier de la nation, de plus aucun conflit majeur n’oppose grévistes et forces de l’ordre, enfin les revendications de la profession charbonnière sont satisfaites. Malgré tous ces succès immédiats, la grève n’a pu mettre fin à la récession. Elle a au contraire, illustré le déclin du charbon.

KARLIN Élise, Les Fonctions de la femme dans la presse féminine légale et clandestine pendent les années d’Occupation – septembre 1940-juin 1944, Maîtrise [Antoine Prost, Noëlle Gérôme], Univ. Paris 1 CRHMSS, 1989, 135 p.

Pendant toute la Seconde Guerre mondiale, ont coexisté en France deux sortes de presse féminine : l’un légale, qui soutenait le régime vichyste, et l’autre clandestine, qui au contraire le dénonçait. Acceptation ou révolte, la femme dut choisir son camp, sollicitée sans répit par son journal, le compagnon des mauvais jours. Mais dans les publications interdites comme dans celles qui sont autorisées, c’est toujours avec les mêmes arguments que les journalistes tentent de convaincre leurs lectrices ; l’instabilité des temps ne bouleverse en rien dans la presse féminine les trois fonctions essentielles de la femme : elle reste ménagère, mère ou femme-objet.

À travers Marie-Claire, Votre Beauté, Dimanche de la femme et quelques tracts clandestins, dont L’Humanité de la femme, notre travail s’est appliqué â montrer comment tout est fait, dans une presse qui s’adresse à des femmes, pour les immobiliser au foyer. Là, place noble s’il en est, les tâches ménagères sont multiples, du coup de balai à la préparation quotidienne du repas : la femme n’a pas un instant à elle. L’homme absent, elle est devenue chef de famille, en charge de la survie des siens. Mais en même temps, son journal l’idéalise encore soumise et obéissante : elle assume tous les rôles ensemble, à la fois femme de tête et faible créature… Cette dépendance vis-à-vis de l’idéologie dominante est d’autant plus importante que la femme reste le relais fondamental entre les forces au pouvoir et ceux qui en assureront l’avenir, les enfants. La fonction éducatrice de la mère conduit de cette manière la femme à perpétuer le système établi, où sa place demeure derrière l’homme. Rien ne doit être transgressé, et surtout pas l’échelle sociale : la femme idéale, celle qui se maquille sans vulgarité et s’habille sans ostentation, sait garder son rang. Menacée d’exclusion, la femme obéit aux injonctions complaisamment diffusées dans la presse féminine légale, et ne sort pas du chemin déjà tout tracé pour elle : elle renforce ainsi l’inégalité millénaire entre les sexes. Et la presse clandestine, si elle appelle les femmes à lutter en égale aux côtés des hommes, les alerte toujours au nom des mêmes valeurs : travail, famille, patrie…

La guerre a permis à la presse féminine, par nature conservatrice et réactionnaire, d’exacerber ses notions fondamentales, d’autant que celles-ci correspondaient parfaitement à une idéologie qui s’est étendue dès 1919 en Europe, traversant avec violence souvent les mouvements sociaux et politiques : l’idéologie fasciste, et plus encore nazie. Mais les femmes ont su trouver dans leur presse, quotidienne ou exceptionnelle, les motivations qui les ont soutenues tout au long de ces années de privation, de désespoir et de mort. Si les forces politiques se sont appuyées toujours sur leurs épaules, elles ont elles toujours réussi à transformer cette pression en pulsion de vie.

LAURENT Anne, Image explicite et implicite de la femme à travers la presse féminine de 1967 au début 1975, Maîtrise [Danièle Tartakowsky, Antoine Prost], Univ. Paris 1 CRHMSS, 1989, 202 p. + annexes

– L’image de la femme présentée dans les magazines féminins a-t-elle connu une évolution au cours de la période étudiée ?

– Les événements de 1968 ont-ils eu des répercussions sur le contenu de la presse féminine ?

– Y a-t-il convergence ou divergence entre les images de la femme présentées, d’une part, dans le discours rédactionnel, et d’autre part, dans le discours publicitaire ?

L’analyse démontre qu’une première mutation des magazines féminins intervient à la veille des événements de mai. Cette mutation fait suite à l’évolution de la condition féminine dans les années 1955-1960. Elle se traduit, dans la forme, par une restructuration des magazines. Mais surtout, dans le fond, apparaissent timidement les premières images déviant des modèles traditionnels.

Une seconde transformation de la presse féminine est enregistrée au début des années 1970, succédant ainsi aux événements de 1968 : le malaise affectant les rapports interpersonnels a éclaté au grand jour. Les magazines féminins ne peuvent alors plus nier la « révolution » en cours.

La conclusion insiste sur deux phénomènes :

– La presse féminine a été dépassée par le mouvement de remise en question du statut de la femme, n’ayant su en apprécier l’ampleur. En essayant de conserver ses lectrices traditionnelles tout en confortant son lectorat avant-gardiste, les magazines féminins n’ont pas voulu prendre parti et ont engendré leur propre déclin.

– Les publicitaires, quant à eux, ont su exploiter le mouvement de « libération » des femmes ; ils ont trouvé dans l’évolution de la condition féminine une nouvelle source d’inspiration.

LOYER Emmanuelle, Le mouvement des ciné-clubs en France 1945-1955, Maîtrise [Claude Beylie] Univ. Paris 1 CRHMSS, 1989, 151 p.

À la Libération, le cinéma jouit d’un immense prestige. Pourtant, quelques années auparavant, il était encore considéré avec pitié par nos clercs. Du mépris à l’intégration universitaire, la mutation a été profonde qui constitue la promotion culturelle du cinéma. Cette période de transition, qui s’ancre dans la Résistance pour s’achever à la fin des années cinquante, couvre le champ d’action privilégié des ciné-clubs, leur phase « héroïque » et leur succès historique.

Parler de « succès historique » est légitime dans la mesure où se développe un réseau de ciné-clubs sur le plan national, voire international, l’ampleur de ce phénomène le distinguant radicalement du « ciné-clubisme » des années vingt. Un point de vue synoptique sur cet espace de dix ans permet de repérer les profonds bouleversements qui simultanément affectent la configuration des forces du cinéma parmi lesquelles les ciné-clubs opèrent très rapidement une insertion réussie : le ciné-club trouve sa place stratégique comme interlocuteur des deux instances qui comptent dans le monde du cinéma, l’État et la profession.

Le ciné-club est traité par l’État comme partie prenante dans la promotion d’un cinéma qu’on entend ne pas laisser aux mains de l’industrie et du commerce ; en cela, il apparaît historiquement lié à la formulation du devoir culturel du cinéma, qui instaure ou parraine de nouvelles structures telles que le CNC ou l’IDHEC. Vis-à-vis de la profession, la rivalité don quichottesque dont se glorifiaient les salles spécialisées des années vingt ne convient plus ; de l’antagonisme fondamental naît un désir de collaboration exprimé des deux côtés à défaut d’être toujours mis en pratique. Dans ce partenariat obligé, les ciné-clubs devront se forger un discours spécifique face à une profession en crise permanente durant ces années d’après-guerre.

Permettant d’embrasser nombre de questions organisationnelles qui ont leur importance — le statut juridique, le problème des taxes et de la censure — la description de la mise en place réussie des ciné-clubs rend compte de la cohérence de ce phénomène, de l’articulation qui le relie aux autres instances engagées.

Le fait que régulièrement, des gens se réunissent pour voir un film et en discuter est en soi suffisamment original pour qu’apparaisse une spécificité de la pratique ciné-club. Pourtant, celle-ci s’offre d’autant plus volontiers à une investigation historique qu’elle est investie d’enjeux qui dépassent le simple cadre cinématographique : le ciné-club se dévoile comme expérience sociale de démocratie culturelle ; il est manifeste que l’utopie du populisme culturel à l’œuvre dans l’action ciné-club, correspond à l’idéologie consensuelle qui marque les toutes premières années de l’après-guerre. Mais les clubs s’affirment également comme cadres d’expériences pédagogiques qui se veulent novatrices par rapport à l’enseignement scolaire. Ces diverses réalités du ciné-club en font un lieu de pratique du cinéma tout à fait particulier, à la fois soutien d’une culture cinématographique axée sur la connaissance des grandes œuvres, et porteur d’ambitions pour la production qui leur est contemporaine, visant à faire du cinéma le véritable « langage de (son) temps ».

MAILLARD Philippe, Une loge, une ville : la Triple Unité de Fécamp (1778-1940), Maîtrise [Antoine Prost, Lucette Le Van-Lemesle] Univ. Paris 1 CRHMSS, 1989, 211 p. + annexes

Les nombreuses études générales faites sur la Franc-Maçonnerie retirent au phénomène maçonnique sa dimension régionale et son organisation particulière qui repose sur le principe fondamental du « maçon libre dans une loge libre ».

Une étude monographique permet de découvrir une autre Maçonnerie que celle de I’« Affaire des fiches » ou de la lutte pour l’anticléricalisme sous la Troisième République. Ce mémoire n’est pas l’étude d’une institution dite secrète, pas plus qu’une histoire de l’ésotérisme, mais l’analyse d’un groupe d’hommes au sein et face à une communauté urbaine et des débats nationaux.

La loge de la Triple Unité a vécu environ un siècle et demi entrecoupé de phases de sommeil ; elle a connu le régime monarchique, le régime impérial et le régime républicain et les hommes qui la composèrent venaient d’horizons géographiques, sociaux et politiques les plus divers. La ville quant a elle évolue au rythme des guerres, du trafic de son port, de son système administratif, etc.

L’analyse de cette société de pensée à Fécamp ne pouvait donc s’effectuer qu’à travers un découpage chronologique justifié par l’émergence de trois périodes caractéristiques.

Dans un premier temps, de 1778 à 1828, la loge apparaît comme le rassemblement de privilégiés formant un groupe introverti peu mêlé aux problèmes municipaux ou nationaux. Jusqu’à la Révolution française, la Maçonnerie fécampoise est dominée par les Bénédictins de l’abbaye locale, les militaires et les nobles. Elle meurt avec la disparition de ces catégories sociales trop liées au régime de la royauté et de la société d’ordres. Elle réapparaît de 1811 à 1828, composée de membres de la bourgeoisie d’affaires née de la période révolutionnaire ; la loge fait alors figure de groupe corporatif. À aucun moment elle ne s’occupe directement de politique.

Au contraire, de 1860 à 1914, la loge qui se recrée est rapidement politisée, n’hésitant pas à braver le pouvoir national ou ses représentants régionaux. Elle agit surtout entraînée par quelques hommes de caractère qui marquent le groupe de leurs idées et de leurs actions. Lorsque la Franc­-maçonnerie se laisse bâillonner par le despotisme napoléonien, la Triple Unité mène la lutte pour l’indépendance et pour le respect des principes maçonniques. Lorsque la majorité des francs-maçons rallie le camp radical, la loge de Fécamp ne répugne pas à puiser dans les théories socialisantes, voire socialistes. Bien sûr, toute cette période est marquée par la lutte anticléricale, d’autant plus vive à Fécamp que le Pays de Caux est fortement superstitieux et croyant. Dans ce milieu hostile, les Frères de la loge loin d’être unis se divisent de plus en plus ; la déchirure se fait à l’occasion d’une consultation électorale en 1910, privant la loge d’une partie dynamique de ses membres.

Dans un troisième temps, de 1914 à 1940, la loge confirme l’amorce de son déclin, aidée en cela par les pertes et les départs liés à la Première Guerre mondiale. Cette guerre est encore l’occasion pour les maçons de Fécamp de prendre des positions tranchées ; c’est quasiment la dernière fois qu’elle peut se permettre de le faire. Après la guerre, la loge plonge dans une routine et un marasme qu’un faible recrutement ne peut effacer. Elle ne doit son maintien jusqu’en 1940 qu’à la forte personnalité de ses Vénérables successifs. De fait, les décrets d’interdiction de la Franc-Maçonnerie publiés par Vichy et l’arrivée des Allemands portent un coup fatal à la Triple Unité. C’est aussi une fin honorable pour une loge condamnée de toute façon à disparaître. À la Libération, la loge n’est même pas reconstituée ; les biens sont liquidés et les quelques maçons encore actifs sont orientés sur les loges du Havre.

De cette étude, il ressort un éclairage inhabituel de la Franc-maçonnerie. Les Frères de Fécamp sont des hommes de bonne volonté, respectueux de l’ordre et des lois, mais rarement homogènes et univoques. Difficile donc de faire de la Triple Unité un groupe de pression occulte et omnipotent au sein de la ville. Il s’agit plutôt d’une micro-société en demi ­teinte, à la fois aussi radicale et pondérée que la population haute normande dans son ensemble.

MAROIS Agnès, Pratiques culturelles en banlieue : l’exemple d’une bibliothèque de quartier (à Massy), Maîtrise [Antoine Prost, Noëlle Gérôme], Univ. Paris 1 CRHMSS, 1989, 106 p. + annexes

La banlieue est dans une large mesure dépendante du centre de l’agglomération pour ce qui est des services intellectuels ou culturels qu’offrent les villes.

Les bibliothèques de lecture publique constituent cependant une exception, car c’est l’équipement culturel le plus répandu parmi les villes moyennes : pour un coût abordable, la bibliothèque peut constituer un pôle culturel non négligeable : proximité de l’habitat, diversité du public touché, reflet de la politique socio-culturelle de la municipalité.

À travers l’exemple du développement d’un quartier de banlieue parisienne à Massy, entre 1960 à 1985, dont la finalité première : fournir des logements, se double d’une politique d’équipement et d’environnement tenant compte des premiers reproches faits contre les « Grands ensembles » (cités-dortoirs, ségrégation sociale…). C’est dans ce cadre que nous avons étudié l’évolution de la conception et de la présentation de la lecture publique : passage d’une association de bénévoles à un service municipal, formes de l’appréhension de la lecture : animations, expositions, travail avec les écoles… ; l’évolution de la constitution du fonds : domaines couverts, nature des documents ; l’évolution de l’insertion dans le quartier : animations culturelles proposées, fréquentation par la population, partenariat local…

Il ne s’agit là que d’un aspect des pratiques culturelles en banlieue, mais il semble majeur dans la mesure où la maîtrise et le goût de la lecture sont des « clefs » essentielles pour accéder aux connaissances et la culture.

MONRIGAL M.-A., Reportages sur l’Afrique Noire en 1928-1929 : ambition coloniale et exigence humanitaire, Maîtrise [Jean-Louis Robert, Antoine Prost], Univ. Paris 1 CRHMSS, 1989

Dans les années 1927-1928, la propagande coloniale se fait très active dans la grande presse parisienne. Un consensus politique se fait alors sur le credo colonial et sur ses grands principes : la France a une mission coloniale ; les colonies sont rentables économiquement et il faut les mettre en valeur.

Les cinq grands reportages sur l’Afrique Noire Française qui paraissent alors illustrent ce regain d’intérêt pour les colonies et pour le colonialisme. Comment les grands reporters présentent-ils l’Afrique Noire ? Écrivant pour un large public, les reporters mettent d’abord en scène l’Afrique Noire de l’imaginaire, du fantasme et l’Africain, être exotique et inférieur racialement. En cela, ils répondent aux préjugés de leur époque, aux leurs comme à ceux de leurs lecteurs.

Sur la base de ces préjugés communs, le reporter établit ainsi un « réseau de connivences » avec son lecteur. Il peut remplir son rôle proprement informatif et juger des résultats de la mise en valeur en Afrique : la mise en valeur économique, l’éducation, l’hygiène, la mise en place des infrastructures, etc. L’Afrique Noire est présentée par tous comme potentiellement riche, mais sa mise en valeur insuffisante.

Ces journalistes reprennent en chœur ce mot d’ordre de la propagande coloniale : pour mettre en valeur l’Afrique, « il faut faire du Noir ». L’Afrique Noire n’est pas une colonie de peuplement. Mais ne faut-il pas aussi comprendre que la colonisation a dépeuplé l’AEF et l’AOF ?

Les deux journalistes Albert Londres et Robert Poulaine sont particulièrement critiques à cet égard. Tous deux dénoncent le « drame du Congo-Océan ». La construction de ce chemin de fer qui devait relier Brazzaville à l’océan et permettre la mise en valeur de l’AEF est un « effroyable consommateur de vies humaines », pour reprendre l’expression d’André Gide. Londres avance le chiffre de dix-sept mille victimes pour 130 km de voie ferrée. Mettant en cause la crédibilité de la France comme grande puissance coloniale, ce chemin de fer est le miroir de la colonisation en Afrique.

Le recrutement imposé par la construction de ce chemin de fer déclenche une révolte en Oubangui-Chari. En janvier 1929, l’Humanité fait une large part à cet événement, lui reconnaissant les caractères d’un mouvement organisé contre l’impérialisme français. Ce journal est le seul à en parler vraiment.

De ce silence, comme du peu de réactions qu’entraînèrent les reportages de Londres et de Poulaine, nous avons cru avancer cette interprétation sur le monde colonial et le colonialisme en 1928-1929 : le monde colonial est un bloc, refermé sur lui-même, n’acceptant pas les critiques ni les remarques ; défendant principalement l’image du Blanc colon, sa moralité mise en doute, le colonialisme avoue peut-être une certaine faillite de ses grands principes « civilisateurs ».

PICARD Emmanuelle, Images de l’Allemagne 1945-1955 : tentatives d’analyse des discours français sur l’Allemagne, Maîtrise [Antoine Prost, Lucette Le Van-Lemesle], Univ. Paris 1 CRHMSS, 1989, 2 vol., 121 p. + 92 p. d’annexes

En l’espace de dix années, de 1945 à 1955, la situation de l’Allemagne se modifie totalement : pays vaincu et occupé par les alliés, elle redevient une Nation et participe à la construction européenne au début des années cinquante.

Ce mémoire tente d’analyser la perception de I’Allemagne dans I’opinion française au lendemain de quatre années d’occupation, puis durant la décennie où ce pays retrouve sa souveraineté. Il s’agit au travers de trois locuteurs de s’interroger sur l’existence d’une image de l’Allemagne et des Allemands : le discours politique, les réponses aux sondages d’opinion sur le sujet et les ouvrages ou articles parus durant la période sur le problème allemand…

Un double discours est ainsi mis en lumière : si la grande majorité des Français se prononcent en faveur d’une construction européenne à laquelle l’Allemagne participerait, une image globalement négative de ce pays continue à se dégager des sondages et des discours. Cette image s’ordonne autour de thèmes constants dans les trois corpus étudiés et s’accompagne de prises de position en faveur de solutions sévères au problème allemand. En revanche, un groupe minoritaire se détache, qui travaille dès 1945 à la réconciliation franco-allemande par le biais de revues et de rencontres.

PROUST Airy, La presse hebdomadaire française et les indépendances en Afrique Noire et à Madagascar (1958-1960) : tentative pour cerner une opinion, Maîtrise [Antoine Prost, Jean-Louis Robert], Univ. Paris 1 CRHMSS, 1989, 174 p.

En 1945, tous les partis en France, sauf le Parti communiste, voulaient maintenir la suprématie française sur les territoires d’outre-mer. En effet, la Constitution d’octobre 1946, en réponse à la conférence de Brazzaville de février 1941, poursuivit l’assimilation. L’opinion publique métropolitaine n’était pas prête pour une refonte des institutions en faveur de l’outre-mer. Il fallut attendre 1956 et la loi-cadre Deferre pour que l’autonomie soit en partie réalisée et acceptée majoritairement. Ainsi, à travers les hebdomadaires utilisés, puis à travers les sondages, nous tenterons d’évaluer les émotions du public sur la venue des indépendances.

Dès sa prise de fonction le 29 mai 1958, le général de Gaulle reformula les rapports franco-africains. Mais sa Constitution de septembre 1958 laissait apparaître certaines inégalités pour une partie de l’opinion publique. Le leader guinéen Sékou Touré choisit donc l’indépendance. Toutefois, l’opinion ne voulant pas voir la France se faire évincer trop rapidement y souscrivit dans son ensemble. Néanmoins, les métropolitains restèrent indécis quant à l’avenir de la Communauté franco-africaine.

Devant la concentration des pouvoirs du chef de l’État, la création de la Fédération du Mali le 14 janvier 1959, était un recours et ressemblait à un début de dislocation. Félix Houphouët-Boigny de son côté, par opposition, créa en mai 1959, le Conseil de l’entente. Peu à peu, l’opinion se détournait des affaires communautaires. Par ailleurs, le chef de l’État n’avait plus qu’à reconnaître, le 12 décembre 1959 à Saint-Louis du Sénégal, la possibilité de l’indépendance sans quitter la Communauté.

Pour l’opinion, les indépendances étaient acquises dans les esprits. Les 2 et 4 avril 1960, les accords sur le transfert des compétences furent signés avec Madagascar. La Communauté rénovée du 4 juin 1960 rendant compatibles l’indépendance et l’appartenance à la Communauté fut comme un désaveu pour Félix Houphouët-Boigny, partisan de la Communauté. En conséquence, avec le Conseil de l’entente, il demanda l’indépendance immédiate.

Avec les dépendances d’avril 1960, une partie de l’opinion à travers le cartierisme s’empressa de refuser toute aide financière vers les nouveaux États. Pour d’autres au contraire, il était nécessaire d’inscrire de nouvelles relations d’amitiés et de coopération.

La certitude des indépendances n’empêchera nullement les métropolitains de s’opposer parfois au président de la République, pour ce qu’il considérait comme le plus propice pour la France. Le rôle du général de Gaulle fut évident dans la venue des indépendances africaines.

RAFFAELLI Fabienne, Le mouvement ouvrier dons l’Oise 1919-1935 : syndicats et grèves, Maîtrise [Antoine Prost, Jean-Louis Robert], Univ. Paris 1 CRHMSS, 1989, 154 p.

L’Oise est un département industriel (en 1926, 43 % de la population active travaille dans l’industrie) qui juxtapose des industries anciennes (bois essentiellement, cuirs et peaux, textile…) et des industries nouvelles (chimie et métallurgie). Entre 1919 et 1935, la crise qui s’abat sur les industries anciennes, notamment la tabletterie, libère de la main-d’œuvre pour les industries nouvelles en pleine ascension. Ce glissement des industries anciennes vers les industries nouvelles s’accompagne de celui de la population industrielle vers le sud du département, notamment la vallée de l’Oise.

Au sein de cette industrie en pleine mutation, les organisations ouvrières très faibles avant la guerre (1 160 adhérents à la CGT en 1914) redémarrent en 1919. Toutefois, après cette période florissante commune à toute la France, elles ne réussissent pas à s’imposer dans l’Oise. Dès 1921, le nombre de grèves chute très sensiblement, la syndicalisation, quant à elle, se poursuit jusqu’en 1927, mais reste toujours très modeste et est en butte à la division et aux dissensions internes.

Si l’Oise est minoritaire après le Congrès de Lille, la tendance s’inverse peu à peu à partir de 1927 en faveur de la CGT. Cette mutation s’accompagne du recul de l’anarcho-syndicalisme, dès 1923, et de celui de la syndicalisation des industries proprement dites au profit du secteur tertiaire et de la fonction publique.

Les organisations ouvrières s’appuient sur les industries anciennes, notamment celle du bois, qui se heurtent à la crise de leurs secteurs. La chute et la faiblesse du mouvement syndical et gréviste est donc due principalement à celle des industries anciennes. La chimie possède des organisations ouvrières quasi inexistantes ; la métallurgie, si elle affirme sa tradition de lutte au lendemain de la guerre, détient un nombre peu important de syndicats et voit le nombre de ses grèves régresser nettement dès 1925.

Outre la crise des industries anciennes, la faiblesse des organisations ouvrières dans l’Oise peut s’expliquer par la proximité de Paris, surtout dans le bassin creillois où sont regroupées les industries nouvelles ; l’hétérogénéité de la classe ouvrière, déjà présente avant-guerre, accentuée à cette période par l’accroissement des industries nouvelles et l’afflux de main-d’œuvre étrangère à laquelle se mêlent les ouvriers des industries en crise. Ces ouvriers mobiles et divers par leurs origines sociales et démographiques ne s’insèrent pas dans un mouvement ouvrier départemental divise dont aucun dirigeant, a part Thomann et Leroux qui s’inscrivent dans la tradition des années d’avant-guerre, ne marque véritablement la période.

RAULT Michèle, Conseiller municipal sous Vichy. Prosopographie d’un personnel politique – le cas du département de la Seine, 1941-1944, Maîtrise [Antoine Prost, Jacques Girault], Univ. Paris 1 CRHMSS, 1989, 184 p. + 85 p. d’annexes, cartes, index.

Quelle fut la politique municipale du gouvernement de Vichy ? Quels furent ses artisans dans le département de la Seine ? L’étude de la loi du 16 novembre 1940 réorganisant les corps municipaux et l’analyse de sa mise en œuvre éclairent les objectifs du régime. Le croisement de variables (âge, sexe, génération, courant politique, année d’élection et catégorie socio­professionnelle) dessine les profils types des 1 625 maires, adjoints et conseillers municipaux, hommes et femmes, qui furent nommés et siégèrent dans les conseils municipaux. De profondes disparités entre les édiles apparaissent suivant les responsabilités exercées. La fonction de maire est incontestablement la clef de voûte de la nouvelle charte des communes. Le maintien de conseillers municipaux élus entre les-deux-guerres représentatifs de la banlieue traditionnelle mérite attention, car il contraste avec les intentions initiales du régime qui, bien qu’il eût obtenu le soutien de plusieurs maires, échoua dans sa tentative de contrôle des assemblées municipales. De cette période, il faut retenir la possibilité qui fut donnée aux maires de nommer des femmes, disposition qui ne sera plus remise en cause. Le retour à la légalité républicaine signifia pour la majorité des « conseillers de Vichy » la fin de toute vie politique. Seules quelques personnalités qui avaient rejoint la Résistance siégeront dans les différentes institutions nées à la Libération et retrouveront leur siège aux élections municipales d’avril 1945.

SKOUTELSKY Rémi, La FEN et la guerre d’Algérie. Un syndical face à l’épreuve de la décolonisation, Maîtrise [Antoine Prost, Jacques Girault], Univ. Paris 1 CRHMSS, 1989, 246 p.

L’étude des réactions de la FEN face à la guerre d’Algérie et de toutes les conséquences que cela entraîna tant au point de vue interne qu’au point de vue externe constitue le principal objet de ce mémoire. Après avoir expliqué les caractéristiques de la FEN — idéologie, clivages internes, etc. — l’auteur examine son attitude face aux luttes indépendantistes des années cinquante, préalable indispensable pour éclairer son action lors du conflit algérien.

Une étude approfondie des positions théoriques des diverses composantes de la FEN sur le conflit et les solutions qu’elles avancent pour le résoudre, ainsi que le statut qu’elles préconisent pour l’Algérie, est menée tout au long du mémoire. L’attitude de la Fédération face au rappel du contingent, aux atteintes aux droits de l’homme ainsi que sa tentative de mettre l’école « au-dessus de la mêlée » sont également traitées.

À partir de 1958, la défense de la démocratie en France et la lutte contre la guerre d’Algérie étant étroitement imbriquées, la FEN entreprend ou participe à des actions de masse. La problématique de l’unité d’action se trouve alors posée, elle est également analysée.

Au terme de ce mémoire, l’auteur en conclut que par rapport au conflit algérien « si la FEN va dans le sens de l’évolution de l’histoire, c’est avec quelque temps de retard… ».

1988

BANET Christophe, Les associations d’enseignants publics en France de septembre 1939 à juin 1944, Maîtrise [Jacques Girault, Antoine Prost], Univ. Paris 1 CRHMSS, 1988, 180 p.

Faire un mémoire sur les associations d’enseignants publics de 1939 à 1944 avait pour principale difficulté l’impossibilité d’établir un recensement exhaustif de ces dernières. Nombreuses furent les associations qui apparurent, vécurent, puis disparurent sans laisser la moindre trace, sinon au niveau local. Seules celles qui publièrent un bulletin ou une brochure quelconque laissèrent à l’Histoire les matériaux qui prouvaient leur existence.

C’est donc à partir de leur bulletin que nous entreprîmes de répertorier dans un index alphabétique, les associations d’enseignants. Cet index, qui regroupe 210 organisations, syndicats, mutuelles, sociétés, groupements, forme l’ossature de notre mémoire. C’est sur sa base que nous avons rédigé les cinq chapitres qui le précèdent.

Cette introduction de soixante-dix pages tente de définir les grandes lignes de la vie associative des enseignants de 1939 à 1944. Nous y dressons un tableau des principaux syndicats qui les encadrent à la veille de la guerre, des difficultés qui surgissent du fait de celle-ci et de l’exode, pour ensuite nous attacher aux mesures coercitives du régime de Vichy à l’encontre des organisations d’enseignants. Mesures dont le point culminant est la loi du 15 octobre 1940 qui entraîna leur disparition presque totale. « Presque totale », car malgré ces mesures, des associations demeurèrent et d’autres se créèrent légalement. Mais ces créations nouvelles se heurtèrent constamment, sinon à l’hostilité, du moins au dédain des enseignants. Les organisations pro-­vychistes ou pro-allemandes n’eurent jamais un nombre significatif d’adhérents et en juin 1944, elles avaient disparu sans que l’on ait eu à les dissoudre.

BARBAS Jean-Claude, Philippe Pétain, Maréchal de France, chef de l’État français : Discours aux Français (17 juin 1940-20 août 1944), Maîtrise [Antoine Prost], Univ. Paris 1 CRHMSS, 1988

Chacun sait le travail de recomposition du corps de la France nécessité par les déchirures occasionnées par l’occupation allemande, l’effondrement de la IIIe République et son avatar, l’État français ou « régime de Vichy ». Fallait-il, pour satisfaire ce besoin, s’en tenir parfois à quelques phrases sorties de leur contexte ? Du constat, d’abord informel, de nuances dans les citations, de citations tronquées, puis par la suite, du défaut d’édition critique, est née l’idée d’entreprendre cette édition. La recherche et la découverte, au Musée d’histoire contemporaine (BDIC – Universités de Paris), des archives du cabinet du Maréchal et des enregistrements originaux de ses discours, plus ou moins oubliés, non catalogués, l’a transformée en besoin incoercible. Restait à lever quelques contraintes « administratives » pour préparer le meilleur corpus de textes qu’il soit possible d’établir. De l’audition des documents sonores, de l’examen attentif des textes, des ultimes cor­rections pratiquées, des publications dans la presse, des éditions d’époque et contemporaine, émergent des connaissances nouvelles.

La liste des rédacteurs se précise. Les discours du Maréchal sont écrits dans des styles différents, sa « patte » n’apparaît pas dans les longs textes à caractère administra­tif, et seuls quatre « discours » sont corrigés de sa main. L’improvisation n’est pas son fort, il bafouille, commet des lapsus parfois révélateurs. Les ultimes corrections nous dévoilent les thèmes auxquels il est attentif : l’unité de la Patrie, le travail, le respect de la parole donnée, l’école. Sur la famille, le consensus avec les rédacteurs semble parfait. Certains discours bénéficient d’une diffusion renforcée par plusieurs moyens, simultanément ou non. La radiodiffusion d’un discours indique son importance, quoique la radio ne soit pas le moyen d’information privilégié. Dès leur publication, les textes sont parfois aménagés. Le Journal officiel et le bulletin Informations générales ne sont pas au-dessus de tous soup­çons. La presse des zones Nord et Sud dispose de sources différentes dans le temps. Les éditions d’époque, sélectives, ont d’abord puisé au Cabinet, puis, à partir d’août 1941, au bulletin Informations générales tant qu’il a publié les discours du chef de l’État, avant de revenir aux textes du Cabinet. L’évolution de la réalité du pouvoir du Maréchal, avant et après le retour de Laval, est démontrée.

L’historien, le linguiste ou l’honnête homme peuvent maintenant consulter un corpus des « discours » plus riche, mais surtout avec des textes définitivement établis.

BRIAUX Marianne, Les journées du Premier mai de 1921 à 1934, Maîtrise [Antoine Prost], Univ. Paris 1 CRHMSS, 204 p. (annexes, cartes)

Dans quelle mesure la scission syndicale et l’affaiblissement du mouvement ouvrier en général, affectent-ils le déroulement du Premier mai de 1921 à 1934 ?

Manifestation de l’unité et de la solida­rité des travailleurs, n’est-il pas ainsi amené à bouleverser ses structures et ses formes, développant, par exemple, sa composante festive ?

L’examen de l’organisation et de la prépa­ration du Premier mai, confrontées à l’épreuve de la réalité, apporte des éléments de réponse. Les résultats chiffrés de la participation, l’implantation des manifestations et leur déroulement (cortèges et meetings d’unité, contenu des discours…) renseignent aussi sur les interrogations et le devenir du syndicalisme français, avant les événements du Front populaire.

CAVALIER Michel, Le Tour de France cycliste dans la presse quotidienne de 1930 à 1960, Maîtrise [Antoine Prost, Lucette Le Van-Lemesle], Univ. Paris 1 CRHMSS, 290 p.

Le Tour de France est un fait social en raison de sa popularité. Son étude dans la presse comporte deux parties. La première est l’étude des détails matériels sur l’organisation que les journaux, volontairement ou non, nous fournissent (notamment ses côtés publicitaires qui sont les plus visibles) ; la seconde, plus développée, est l’analyse du (ou des) discours de la presse. Celle-ci, intermédiaire obligé pour quiconque veut suivre l’épreuve, est le principal vecteur de son succès qui est donc d’abord celui d’un discours.

Celui que l’on trouve dans la presse de grande audience est favorable au Tour de France. Il est marqué par une constante : la magnification. Celle-ci est cependant compromise par une double évolution largement imputable aux changements réels de l’épreuve : l’intrusion dans le discours de questions financières et l’affaissement du prestige de l’événement sportif.

Mais il existe un autre discours, critique vis-à-vis de l’épreuve et de son organisation. Il est caractéristique des journaux militants que nous avons étudiés. Leur évolution corres­pond à celle de l’épreuve (institutionnalisation), mais aussi à celle de partis, flagrante notamment pour le PCF qui passe de la critique à l’utilisation du Tour de France. Mais derrière les changements de ligne politique, le discours évolue en fait, en grande partie pour satisfaire le public.

CHEKIR Dominique, Recherches sur le syndicalisme des instituteurs de la Seine de 1917 à 1922, Maîtrise [Antoine Prost, Jacques Girault], Univ. Paris 1 CRHMSS, 1988, 191 p. + annexes

Ce mémoire tente d’apporter des éléments d’analyse sur la scission qui s’opère au sein du mouvement syndicaliste des instituteurs de 1917 à 1922.

L’examen des facteurs qui aboutissent à cette rupture est entrepris à partir de la lecture du bulletin mensuel du syndicat des instituteurs de la Seine : les semailles. Une première partie, de ce caractère chronologique, retrace l’historique du mouvement associatif et syndical des instituteurs jusqu’en 1914. Une seconde partie présente la position des instituteurs syndiqués à la Fédération Nationale des syndicats d’instituteurs pendant la guerre. Leur militantisme pacifiste et leur opposition à la politique Clémenciste. Une troisième partie étudie, plus précisément, la vie du syndicat de la Seine, à partir de 1917 : les différentes tendances animées par ses membres les plus actifs ; les relations du syndicat parisien avec sa fédération, avec la CGT ainsi qu’avec la Fédération des Amicales : de nombreux militants de la Seine ayant la spécificité d’appartenir parallèlement aux deux organisations.

La question essentielle qui domine ce travail est principalement le problème de la fusion entre amicales et syndicats, thème qui oppose le syndicat de la Seine et la majorité de sa fédération. C’est également l’exposé de la confrontation de deux idées totalement divergentes sur l’efficacité du syndicalisme de masse et de sa capacité révolutionnaire. La CGT prend position, en 1919, pour la fusion entre tous les instituteurs syndiqués et amicalistes, contre la fédération, se rapprochant ainsi du syndicat de la Seine et de ses militants. Une quatrième partie évoque la répression gouvernementale à l’origine de la création du Syndicat National des Instituteurs en 1920 par les principaux militants du syndicat de la Seine, puis la scission définitive entre le nouveau syndicat et la Fédération Nationale des Syndicats des membres de l’enseignement laïque.

COURTILLE Jean-François, Le syndicat CGT Citroën du XVe de 1964 à 1972, Maîtrise [Jean-Louis Robert], Univ. Paris 1 CRHMSS, 1988, 216 p.

Au début des années 1960, l’entreprise Citroën a la réputation de pratiquer une politique sociale répressive. En effet, les droits et libertés des ouvriers y sont constamment bafoués. La direction refuse de reconnaître les organisations syndicales et accorde une marge de manœuvre très limitée aux représentants du personnel. Les conditions d’hygiène et de sécurité ne sont pas respectées dans les usines. Les rythmes de production sont élevés, tandis que les salaires restent faibles. Par-dessus tout, la surveillance étroite qu’exerce la hiérarchie Citroën auprès de chaque employé contribue à créer une atmosphère de crainte au sein de l’entreprise. Dans ce contexte les syndicats ouvriers sont marginaux et disposent d’une influence restreinte.

En 1964, pourtant, la CGT adopte une orientation ambitieuse, qui doit lui permettre de se transformer en une organisation de masse, capable de défendre et promouvoir les intérêts des travailleurs face à la direction Citroën. La gestion des œuvres sociales et culturelles du comité d’entreprise et l’unité d’action CGT-CFDT restaurent progressivement l’audience et la crédibilité des syndicats dans l’entreprise. Tout au long de la décennie, la CGT va mener des luttes en faveur des droits et libertés, mais aussi pour gagner l’augmentation des revenus ouvriers et le maintien du pouvoir d’achat des salaires, ou encore, pour obtenir l’aménagement du temps de travail et l’amélioration des conditions de vie à l’intérieur des usines Citroën XVe.

À partir de 1967, les efforts du syndicat commencent à porter leurs fruits. Les premières conquêtes sociales effectives du mouvement ouvrier à l’intérieur de l’entreprise coïncident avec l’épanouissement de la CGT qui devient une force électorale majeure et s’impose comme une réalité incontournable chez Citroën.

La grève de mai-juin 1968 est le point d’orgue historique de la CGT Citroën XVe, qui contribue largement au succès du mouvement et multiplie par quatre le nombre de ses adhérents. L’apparition de droits nouveaux, tels que la libre diffusion des tracts dans les usines, et la reconnaissance des sections syndicales par la direction, ouvrent des perspectives inespérées à la CGT.

Néanmoins, la décennie 1970 s’annonce difficile pour elle. Tout d’abord, la prépondérance de la CGT au sein du mouvement ouvrier est remise en question par l’émergence de deux courants antagonistes : les indépendants, proches de la direction Citroën, et les révolutionnaires gauchistes.

Ensuite, la direction de l’entreprise adopte une stratégie de concentration et de décentralisation qui entraîne une multitude de licenciements et lui permet de renforcer son autorité sur les ouvriers. La victoire des indépendants aux élections du comité d’entreprise de 1971, et la signature, par les syndicats FO, SISC et CGC d’un accord d’entreprise peu favorable aux travailleurs, au cours de la même année, accentuent le déclin relatif de la CGT qui éprouve des difficultés à associer ses adhérents au développement de son activité.

Néanmoins le dynamisme de la base et les efforts de structuration accomplis par les cadres du syndicat permettent à la CGT d’aborder plus sereinement l’année 1972, même si la perspective d’une réorganisation prochaine des usines Citroën parisiennes projette une ombre inquiétante sur son avenir dans l’entreprise.

CUBY Bernard, L’école primaire et les enfants étrangers en France dans l’entre-deux-guerres, Maîtrise [Antoine Prost, Jacques Girault], Univ. Paris 1 CRHMSS, 1988, 166 p.

À l’encontre des ouvriers immigrés ou des réfugiés politiques, les enfants étrangers demeurent méconnus. Nous avions l’intention, dans une première approche générale de saisir comment leur présence à l’école primaire, instrument de socialisation et principale institution avec laquelle ils étaient en contact avait été perçue. Mais il est apparu qu’ils n’étaient souvent pas mentionnés de façon explicite et spécifique. Aussi, a-t-il tout d’abord fallu mettre en évidence certains faits. À partir de recensements et d’enquêtes, et en prenant quelques départements types, le poids des enfants étrangers dans la population française, et par suite dans la population scolaire, apparaît non négligeable. Leur scolarisation a soulevé le problème de la présence ou non d’enseignements spécifiques. On a pu l’approcher dans son ensemble par la fréquentation et le degré d’instruction.

Ceci fait, il était possible de revenir aux perceptions, conflictuelles ou positives qu’en eurent les contemporains, tant pour les résultats scolaires que pour les rapports humains. Nous avons utilisé pour cela les débats parlementaires, des journaux enseignants des pièces d’archives et des ouvrages de contemporains sur l’immigration. Au-delà des silences et absences de perception spécifique et malgré les tensions qui apparaissent çà et là, il s’en dégage une impression générale de large autosatisfaction sur le rôle et la réussite de l’école. Cela peut s’expliquer par le fait que certains des problèmes (non-fréquentation, langues maternelles) ne concernaient pas uniquement les étrangers, mais aussi les Français ; cependant, une des principales causes semble également résider dans le poids des conceptions assimilationnistes qui faisaient de l’enfant étranger un être que l’école, oubliant ses origines, devait modeler pour en faire un Français type.

DABI Olivier, Croissance urbaine. Société et politique en vallée de Montmorency de 1945 à 1988, Maîtrise [Antoine Prost, Jacques Girault], Univ. Paris 1 CRHMSS, 1988, 102 p. + 68 p. annexes

Cet essai d’histoire de la vallée de Montmorency (Val-d’Oise) après la Seconde Guerre mondiale a été mené dans une triple perspective :

– étude de la croissance urbaine, fondée sur l’observation de la démographie, de la construction immobilière et de l’urbanisme ;

– étude des structures et des mutations sociales et sociologiques, reposant sur des enquêtes de ventilation socioprofessionnelle comme sur la saisie de l’évolution des mentalités ;

– étude de la vie politique et électorale, à travers l’analyse des résultats des consultations successives, tant législatives que municipales ou présidentielles.

Après une introduction géographique et historique, nous avons distingué trois étapes chronologiques, qui constituent autant de phases du processus d’urbanisation en vallée de Montmorency. De 1945 à 1962, l’évolution est caractérisée par une grande vigueur démographique, une timide amélioration des infrastructures, mais aussi certaines pesanteurs héritées de l’entre-deux-guerres retard de l’urbanisation et vote assez uniformément conservateur. Entre 1962 et 1975, la vallée accueille un afflux massif de nouveaux arrivants, ce qui ne va pas sans entraîner de profondes mutations, sociologiques puis politiques. Depuis 1975, dans un contexte général de récession démographique et économique, le grand mouvement d’urbanisation a tendance à s’essouffler au milieu d’une société déstabilisée par la crise : il en résulte une nouvelle donne électorale, marquée par certains phénomènes de volatilité et d’anomie.

La conclusion insiste sur l’émergence d’une identité locale, encore que contradictoire, puisque recelant à la fois des déséquilibres naissants et des promesses d’avenir pour souligner enfin les traits originaux d’une micro-région assez représentative de la France urbaine.

DAVID Bruno, Le mouvement anarchiste en mai-juin 1968, Maîtrise [Antoine Prost, Danièle Tartakowsky], Univ. Paris 1 CRHMSS, 1988, 226 p.

Une double interrogation sous-tend l’étude :

– Comment rendre compte de l’apparent paradoxe entre un mouvement social, qualifié de libertaire par beaucoup d’observateurs, et la déchéance du mouvement anarchiste organisé ?

– Au-delà du mythe et de l’image surfaite véhiculés par l’opinion, quels fut réellement l’importance et le rôle des militants libertaires, dans le déclenchement et le déroulement des événements de mai-juin 1968 ?

Au terme de l’étude, les conclusions s’écartent cependant de ce questionnement initial sans lui conférer une importance notable. Car, Mai 1968 intervient dans une période de restructuration du mouvement libertaire, com­mencée dès le début des années 1960. Il ne constitue pas une rupture dans l’histoire de l’anarchisme, mais le révélateur des crises et des bouleversements qui le traversent.

Deux phénomènes retiennent l’attention : la décadence et la sclérose de l’anarchisme traditionnel ; l’autonomisation du courant com­muniste libertaire par rapport à l’anarchisme, au cours d’un processus de dépassement de la référence libertaire spécifique et des théories révolutionnaires existantes.

L’une des conséquences majeures de ce mouvement de revitalisation de l’anarchisme réside dans la nécessité de rompre avec les stéréotypes traditionnels attachés au mouvement libertaire — l’accusation de nihilisme — ainsi qu’avec la perception folklorique et la vision fondée sur un a priori de décadence irrémédiable de l’historien des idées.

Le travail repose sur le dépouillement d’une presse pléthorique (trente-trois périodiques et revues), différents témoignages contemporains, des collections de tracts, des fonds d’archives privées, ainsi que sur une correspondance et une série d’entretiens réalisés avec d’anciens militants anarchistes.

DAVID Victor, L’image du médecin, des médecines et des maladies à travers les hebdomadaires « Le Nouvel Observateur », « l’Express », « le Point » et le « Concours Médical » de 1975 à 1985, Maîtrise [Antoine Prost], Univ. Paris 1 CRHMSS, 1988, 274 p.

Divers événements ont marqué cette période décennale. 1975 est l’année de la loi Veil à laquelle les médecins ont eu beaucoup de mal à s’adapter, comme en témoigne la rigidité des positions du Conseil de l’Ordre.

La généralisation de la contraception est responsable d’une flambée de MST avec la complication de certaines d’entre elles : la stérilité tubaire. Leur traitement a été bouleversé par la fécondation in vitro, avec la naissance en 1978 de Louise Brown. Cette intervention est proposée en cas d’échec de la microchirurgie. La fécondation in vitro coûte cher, pose des problèmes éthiques et échoue souvent (7 % de succès).

La prévention de l’alcoolisme et du tabagisme sont des échecs. Les médecines parallèles ont la faveur du public, mais elles suscitent de la part des praticiens des sentiments mitigés sur leur efficacité et leur innocuité.

En 1981, ont été décrites les premières observations du syndrome d’immuno-suppression acquise, ou SIDA, aux États-Unis. Il s’agit d’une nouvelle maladie. L’agent pathogène est un rétrovirus découvert en France, à l’Institut Pasteur, par l’équipe Montagnier, et l’on a mis au point une sérologie qui permet de prévenir la transmission de la maladie par transfusion. On redoute une extension de la maladie, en France surtout, car c’est le pays européen le plus touché. Le praticien a un rôle important à jouer dans l’éducation du public. On est frappé par le caractère social de ces diverses mala­dies et de l’IVG qui ont modifié la médecine de 1975 à 1985.

En onze ans, l’espace rédactionnel médical des hebdomadaires s’est modifié. Le nombre de pages a triplé pour « le Point », s’est accru de 25 % pour « le Nouvel Observateur » et « l’Express » a presque doublé.

EGLIN Jean, Les prises de position des fédérations Constructions CGT et CFTC, CFDT par rapport à l’évolution du bâtiment (1946 – 1967) : étude des rapports aux congrès, Maîtrise [Antoine Prost, Jean-Louis Robert], Univ. Paris 1 CRHMSS, 1988, 221 p. + annexes

Le mémoire consiste en l’établissement et la critique interne de ces prises de position, c’est-à-dire des présentations du secteur et des projets syndicaux le concernant. Le tout est confronté avec une ébauche de l’histoire sociale du secteur incluant des indices de l’évolution de l’effectif syndical et de l’activité gréviste, et avec les souvenirs de deux dirigeants de l’époque, J. Briquet (CGT) et A. Detraz (CFTC/CFDT).

Les sources de ce travail ont été les rapports aux congrès, les interviews des deux dirigeants, les chiffres fournis par les fédérations ou recueillis au ministère du Travail et à l’INSEE.

L’intérêt du travail consiste en l’étude du syndicalisme par rapport aux spécificités d’un secteur, en l’ébauche de l’histoire syndicale d’un secteur peu étudié pendant la période concernée. Ce travail révèle également l’importance de l’évolution des positions syndicales et leur rapprochement, ainsi que le rôle central joué par « l’industrialisation » du secteur dans ce processus ; des coïncidences intéressantes sont établies entre cette évolution et celle de la vie syndicale. En outre, une très grande vitalité et une mutation fondamentale du syndicalisme « construction » sont observées dans les années 1950.

FABUREL Véronique, La jeunesse communiste révolutionnaire : avril 1966-juin 1968, Maîtrise [Antoine Prost], Univ. Paris 1 CRHMSS, 1988, 112 p.

L’étude porte sur un « groupuscule gauchiste », de sa création à sa dissolution, et plus particulièrement sur sa participation aux événements de mai-juin 1968.

Nous sommes en présence d’une petite orga­nisation (350 militants à la veille de mai) ayant une implantation géographique homogène.

Le programme politique global de la JCR procède du trotskysme : bien que cette base idéologique soit proche de celle du Parti Communiste Internationaliste, la JCR est organisationnellement indépendante de ce parti.

À la veille de mai, la JCR a produit une analyse originale de la situation sociale et politique en France : pressentant des luttes sociales d’envergure, elle a axé son discours sur le thème d’une jonction possible entre un mouvement étudiant et un mouvement ouvrier. La particularité de la JCR réside dans l’élaboration d’un discours qui lui est propre : elle a actualisé une doctrine qui lui sert de base idéologique s’investissant notamment dans la lutte anti-impérialiste et faisant de la guerre du Viêtnam un thème privilégié de sa propagande.

En mai, la JCR a participé activement au mouvement étudiant, lui accordant un rôle de détonateur dans la crise sociale.

Après le 13 mai et pendant la période de la grève générale, la JCR a évolué à contre­-courant des autres organisations politiques : isolée des travailleurs par son implantation sociale étudiante, son discours est resté sans écho.

GOERGEN Marie-Louise, L’influence du socialisme allemand dans la formation et l’évolution du Parti ouvrier français (Guesdistes) : 1877-1889, Maîtrise [Antoine Prost, Jacques Girault], Univ. Paris 1 CRHMSS, 1988, 267 p.

Premiers marxistes en France, les Guesdistes, comme nul autre parti, sont susceptibles d’avoir subi l’influence du parti socialiste allemand (SAPD). Celui-ci est considéré, dès les années soixante-dix du XIXe siècle, comme le plus marxiste et se révèle être aussi le mieux organisé, le plus unitaire, le plus révolutionnaire et le plus internationaliste dans sa pratique.

Ce travail comporte deux grands axes de recherche, à savoir la manière dont le SAPD a été perçu par les Guesdistes et l’influence que ceux-ci ont subie de la part des socialistes allemands. Cette influence est souvent — mais pas exclusivement — fonction de l’image que les Guesdistes ont du parti allemand. Après un premier chapitre consacré à la place occupée par l’Allemagne dans la presse guesdiste, le mémoire s’organise autour de plusieurs grands domaines : l’organisation du parti, l’unité socialiste, les problèmes liés aux théories et à l’action politiques, les relations internationales (l’internationalisme des deux partis en théorie et en pratique).

En plus d’une source principale qui est la presse guesdiste — notamment L’Égalité et Le Socialiste — des correspondances, des comptes-rendus de congrès et des documents provenant des archives de la Préfecture de Police ont été utilisés.

LE GUILLOU Olivier, Des émigrés russes ouvriers aux Usines Renault de Boulogne-Billancourt en 1926 : étude du fichier du personnel, Maîtrise [Pierre Milza, Antoine Prost, Jean-Louis Robert], Univ. Paris 1 CRHMSS, 1988, 301 p. + annexes, graphiques

La condition précaire dans laquelle se trouvaient généralement les émigrés russes venus en France à la suite de la Révolution de 1917 les poussa souvent à travailler en usine : beaucoup devinrent ouvriers dans l’industrie automobile de la région parisienne, particulièrement aux Usines Renault de Boulogne-Billancourt. Nous avons étudié un échantillon de ces Russes (soit les 602 Russes entrés chez Renault au premier trimestre de 1926), par le traitement informatique des renseignements fournis par leurs fiches d’ouvriers conservées dans le fichier du personnel de Renault. Ces Russes sont pour la quasi-totalité des hommes, leur âge moyen en janvier 1926 est de 31 ans, les célibataires sont la grande majorité. Ils sont nés, pour les deux tiers, dans le sud de la partie européenne de l’Empire russe (Ukraine et provinces « cosaques »). Les provinces européennes du centre et du nord ne regroupent qu’un gros quart de ces lieux de naissance.

L’étude du parcours en France de ces Russes avant leur entrée chez Renault révèle des traits propres à une population ouvrière (emploi dans des entreprises industrielles à des travaux peu qualifiés, souvent dans des départements de la moitié nord du pays), de même que la carte de leur habitat dans la région parisienne au début de 1926 (concentration dans des localités « ouvrières » : d’abord Boulogne-Billancourt, puis le XVe arrondissement, etc.). Sur ces deux points, interviennent donc des différences avec l’ensemble de l’émigration russe, qui combine cet aspect ouvrier avec les particularités de catégories plus favorisées dans leur vie en France.

L’étude du travail chez Renault relativise tout d’abord le « parcours ouvrier » de ces Russes dans la France des années 1920, des résultats laissant penser à un manque d’intégration au travail commencé dans le premier trimestre de 1926, voire à un rejet de ce travail (séjours assez brefs, départs le plus souvent volontaires, faible qualification). Mais ceci est à nuancer pour des groupes minoritaires (notamment pour les Russes ayant retravaillé chez Renault) pour lesquels des indices suggèrent une certaine adaptation à ce travail (séjour plus long à l’usine, légère progression des qualifications). Dès lors, la nécessité d’effectuer des différenciations à l’intérieur de cet échantillon nous a conduits à étudier l’influence de l’origine géographique, en la croisant avec certaines variables vues précédemment : les résultats obtenus individualisent le groupe des « Cosaques » qui semble se placer encore plus que les deux autres groupes (Ukrainiens, Russes du centre et du nord) dans un cadre ouvrier (concentration accrue à Boulogne-Billancourt, moins de départs très rapides de chez Renault, retours dans cette usine plus fréquents).

Cette étude nous a donc permis de poser les bases descriptives pour un examen plus large du parcours dans la société française des Russes ayant travaillé chez Renault, examen qui devrait préciser le rôle de l’étape que représente ce travail et avec d’autres sourc.es, éclaircir tant l’amont (origine sociale dans l’Empire russe) que l’aval (mobilité sociale de ces Russes et de leurs enfants) de cette étape.

1987

CARNAZZA Laurence, La presse des intellectuels communistes en mai-juin 1968, Maîtrise [Antoine Prost, Danièle Tartakowsky], Univ. Paris 1 CRHMSS, 156 p. + index

Cette étude se donne pour tâche d’étudier les interprétations de mai-juin 1968 dans la presse des intellectuels communistes. Nous avons tenté de reconstituer la logique de ces prises de position, en les comparant d’une part les unes par rapport aux autres, d’autre part par rapport à l’analyse globale proposée par la direction du PCF. Enfin, nous nous sommes demandé si ces interprétations ont évolué dans les deux années qui ont suivi Mai 1968 et si elles ont influé sur l’idéologie communiste. Comme le montre la NC, et dans une certaine mesure la Pensée, les intellectuels communistes ont, dans l’ensemble, immédiatement rejeté un mouvement étudiant qui ne correspondait pas à leurs propres aspirations. Leurs analyses convergent avec celle donnée par la direction du PCF. En revanche, on trouve dans les LF et dans la Pensée des intellectuels qui ont exprimé leur désaccord avec certains points d’une analyse qui leur semblait inexacte. Les hétérodoxies se perpétuent les années suivantes, montrant que Mai 1968 constitue une cassure entre le PCF et les intellectuels. Le débat qui agite ces derniers amène le PCF à redéfinir son idéologie. Si, depuis le Comité central des 8 et 9 juillet 1968, son interprétation des événements de mai-juin 1968 ne varie pas, en revanche le Comité central de décembre 1968 marque une évolution de son discours théorique et confirme son orientation stratégique : l’union de toutes les forces antimonopolistes autour d’un programme commun de gouvernement.

CHARTIER Agnès, Champagne-Saint-Hilaire, un village du Haut-Poitou, de la fin du XIXe siècle au milieu du XXe siècle, Maîtrise [Antoine Prost, Jacques Girault], Univ. Paris 1 CRHMSS, 1987, 260 p.

Vers la fin du XIXe siècle, le flux de migration des habitants des campagnes françaises en direction des villes s’accroît considérablement. À ce titre, le département de la Vienne apparaît comme un département moyen. La commune de Champagné-Saint-Hilaire, située dans le sud-ouest de ce département, voit sa population diminuer de près de 50 % de la fin du siècle dernier jusqu’à nos jours. Si le mouvement d’exode massif sévissant depuis ces vingt dernières années porte un coup décisif au peuplement de la commune, l’étude nous montre que la situation actuelle résulte d’un long processus de dévitalisation mis en place tout au long du XXe siècle.

Ce travail suit deux grandes directions :

Il s’agit, tout d’abord, de l’étude d’une communauté rurale essentiellement agricole durant la première moitié du XXe siècle. Nous nous attachons à décrire la vie économique et sociale, la vie quotidienne. Il s’agit, ensuite, d’une étude des mécanismes de l’exode rural depuis la fin du XIXe siècle jusqu’à nos jours et de ses conséquences démographiques et sociales sur la société champenoise.

Nous avons tiré parti de sources telles que les listes nominatives de recensements de la population que nous avons pu exploiter de manière exhaustive, au moyen d’un traitement informatique de l’information. Une grande partie de nos sources provient également d’enquêtes orales pratiquées auprès de personnes âgées résidant dans la commune.

Cette monographie nous permet de dresser le bilan d’un siècle d’exode rural sur une société villageoise traditionnelle. Alors que nous touchons à la fin du XXe siècle, il semble que l’on aboutit au paradoxe suivant : tandis que l’accélération constante de l’amélioration des conditions de vie, des conditions de travail, rendent sans cesse meilleure la situation de l’individu, l’existence même de la communauté champenoise apparaît fortement compromise.

CORNEBIZE Catherine, L’histoire d’une entreprise, Carré Noir (1973-1986), Maîtrise [Antoine Prost], Univ. Paris 1 CRHMSS, 1987, 111 p. + annexes

L’histoire d’une entreprise pose un certain nombre de problèmes méthodologiques. S’agissant d’un objet composite, il apparaît utopique de vouloir l’aborder dans sa globalité.

Dans le cas de grosses entreprises, il est possible de traiter un domaine spécifique de l’entreprise : par exemple, l’histoire des stratégies industrielles ou l’histoire des exportations. En revanche, l’étude d’une petite entreprise implique une tentation pour l’historien, de faire une « histoire globaliste ». Cette procédure tendrait à négliger certains aspects essentiels à la compréhension et à l’analyse de l’entreprise.

Par conséquent, dans le cadre d’une « Histoire de Carré Noir, 1973-1986 », nous avons essayé de dégager des éléments méthodologiques permettant d’isoler des faits significatifs dans l’entreprise. Cette question fut certainement la plus ardue à résoudre : il est complexe de faire la différence entre un fait significatif et un qui ne l’est pas ; par exemple, si l’entreprise achète trois machines à écrire, il convient de déterminer l’importance de cette information pour l’analyse historique, et son influence sur le cours de l’histoire de l’entreprise.

Nous avons donc procédé de la façon suivante : nous avons questionné des spécialistes compétents dans chaque secteur de l’entreprise, organisation, management, communication interne et externe, finances, techniques, afin de déterminer les faits que nous avons définis comme significatifs. Disposant ainsi d’une grille d’analyse, nous avons relevé tous les éléments significatifs, de la façon la plus conforme aux « règles de l’art » proposées par notre panel de spécialistes.

La société Carré Noir est une société de publicité d’un type particulier. Elle est leader sur le marché du « packaging » (création de conditionnements) et de l’image de marque.

Son étude apparaît intéressante parce qu’elle a inventé un nouveau service, le marketing-design, qui répondait à une demande sur le plan économique, et qu’elle renvoie à une histoire de la consommation.

Passant de l’économie de demande/pénurie des années cinquante, à l’économie d’offre des années soixante, puis à l’économie de crise des années soixante-dix, l’histoire de la consommation a connu de profondes modifications au cours des trente dernières années. Elle a été marquée par l’explosion de la distribution dans les années soixante, qui proposait aux consommateurs une pléthore de produits concurrents. La crise des années soixante-dix a mis en avant le fait que les sociétés, si elles voulaient survivre, devaient désormais miser sur le « plus-produit » ; elles se trouvaient dans l’obligation de créer de la « valeur ajoutée », d’une part, de se faire connaître auprès de leurs publics d’autre part, afin de gagner les compétitions qui s’engageaient.

Carré Noir a été créée dans ce contexte. Sa spécialité est précisément de créer de la valeur ajoutée au produit. Un nouveau secteur d’activité s’est créé suite à sa réussite. Une telle société présente donc de multiples caractéristiques originales tant par ce qu’elle produit (production de « matière grise ») que par l’évolution de sa structure.

Entreprise fortement marquée par l’époque où elle s’est développée, les années soixante­dix, son histoire est celle d’une adaptation au marché en évolution, aux valeurs véhiculées dans les années 80.

DELMAS Jean-Christophe, Les syndicats en région parisienne sous Vichy, Maîtrise [Antoine Prost], Univ. Paris 1 CRHMSS, 1987, 285 p.

En 1939, le mouvement syndical est affaibli par l’éviction des communistes de la CGT et la mobilisation. Le gouvernement de Vichy, dont Ret1é Belin est le ministre de la Production industrielle et du Travail, met en place la loi du 16 août 1940 qui dissout les centrales syndicales et crée les comités provisoires d’organisation. Parallèlement, les syndicalistes exclus en 1939 organisent un mouvement clandestin, créant des comités populaires dans les entreprises. Ils ont pour objectif d’améliorer les conditions de vie des ouvriers et les inciter à l’action.

La Charte du Travail (4 octobre 1941) entérine la collaboration de classes et crée des organismes mixtes : familles professionnelles et comités sociaux. Son application et surtout la mise en place des nouveaux organismes (dont les nouveaux syndicats de catégories, uniques et obligatoires) connaît des fortunes diverses, alors que le mouvement illégal achève de se reconstituer, que la CGT est réunifiée (1943) et qu’une double stratégie d’action est mise en place : sur le plan légal, la prise en main des organismes de la Charte et leur utilisation ; sur le plan illégal, le renforcement des comités populaires et la lutte revendicative.

DEREU Didier, L’image de François Mitterand dans la presse en 1968, Maîtrise [Antoine Prost, Danièle Tartakowsky], Univ. Paris 1 CRHMSS, 203 p. + annexes

François Mitterrand, leader incontesté de la gauche, depuis qu’il mit en ballottage le général de Gaulle, semble redonner vie et espoir à l’opposition. L’année 1968, après le bon résultat des élections législatives de 1967, s’engage bien pour le président de la Fédération de la gauche démocrate et socialiste (FGDS). L’image de François Mitterrand est positive. Il apparaît comme le favori des prochaines élections présidentielles ; telle est l’opinion de la grande presse nationale. Cependant, si son image est appréciée, sa marge de manœuvre est limitée. Ce sont les étudiants et les événements de Mai qui révèlent ces limites. Ces limites sont celles d’une gauche divisée ; d’un mouvement estudiantin et ouvrier contestataire, mais aussi indécis dans ses choix politiques ; celles d’un homme qui, parti de rien s’est imposé à la gauche et à une grande partie des Français, mais ne sait comment aborder les événements qui ébranlent la France : il n’agit pas, on lui reproche sa faiblesse, il s’engage, tardivement, on lui reproche d’avoir dit « je » et d’avoir voulu renverser les institutions de la République. Le bilan qu’établit la presse de ces événements de Mai est terrible pour l’image de marque de Mitterrand : les élections législatives sont un échec pour la gauche et la FGDS, dont une partie des membres désignent le député de la Nièvre comme le responsable de ce mauvais résultat. L’opinion publique, elle aussi, rejette maintenant celui qui hier apparaissait comme leur favori et dont ce mémoire cherche à comprendre comment la presse traduit l’image jusqu’à sa démission de la FGDS.

FILLIATRE Cécile, L’histoire du tennis en France au XXe siècle, Maîtrise [Antoine Prost], Univ. Paris 1 CRHMSS, 200 p.

Retracer l’histoire du tennis en France au vingtième siècle, c’est s’intéresser à l’histoire du sport en général, et essayer d’expliquer par une ouverture différente et originale l’évolution politique, économique et sociale d’un pays.

Sport confidentiel réservé à une élite au début du siècle, aujourd’hui, premier sport individuel français, le tennis a acquis peu à peu ses lettres de noblesse. Le chemin qui a miné à la victoire a été long. Et, il a emprunté tous les détours historiques imposés : de la deuxième guerre mondiale à Mai 1968, en passant par Vichy ou l’indépendance de l’Afrique du Nord.

On retiendra pourtant deux époques clefs : celle des Mousquetaires dans les années trente épopée de quatre hommes qui ont montré quel tennis français existait et qu’il pouvait être le meilleur ; puis, celle de Philippe Chatrier qui depuis 1968, impact des médias à l’appui, a essaie de mettre en place une vraie politique sportive autour de trois idées fortes : popularisation, formation de champions, professionnalisme.

De l’idéal sportif du baron de Coubertin aux grands tournois internationaux d’aujourd’hui, le tennis peut être aussi un fil conducteur pour mieux comprendre l’évolution sociologique de la France.

FRUITIER Stéphane, Les événements de Mai 68 dans la Somme, Maîtrise [Antoine Prost, Danièle Tartakowsky], Univ. Paris 1 CRHMSS, 206 p. + index + annexes

Ce mémoire propose une étude des divers champs sociaux ouverts par le plus grand conflit de l’histoire sociale en France à l’échelle d’un département.

Elle fait apparaître l’aspiration des grévistes à l’obtention de nouveaux droits sociaux compris comme devant nécessairement être abordés par un mouvement d’ensemble.

Cette dynamique nationale sera trouvée à l’occasion de la journée nationale de grève le 13 mai, en réponse à la violence policière, mais surtout, avec l’entrée massive des travailleurs dans la grève, entre le 20 et le 25 mai.

Au cours de cette période, le mouvement se donne un projet sous l’action des organisations ouvrières qui consacre la primauté de l’action revendicative sur l’action politique, dans une perspective négociable du conflit. À partir de cet objectif s’établissent les structures de la grève et ses modalités d’action ainsi que le cadre paritaire devant désigner les rapports internes aux différentes composantes du mouvement et ceux à l’adversaire (patronat, pouvoirs publics, etc.).

Ce projet amènera par la suite les organisations ouvrières à briser le cadre national de la grève après le rejet par les travailleurs des « accords » de Grenelle et l’exacerbation de la crise politique qui s’en suit (déplacement du champ revendicatif au niveau des branches et de l’entreprise). Celle-ci conduira la gauche à s’avancer davantage (premiers meetings publics du PC les 29 et 30 mai), mais ne l’invitera pas, ni à sortir du cadre paritaire, ni à lier ses objectifs politiques à la dynamique sociale (la traduction politique du « gouvernement populaire » avancée par le PC étant conditionnée à la réalisation d’une union hypothétique avec les socialistes).

La droite et le patronat exploiteront dès lors l’impasse politique dans laquelle se font face socialistes et communistes, pour passer à la contre-offensive dont le discours de De Gaulle, le 30 mai, donne le signal.

À partir du consensus de la classe politique établi autour des élections législatives anticipées, et avancées par le chef de l’État, s’amorcera progressivement la reprise du travail ; la « normalisation » trouvant à s’inscrire, dans la Somme comme ailleurs, dans la victoire de la droite aux élections.

GAYME Laurent, Un aspect de la politique sociale du gouvernement Chaban-Delmas (juin 1969 – juillet 1972) : la politique contractuelle, Maîtrise [Antoine Prost, Danièle Tartakowsky], Univ. Paris 1 CRHMSS, 377 p.

Notre but était de comprendre pourquoi les années 1969-1972, prises entre la crise sociale, politique et culturelle de 1968, et la crise économique qui débuta en 1973, furent marquées par un incontestable essor des négociations contractuelles entre l’État, les grandes centrales ouvrières et le CNPF, avec d’importants résultats tant pour l’élaboration de nouvelles procédures de négociation salariale dans le secteur public, que pour la conclusion d’accords interprofessionnels dans le secteur privé, sur la mensualisation ou la formation professionnelle continue.

On pouvait a priori penser que le gouvernement de Jacques Chaban-Delmas cherchait, par la politique contractuelle, à répondre à Mai 1968. Nul doute que, dans l’esprit du Premier ministre et surtout de son conseiller social Jacques Delors, père de cette politique, Mai 68 avait offert une occasion inespérée de mettre en chantier quelques grandes réformes sociales qui iraient dans le sens d’une « nouvelle société » où la pratique généralisée de la concertation permettrait d’éviter de soudaines et dangereuses éruptions sociales.

Mais la politique contractuelle resta longtemps subordonnée à l’impératif industriel, en grande partie parce qu’elle avait été élaborée, dans les commissions du Plan au cours des années 1960, parallèlement aux principes de la politique d’industrialisation, dont elle apparaissait — et fut perçue par les syndicats — comme un moyen privilégié d’accompagnement social. Conçue dans des conditions et avec des objectifs particuliers, elle ne put ou ne sut prendre en compte, ni les aspirations nouvelles qui s’étaient manifestées en 1968 (et par exemple n’apporta aucune solution au problème des OS posé avec acuité à partir de 1971), ni la radicalisation idéologique des positions après 1968 et plus encore à l’occasion du grand réveil revendicatif de 1971, aussi bien dans les rangs syndicaux qu’au sein du gouvernement et de sa majorité. Le Programme Commun, qui marquait la montée en puissance de la gauche politique (depuis 1968 les principales forces de gauche avaient été les forces syndicales), puis la crise économique, qui remettait en question la politique d’industrialisation, sonnèrent le glas de la politique contractuelle, progressivement abandonnée après 1972, et qui échoua pour ne pas avoir radicalement rompu — ce qu’avait fait en partie Mai 1968 — avec les années de Gaulle : mais le pouvait-elle réellement ?

GROLLERON Anne, Le cinéma vu par les communistes de la région parisienne du Congrès de Tours au Front populaire, Maîtrise [Jacques Girault, Antoine Prost], Univ. Paris 1 CRHMSS, 1987, 241 p., 19 fig.

Ce travail s’efforce d’analyser le regard que les communistes de la région parisienne portent sur le cinéma durant l’entre-deux-guerres. À travers le dépouillement exhaustif du journal L’Humanité, de janvier 1920 à mai 1936 et l’étude de deux rubriques : « Cinéma­Radio » et « Fêtes, meetings et conférences », et quelques sondages dans l’hebdomadaire communiste Regards à partir de 1932 et dans le journal Front Rouge à partir de 1933, nous nous sommes efforcés de différencier plusieurs points de vue celui du critique de cinéma, celui du militant et celui du lecteur-spectateur ordinaire. L’évocation du cadre culturel et intellectuel de l’après-guerre nous a permis de rappeler les positions des communistes sur le problème de la culture. Nous avons entrepris d’étudier plus précisément la critique communiste du cinéma telle qu’elle s’exprime dans L’Humanité. Nous avons tenté de mettre en évidence les principes fondamentaux de la critique de cinéma de L’Humanité, nous avons analysé ensuite leur application dans le compte-rendu des films. Ensuite nous avons confronté cette critique communiste avec la pratique que les militants ont du cinéma en nous référant aux renseignements que donne la rubrique « Fêtes, meetings et conférences » sur diverses manifestations. Enfin, en confrontant le discours des critiques communistes et les programmes de deux salles de cinéma nous avons tenté de redonner vie au public communiste de l’entre-deux-guerres.

HARTMANN Catherine, Histoire de la jeunesse étudiante chrétienne de 1962 à 1966, Maîtrise [Antoine Prost], Univ. Paris 1 CRHMSS, 1987, 126 p. + annexes

La Jeunesse étudiante Chrétienne est un mouvement l’Action Catholique créé en 1929. Entre 1962 et 1966, le mouvement connaît une période agitée. Au lendemain de la guerre d’Algérie, la JEC doit retrouver de nouveaux thèmes mobilisateurs. Forte de trente mille adhérents environ, répartis sur toute la France, la JEC reconstruit une pensée et une pédagogie centrée sur le thème de l’école et de ses rapports avec la société. Peu à peu, une nouvelle analyse se fait jour, résolument orientée à gauche. Cette pensée s’élabore en liaison avec d’autres mouvements contre l’UNEF ou le MRJC. Une réforme de l’enseignement supérieur, connue sous le nom de réforme Fouchet, se met en place et soulève une opposition de la part des organisations étudiantes, dont la JEC La participation à cette lutte étudiante pose une nouvelle question au Mouvement. Faut-il ou non engager la JEC en tant que telle ?

La réponse à cette question entraîne des divergences au sein de l’équipe dirigeante et une rupture avec l’épiscopat français qui, au nom du « mandat » qui relie organiquement les mouvements d’Action Catholique à l’Église, ne reconnaît plus les membres de l’équipe nationale qui souhaitent engager le Mouvement plus en avant dans des prises de position syndicales ou politiques. Cette crise, répercutée par l’ensemble de la presse nationale, pose au grand jour le problème de l’autonomie des mouvements laïcs et surtout des mouvements de jeunesse dans l’Église. Un essai d’un mouvement autonome appelé Jeunesse Universitaire Chrétienne, est fait par les dissidents. Ce mouvement est éphémère, car non reconnu par l’Église.

De son côté, l’Église encourage une nouvelle forme d’apostolat étudiant, la Mission étudiante, créée en octobre 1966. Cette Mission étudiante, au sein de laquelle l’Action catholique Universitaire autonome par rapport à la JEC, consacre la fin de la JEC comme mouvement universitaire.

HASSENTEUFEL Patrick, Citroën-Paris en mai-juin 1968 dualités de la grève, Maîtrise [Antoine Prost, Danièle Tartakowsky], Univ. Paris 1 CRHMSS, 1987, 216 p.

Citroën, du fait de l’image quasi caricaturale qu’elle donne de la contradiction entre modernité économique et archaïsmes sociaux, offre un champ d’analyse intéressant pour la grève de mai-juin 1968. Le premier aspect mis en évidence est la résistance d’une partie de la « base » (c’est-à-dire les non syndiqués au moment du déclenchement de la grève), qui s’affirme maoïste, au fort encadrement syndical de la grève (avant tout de la part de la CGT). Ce groupe maoïste se différencie à la fois par ses formes d’action, sa vision de la grève, par la dimension politique qu’il lui accorde, par ses revendications et par sa composition. Ainsi se met en place une dualité qui a rendu plus complexe l’opposition ultérieure au sein de l’entreprise. On a donc ici un exemple des changements entraînés par l’émergence de l’extrême gauche dans les entreprises à la faveur de la grève de mai-juin 1968. L’autre aspect est la différenciation entre le rôle du contexte extérieur, formé par les événements de Mai 68, et celui des spécificités structurelles de l’entreprise, au niveau de son système de relations sociales. On voit que chez Citroën celles-ci déterminent les principaux aspects de la grève : la prépondérance syndicale, sa forte dimension émancipatrice, la présence importante de revendications structurelles, c’est-à-dire mettant en cause le système de relations sociales, une participation à l’occupation dominée par les ouvriers professionnels fran­çais, et une puissante opposition à la grève de la part de la direction, qui aboutit en fin de compte à une grève longue (six semaines). C’est aussi la structure qui permet de comprendre que la grève de 1968 fût, chez Citroën, une grève d’émergence syndicale ; alors que le contexte a permis le déclenchement, l’ouverture des discussions et leur dénouement.

LECOQ Denis, La Presse hebdomadaire et les interventions militaires de la France en Afrique Centrale, Maîtrise [Antoine Prost, Jean-Louis Robert], Univ. Paris 1 CRHMSS, 1987, 114 p. + annexes

En analysant les thèmes que l’on retrouve dans la presse hebdomadaire et leur fonction présumée, ce mémoire définit une typologie de la presse vis-à-vis des interventions. Trois types d’attitudes sont proposés : la discussion du consensus, l’opposition aux interventions et la polémique sur ces dernières.

Ces types se distinguent par une approche différente du phénomène interventionniste : moyen d’action dans le cadre de la coopération, phénomène singulier développant ses propres notions, ou encore instrument d’une politique gouvernementale.

En outre, l’ensemble de l’étude démontre l’importance de la variable « position politique de l’hebdomadaire », tant dans l’attitude de la presse vis-à-vis des interventions, que dans l’appréhension des problèmes politiques de l’Afrique contemporaine.

MARTIN Sylvie, L’histoire des livres d’histoire grand public, Maîtrise [Antoine Prost], Univ. Paris 1 CRHMSS, 1987, 217 p. + annexes

Cette recherche s’intéresse à deux bibliothèques municipales du département des Hauts-de-Seine, choisies pour leurs différences démographiques Bagneux (municipalité communiste) compte 40 000 habitants, Sceaux (municipalité UDF) n’en compte que 18 000. De plus, la répartition sociodémographique de ces deux populations confère à Bagneux un caractère de municipalité populaire et à Sceaux, un caractère de petite ville bourgeoise. C’est ce que montre la première partie, grâce aux chiffres du recensement de population de l’INSEE de 1982. Ces différences se retrouvent au niveau des populations fréquentant les deux bibliothèques municipales. On pouvait dès lors penser que les attentes de ces deux publics ne présenteraient pas une parfaite similitude.

On a donc comparé les acquisitions et les emprunts en histoire dans les deux bibliothèques et notamment l’impact de cinq émissions de radio et de télévision ainsi que celui de trois revues d’histoire grand public sur ces acquisitions depuis 1975. La deuxième partie mesure l’impact de ces émissions et revues sur les acquisitions. Elle montre que ces dernières restent indépendantes des différents supports de l’histoire (émissions et revues) : les émissions et les revues Historia et Historama répondent aux attentes d’un public amateur d’une histoire anecdotique et romancée, la bibliothèque de Bagneux touche un public peu sensibilisé à l’histoire, la revue L’Histoire vise un public diplômé et cultivé, la bibliothèque de Sceaux accueille un public constitué en grande partie d’étudiants et de cadres supérieurs. Cependant, une émission se distingue des autres : c’est l’émission de Bernard Pivot, Apostrophes, dont la notoriété se traduit concrètement par un fort pourcentage de livres d’histoire présentés à cette émission et acquis par les deux bibliothèques.

La troisième partie s’attache à mesurer l’impact des mêmes émissions et revues sur les emprunts de livres d’histoire dans les deux bibliothèques, après avoir présenté quelques études (du ministère de la Culture ou de l’Ina) sur l’incitation à la lecture par la télévision. Si les différents publics connaissent une évolution de goûts parallèle, la télévision ne semble pas jouer un rôle moteur : cette dernière, de même que les revues étudiées, se contente de satisfaire les désirs les plus immédiats de leur public, cherchant en priorité le taux d’audience et le chiffre de vente les plus élevés. Les deux bibliothèques, quant à elles, remplissent un rôle de service public et s’attachent à offrir un éventail de choix le plus large possible.

NIVET Philippe, Une commune cheminote de la banlieue d’Orléans, Fleury-les-Aubrais (Loiret) de 1911 à 1971, Maîtrise [Antoine Prost], Univ. Paris 1 CRHMSS, 1987, 272 p.

Fleury-les-Aubrais est une commune suburbaine du nord d’Orléans. Avant 1840, ce n’était qu’un village de vignerons qui atteignait à peine 1 000 habitants ; en 1911, la population avait presque triplé avec 2 887 habitants en 1982, Fleury était devenue la deuxième ville du département du Loiret avec 19 568 habitants. C’est que, en 1843, la commune s’était trouvée sur la ligne de chemin de fer Paris-Orléans et que, malgré l’opposition des autorités orléanaises, une importante gare dut être installée, à partir de 1853, sur son territoire, au lieu-dit « Les Aubrais », là où les lignes bifurquent vers Tours et vers Vierzon, la gare d’Orléans se trouvant dans un cul-de-sac. C’est ainsi que Fleury devint une commune cheminote de proche banlieue, comparable à Longueau dans la banlieue d’Amiens et à Saint-Pierre-des ­Corps dans la banlieue de Tours.

L’étude de la commune entre 1911 et 1971 porte essentiellement sur les trois points suivants : l’évolution et la composition de la population, son comportement politique, le développement urbain.

Le dépouillement informatique des listes nominatives de recensement de 1911 et de 1936 et le dépouillement de la liste électorale de 1938 ont permis d’étudier la profession, le lieu de naissance et l’âge des habitants de la commune, ainsi que la structure des ménages. Cette partie de l’étude met notamment en valeur la part des cheminots dans la population active avant la Seconde Guerre mondiale : ils représentent 32 % de la population active en 1911, 29 % en 1936 et 33 % des électeurs en 1938. L’analyse des recensements de l’INSEE montre ensuite une diversification de la population après la Seconde Guerre mondiale : entre 1954 et 1975, on assiste à un phénomène de déprolé­tarisation et de tertiarisation de la commune.

Politiquement, contrairement à ce qui se passe à Longueau ou à Saint-Pierre-des-Corps, les communistes ne parviennent pas à conquérir la mairie avant la Seconde Guerre mondiale. Fleury-les-Aubrais est alors une commune radicale, où les communistes ne dépassent pas 30 % des suffrages exprimés. Ce comportement politique peut s’expliquer par le maintien à Fleury d’une population rurale et vigneronne au vote typiquement radical, mais aussi par la personnalité des candidats radicaux, Fernand Rabier et Jean Zay, qui se présentent comme défenseurs des cheminots. Sous la Quatrième République, les communistes obtiennent près de 40 % des suffrages exprimés, mais ce n’est qu’en 1971, malgré la diversification du corps électoral, qu’un maire communiste est élu à Fleury.

Le développement urbain de Fleury est apparu surtout après les bombardements de 1944, la commune ayant été détruite à 48 % à cause des installations ferroviaires installées sur son territoire. Fleury est alors inclus dans le plan de reconstruction de l’agglomération orléanaise et devient une commune industrielle. La reconstruction permet aux municipalités socialistes de l’époque de développer le logement social et, à partir des années 1950 surtout, de contrôler l’urbanisme, notamment grâce à la mise en place d’une ZUP.

Cette étude d’histoire urbaine montre essentiellement l’émergence d’une véritable ville de banlieue qui, par son opposition à tout projet d’annexion par Orléans de sa partie industrialisée et par sa volonté de développer une politique urbaine autonome, cherche de plus en plus à affirmer son identité par rapport à la métropole orléanaise et à défendre avec force l’autonomie communale.

ORGAZ-GARCIA Margarita, Le quartier de la Paloma entre 1930 et 1955, Maîtrise [Antoine Prost], Univ. Paris 1 CRHMSS, 1987, 134 p.

Ce mémoire a pour objet l’étude d’un quartier madrilène populaire du vieux centre urbain au XXe siècle. Le découpage en six zones a permis d’effectuer des comparaisons dans l’espace, le travail effectué en deux sondages sur deux dates séparées de 25 ans permet des comparaisons dans le temps.

Les principales sources utilisées sont de type quantitatif listes nominatives de recensement de 1930 et de 1955 ainsi que statistiques générales de la ville de Madrid sur la population, le logement et le coût de la vie.

Le traitement par ordinateur en D BASE III des données des listes nominatives a été établi au moyen de huit fichiers, quatre pour chacun des deux sondages.

Les sources qualitatives comprennent des traités d’hygiénistes, des recueils de décrets municipaux concernant la construction, les loyers et la salubrité des immeubles, des dossiers des maisons du quartier ainsi que des interviews de la population (non inclus dans le texte).

Deux hypothèses ont pu ainsi être vérifiées : – corrélation entre la valeur financière des logements et certaines catégories socio professionnelles de la population ainsi qu’avec la structure des ménages qui les occupent. – la difficulté des conditions de vie des classes modestes de la population, pendant la période d’après-guerre en Espagne, a conditionné la structure des ménages, et ce, dans les six quartiers étudiés.

ROUX Marianne, Les modèles culturels véhiculés par les contes du Petit Parisien, 1935-1937, Maîtrise [Antoine Prost, Jean-Louis Robert], Univ. Paris 1 CRHMSS, 1987, 315 p. + annexes

L’étude de 280 contes publiés dans le Petit Parisien durant les trois années 1935, 1936, 1937, lus par un million de lecteurs (tirage du Petit Parisien en 1935) augmentés de leurs proches, sert de point de départ dans ce mémoire à une lecture socio-culturelle de la France des années trente. Le conte offre un divertissement au quotidien faisant appel à l’expérience et touchant à l’imaginaire.

À partir de ces 280 récits, produits par 44 auteurs différents, on peut reconstituer l’univers élaboré par le conte. La France et le Paris de l’époque dominant massivement, les histoires des contes se fondent entièrement sur le portrait d’un ou de quelques individus et de leurs rapports professionnels, socio-économiques, familiaux, entre sexes. Cet univers est construit sur des valeurs dont les modèles culturels sont l’expression. En trois grands points (mentalités collectives, comportements privés dans le cadre et autour du mariage, comportements sociaux dans la vie professionnelle et matérielle), cette étude caractérise la société fictive du conte de la manière suivante : – hiérarchisation et sexisme, où pouvoir de l’argent et pouvoir masculin sont affirmés, domination des institutions sur les citoyens, des patrons sur leurs employés. – passivité et fatalisme, à travers le respect craintif des pouvoirs précédents, la lecture occulte qui est faite du sens de la vie, la résignation devant les échecs professionnels, amoureux, et qui témoignent d’un pessimisme explicite ou voilé, – interprétation morale de toute action ou pensée des personnages, qui met en évidence des valeurs refuges telles la nature protectrice et nourricière, l’autosatisfaction des besoins dans un circuit économique perverti, le pater­nalisme du patron, de l’homme de loi et du politique. – amour et argent, comme nerfs principaux des histoires du conte.

Cet univers français, urbanisé, tertiaire, préoccupé surtout des apparences, des conven­tions sociales, tant dans la pratique du mariage que dans l’approche du rôle du citoyen ou l’exhibition assez constante du niveau de vie des personnages, se révèle superficiel et ne tient pas compte de l’actualité : la vie militante et syndicale, les réformes sociales, la richesse culturelle de la génération « fleur bleue » des années trente, les conditions de travail en usine, la montée des fascismes et racismes, tout cela n’apparaît pas. Le déclin du conte, concomitant à la chute des tirages du Petit Parisien, reflète en partie l’inadéquation à la société des années trente de ces modèles conservateurs.

VASSAL Marc, Les instituteurs du Loiret et le syndicalisme, 1905-1925, Maîtrise [Antoine Prost], Univ. Paris 1 CRHMSS, 1987, 140 p.

Ce mémoire a pour objet l’étude sociologique de la population des instituteurs du Loiret entre 1905 et 1925 ainsi que celle de son éveil au syndicalisme.

Une enquête statistique effectuée à partir des dossiers administratifs d’instituteurs et d’institutrices publics titulaires ayant exercé dans le département au cours de la période étudiée a permis de tracer un portrait de l’instituteur du Loiret au début du siècle. Celui-ci était plutôt de sexe féminin, originaire du département, né dans une famille d’ouvriers-employés ou d’artisans-commerçants, titulaire du B.S. et du CAP après être passé par l’École Normale et marié avec un ou deux enfants. Il se trouvait enfin dans une situation morale et matérielle souvent difficile.

Déjà cependant, commençait à se craqueler l’image populaire du hussard noir de la République, une évolution que n’allait faire qu’accentuer l’apparition du syndicalisme enseignant. Dans le Loiret, la création officielle, après une existence clandestine des premiers syndicats d’instituteurs se fit au moment de la scission qui affecta l’ensemble du mouvement syndical français. Deux organisations devaient cohabiter : la section locale du SNI (majoritaire) et le syndicat des membres de l’enseignement laïque (minoritaire).

Toujours est-il que grâce au syndicat, outil de cohérence et de cohésion renforcée de profession, instrument de défense, moyen de négociation avec le pouvoir et l’administration, lieu où fourmillaient les idées les maîtres purent désormais se définir par rapport à la société et à ses problèmes. Avec le syndicalisme la notion d’esprit de corps propre aux instituteurs prit une dimension nouvelle. La « famille » des enseignants primaires avait trouvé là le moyen idéal de resserrer ses liens.

VENTURINI Eric, L’aurore des patriarches. Les grèves de 1947 et 1948 dans le Pays-Haut, Maîtrise [Antoine Prost], Univ. Paris 1 CRHMSS, 1987, 234 p.

Fondée essentiellement sur les très importantes archives de l’un des protagonistes de ces conflits et la presse régionale, cette monographie étudie la génération ouvrière qui a entamé la conquête politique de cette contrée à la faveur de ces grèves. À la Libération, le redémarrage de la sidérurgie du bassin de Longwy propulse au premier plan une nouvelle vague d’ouvriers. Fils d’immigrés (Italiens essentiellement) disposant d’un niveau d’ins­truction et de qualification supérieure à celui de leurs pères, ils cherchent leur légitimité dans la société française. Marqués par l’exemple de la Résistance, ils s’identifient au PCF qui représente à leurs yeux la symbiose de l’idéal antifasciste de leurs parents et d’une certaine respectabilité acquise au cours de la guerre. De difficiles conditions de vie et de travail (mauvais ravitaillement, salaires rognés par l’inflation, longs horaires de labeur) et l’affaiblissement du patronat local débouchent, une fois le PCF sorti du gouvernement, sur un cycle de grèves violentes et décisives.

Déclenché en novembre-décembre 1947, le premier grand conflit s’inscrit dans le cadre de l’épreuve de force qui secoue alors le pays.

La nouvelle génération saisit l’occasion pour y affirmer son existence et marque d’un sceau très (trop ?) résolu la grève. Les leçons en seront tirées et PCF et CGT mettront ensuite l’accent sur l’unité d’action avant tout. C’est la suite d’un accord départemental CGT-CFTC-MPF qu’éclate la seconde grève en septembre 1948. Cela marque le regroupement de la grande majorité de la population autour de la nouvelle génération. Des actes de violence symbolique entérineront le changement des rapports de forces dans le Pays-Haut et un compromis très favorable aux grévistes met un terme à la grève. Forts de ce succès historique les ouvriers de l’après-guerre vivront ensuite’ leur expérience politique sur l’acquis de ces « grèves-fondatrices ».

1986

AUDIT Antoine, Les Fédérations confédérée et unitaire des métaux : lieux d’émission d’analyses socio-économiques (1922-1935), Maîtrise [Antoine Prost, Jean-Louis Robert], Univ. Paris 1 CRHMSS, 1986, 2 vol., 346 p.

En 1921, une scission affecte l’ensemble du mouvement syndical français et par voie de conséquence, une de ses composantes les plus importantes et plus actives, le syndicalisme métallurgiste. Apparaissent alors deux Fédérations au discours et aux objectifs distincts, l’une liée à la CGT, l’autre à la CGTU. Ce mémoire examine, à partir de leurs rapports de congrès et de leurs journaux, la façon dont la Fédération unitaire et la Fédération confédérée des Métaux ont perçu et analysé les phénomènes économiques et sociaux de la France des années vingt et du début des années trente, en particulier la rationalisation et la crise qui ont contribué à bouleverser la physionomie de l’économie française.

Une question surtout a traversé ce mémoire, celle du lien entre analyse et pratique syndicale. Plus précisément, le problème a été de percevoir à travers le discours de ces deux Fédérations l’existence d’une relation entre les analyses qu’elles diffusent d’une part, et leurs tactique et stratégie d’autre part. Cette relation est à double sens. D’une part, l’analyse, par les connaissances, notamment économiques, qu’elle produit, peut contribuer à orienter voire modifier, la stratégie et la tactique des deux Fédérations. À l’inverse, l’adoption d’un certain type de tactique et de stratégie peut avoir des effets sur la façon dont est conduite l’analyse économique et sociale. C’est ce lien complexe que ce mémoire a tenté de dégager.

BRUN Marie-Charlotte, Gabin, ou l’émergence du mythe populaire (1935-1939), Maîtrise [Antoine Prost, Lucette Le Van-Lemesle], Univ. Paris 1 CRHMSS, 1986, 215 p.

Ce travail cherche à montrer, comment à travers un personnage de cinéma populaire et populiste, transparaissent les traits dominants d’une société — celle de 1935 à 1939 — et la trace des préoccupations des moments.

Le personnage de Gabin, étudié à travers neuf films, présente des caractéristiques communes. L’analyse fait ressortir leur unité : unité d’origine sociale, Gabin est le type même de l’homme du peuple, unité dans les relations qu’il entretient avec les autres, en amour ou en amitié ; unité enfin dans les traits de caractère traduits par ses actes, paroles et attitudes. Il s’agit d’un homme fort souvent violent, mais qui peut être doux, humble et possède une grande droiture morale.

Ce personnage a généré un mythe qui ne peut être dissocié des années trente. Car on retrouve dans les films un tableau de la société qui est loin d’être innocent et les personnages populaires transmettent le message bien particulier du Front populaire de 1936.

Mais entre 1935 et 1939, le ton des films, s’assombrit, comme si les affrontements sociaux, l’instabilité politique les tensions interna­tionales et l’imminence de la guerre qui trau­matise une partie de la population voire la conscience de chaque individu, ne pouvaient pas ne pas transparaître dans les films.

BUTAUD Emmanuelle, L’image de la femme et de la farnille dans la presse de gauche au moment du Front populaire, Maîtrise [Antoine Prost], Univ. Paris 1 CRHMSS, 1986, 177 p.

Ce mémoire appartient à l’histoire des mentalités et il se propose d’analyser les représentations données de la femme et de la famille au moment du Front populaire. Il a pour source l’un des vecteurs les plus habituels de l’opinion : la presse. Nous avons dépouillé 12 journaux, tant hebdomadaires que quotidiens, appartenant à la presse communiste, socialiste, radicale, syndicale et « catholique » et reflétant toutes les tendances de la gauche. Le Front populaire est une période qui a enregistré une réelle évolution des esprits dans le domaine des mœurs.

Pour la première fois, les femmes participaient directement à la vie politique — les ouvrières et les employées font la grève, trois femmes sont nommées sous-secrétaires d’État — et on a l’impression d’une maturation de leur conscience politique, malgré l’absence persistante du droit de vote. Mais elles continuent parallèlement à être représentées dans leurs fonctions domestiques de maîtresse de maison, de mère, d’épouse ou d’éducatrice. La reconnaissance à gauche du statut polyvalent de la femme est en effet un moyen de concevoir son émancipation.

Mais dans le contexte troublé de la fin de l’entre-deux-guerres, caractérisé par une forte dénatalité, la famille est un groupe particulièrement valorisé, des catholiques sociaux à la gauche communiste. Or, c’est la femme qui est en grande partie responsable de la vie de la famille dans la mesure où elle assume à la fois l’entretien de la maison, les relations avec son mari et l’éducation des enfants ; pour cette raison son image reste très traditionnelle.

DOUSSIN Jean-Marie, L’occupation et la Résistance à Villejuif (1939-1945), Maîtrise [Antoine Prost, Jacques Girault], Univ. Paris 1 CRHMSS, 1986, 179 p. + annexes

Ce mémoire est une monographie locale : Villejuif dans le nouveau contexte créé par la mise en place du gouvernement Pétain et l’occupation allemande. Deux mémoires de maîtrise ont déjà étudié cette municipalité à direction communiste depuis 1925, aussi apparaît-il intéressant d’étudier l’évolution de cette même cité de 27 450 habitants pendant les 5 années d’occupation, la gestion et les choix de la délégation spéciale nommée par le Préfet, après la déchéance des élus communistes le 21 janvier 1940.

La population de la ville a subi de plein fouet les conséquences de la pénurie, du travail obligatoire, alors que près d’un millier de Villejuifois sont restés prisonniers. Ces conditions ont déterminé un mécontentement de plus en plus massif, largement utilisé par les groupements de résistance locaux. Malgré la répression, la résistance locale d’influence communiste apparaît prédominante. À partir de revendications concrètes, dans le cadre d’une stratégie de rassemblement, les dirigeants locaux du parti communiste clandestin ont vite orienté leur effort en direction des femmes pour développer une résistance spécifiquement féminine.

Là réside l’originalité de la résistance villejuifoise, contre la délégation spéciale d’abord, et l’occupant allemand ensuite. La résistance impliquait le soutien actif de la population (notamment du personnel communal). Dès lors, la représentativité du PC au niveau du CLL, le nombre de ses victimes, annoncent le résultat des élections d’avril 1945. C’est bien le « parti des fusillés », et la personnalité de Louis Dolly (futur maire de la ville) qui furent plébiscités.

FOURQUET Laurent, CGT et CFDT en mai-juin 1968, Maîtrise [Antoine Prost, Danièle Tartakowsky], Univ. Paris 1 CRHMSS, 1986, 188 p.

Ce mémoire étudie la spécificité de l’action des deux appareils confédéraux, CGT et CFDT, en mai-juin 1968. C’est dire que l’on s’est intéressé avant tout — plus qu’aux positions des fédérations ou de la base syndicale — à l’attitude des « Sommets » des deux syndicats incarnés par leurs leaders et leurs plus hautes instances confédérales.

La première partie est consacrée à une chronologie détaillée de l’action de la CGT et de la CFDT : c’était le moyen de retrouver la spécificité évoquée plus haut en décrivant le fonctionnement des appareils confédéraux pendant les six semaines de la crise, et leur rapport avec les dirigeants des autres organisations impliquées dans les « Événements » : patronat, gouvernement, représentants des grands partis politiques, leaders de la contestation étudiante.

Cette approche chronologique, articulée autour des trois journées phares du 13 mai (grève générale), du 25 mai (Grenelle) et du 30 mai (second discours du Général de Gaulle), permet aussi de retrouver la trame d’événements dont on néglige souvent la complexité.

La seconde partie — affranchie de toute contrainte chronologique — cherche à approfondir certains problèmes qui ont été seulement évoqués auparavant : c’est le cas, en particulier, des prises de position politiques des deux centrales — qui sont fortement divergentes — et de leurs rapports non dénués d’ambiguïté avec la contestation étudiante, à la fois alliée et rivale.

Deux chapitres de cette seconde partie, consacrés à l’analyse des revendications avancées par les deux appareils confédéraux tout au long de la crise, mettent l’accent sur la permanence de ces revendications — surtout dans le cas de la CGT — ce qui peut conduire à s’interroger sur l’effet de rupture éventuel suscité par les événements de mai-juin 1968 dans l’histoire des deux syndicats.

Sources : principaux quotidiens et presse syndicale de mai-juin 1968.

GAUDICHEAU Huguette, L’action municipale à Malakoff des origines à la veille de la Première Guerre mondiale. Éléments de recherche de la deuxième moitié du XIXe siècle à 1911, Maîtrise [Antoine Prost, Jacques Girault], Univ. Paris 1 CRHMSS, 1986, 224 p. + annexes

Malakoff est une commune de la banlieue sud, détachée de Vanves en 1883 ; son premier conseil est élu en 1884. Cette même année est votée en avril la loi réorganisant les pouvoirs locaux, une des lois fondamentales de la Troisième République. 1884 pourtant, n’est l’année zéro, ni pour la loi ni pour la commune. La loi reprend pour l’essentiel en les coordonnant et en les prolongeant des règles mises au point antérieurement, en ce qui concerne l’action municipale. Pour la commune, le poids du sous-équipement urbain de la nouvelle agglomération, sa situation en écart géographique de Vanves ont produit une ségrégation à la fois sociale, politique et économique. Ces facteurs déterminent fortement son histoire politique et pèsent sur les gestions municipales.

Étudier l’action municipale à Malakoff c’est prendre la mesure des problèmes que les diverses gestions ont à affronter, et si possible, en éclairer les origines. Deux questions se posent alors : pourquoi la séparation d’avec Vanves et pourquoi ce vaste lotissement sous-équipé ? Question d’autant plus intéressante que l’histoire de l’habitat populaire en banlieue à cette époque est mal connue.

À partir de 1845, Chauvelot, homme d’affaires expérimenté déjà dans le lotissement, à Plaisance et à Vaugirard, remembre et démembre environ 15 ha. Dans la plaine de Vanves, Malakoff, alors baptisée « La Nouvelle Californie », prend naissance… Les années 1900 ponctuent la crise de la grande ville selon la conception haussmannienne : délaissement organisationnel de la banlieue, vision relationnelle de l’espace.

La municipalité Républicaine-radicale socialiste (1906-1914) innove-t-elle en matière de gestion de l’espace, ou adapte-t-elle en banlieue une optique néo-haussmannienne ? De quelles catégories sociales prend-elle en charge les problèmes ?

GISLER Manuel, Naissance du syndicalisme national guadeloupéen : 1970-1978, Maîtrise [Antoine Prost], Univ. Paris 1 CRHMSS, 1986, 324 p. + annexes

Dans les années 70, la Guadeloupe, colonie française des Antilles devenue département en 1946, est agitée par des mouvements sociaux, politiques et culturels d’une ampleur sans précédent. La classe des paysans pauvres et des ouvriers agricoles de la canne, jusqu’ici ignorée ou méprisée, secoue la quiétude de l’île par des actions de grève toujours plus puissantes (en 1971, 1973 et surtout 1975).

De quelle manière une poignée d’intellectuels révolutionnaires ont-ils pu s’établir en milieu paysan et redonner confiance aux travailleurs qui créent en décembre 1970 l’Union des Travailleurs Agricoles ? Comment à partir de simples revendications économiques, le nouveau syndicat remit fondamentalement en question la présence française en Guadeloupe ? Dans quelles conditions ce questionnement, auquel prit part une fraction importante de la population, aboutit à une revendication nationale ? Quelles furent les réactions de l’administration, des partis politiques, des syndicats traditionnels ?

Réancrage culturel, affirmation d’une identité, aspiration à la souveraineté nationale (ré) apparaissent, suscités par la confrontation brutale d’un peuple avec sa réalité, révélée par l’irruption sur la scène sociale puis politique des « agricoles », ces oubliés de l’histoire.

Ce mémoire qui repose sur 1 1 étude de la presse, l’interview de militants de l’UTA grâce auxquels de nombreux tracts ont été conservés, retrace l’évolution qui conduit de l’UTA à l’UPG (Union populaire pour la libération de la Guadeloupe) créée en 1978 et qui se présente comme l’héritière directe de cette prise de conscience syndicale : confédérale de Jouhaux et par le PCF. Cette conviction s’affirme particulièrement à propos de la guerre civile espagnole et de Munich.

Le pacifisme n’occupa pas à lui seul toutes les discussions du SNI de la Seine. En réalité, la politique de la section touche à toutes les grandes questions qui agitent la CGT : l’alternative entre Réforme et Révolution, l’unité syndicale et l’indépendance par rapport aux partis et aux gouvernements. En la matière, les discours généraux trouvent des prolongements pratiques dans l’actualité avec la réunification syndicale et la victoire du Front populaire. Des contradictions apparaissent rapidement entre théorie et pratique, particulièrement en ce qui concerne l’indépendance syndicale.

Les débats de la section ne sont pas réservés aux seuls militants, mais touchent un public qui s’élargit considérablement. C’est par milliers que les instituteurs adhèrent entre 1935 et 1938. Qui sont-ils ? Pourquoi adhèrent-ils ? Comment est structurée l’organisation ?

Le mémoire tente de trouver des réponses à ces questions ainsi qu’à celles posées par l’orientation de la section dans la presse syndicale et les entretiens de plusieurs militants de sensibilités différentes.

GIUSTI Stéphane, L’itinéraire politique de Pierre Mendès France de 1967 à 1969, Maîtrise [Antoine Prost, Danièle Tartakowsky], Univ. Paris 1 CRHMSS, 1986, 112 p. + annexes

Le parcours politique de Pierre Mendès France sous la Vème République se divise en trois périodes bien distinctes. La première, de 1958 à mars 1967, période de réflexion politique, voit P. Mendès France évincé de l’Assemblée Nationale après ses défaites de Louviers (1958) et d’Évreux (1962). La seconde, et la plus importante, de 1967 aux élections présidentielles de 1969, où P. Mendès France est l’un des principaux acteurs de l’histoire politique de notre pays. Enfin, de 1969 à sa mort, il se retire de la vie publique, sans pour autant faillir à son rôle, imposé, de mythe de l’idéal républicain.

La deuxième période, de 1967 à 1969, apparaît donc comme essentielle, en ce qui concerne la personne même de P. Mendès France d’une part, la gauche — non communiste — d’autre part.

L’engagement de Pierre Mendès France en 1967 est double : personnel, afin de présenter et de développer, en utilisant le succès de son retour politique, les réflexions des dix années précédentes ; politique, au service de la Gauche.

Les Événements de Mai 1968 cassent la dynamique enclenchée à Grenoble un an plus tôt, obligent P. Mendès France à prendre certaines positions, et à s’engager d’une manière irréversible dans un combat politique qui le concernait peut-être moins que ce que l’on a été tenté de croire. Pourtant, Mai 1968 ouvre une nouvelle ère dans l’histoire de la Gauche, une ère de crises internes, de débats, de renouveau. Ce sont les prémices du mouvement qui amène mai 1981, c’est aussi la fin de P. Mendès France comme homme public de premier plan.

GUFFENS Évelyne, L’utilisation du manuel en collège, Maîtrise [Antoine Prost], Univ. Paris 1 CRHMSS, 1986, 82 p. + annexes

Cette recherche sur l’utilisation du manuel en classe de collège s’est faite sur l’année scolaire 85-86. Elle a concerné 13 classes de 5e, d’établissements différents et 10 enseignants. Elle avait pour but d’appréhender l’utilisation globale du manuel chez les enseignants et les élèves et de préciser l’utilisation spécifique du manuel d’histoire.

Pour étoffer cette enquête qui a débuté dans des conditions difficiles (difficulté de trouver des classes, d’interroger les professeurs), nous avons utilisé des enquêtes réalisées sur le même thème par des équipes spécialisées et divers articles tirés de revues pédagogiques courantes qui n’émanaient pas forcément de spécialistes, mais au contraire d’enseignants rendant compte de leur expérience de tous les jours.

Malgré ses limites, cet essai de didactique de l’histoire autorise quelques conclusions qui mériteraient d’être confirmées par une enquête plus importante.

GROSJEAN Florence, Le personnel dirigeant de la Fédération des Travailleurs de la Métallurgie-CGT de 1944 à 1974, Maîtrise [Antoine Prost, Jean-Louis Robert], Univ. Paris 1 CRHMSS, 1986, 152 p.+ annexes

Afin de connaître les cadres moyens d’un syndicat (sujet peu ou pas abordé par les chercheurs), nous avons choisi d’étudier les personnes qui ont été élues aux congrès de la FTM-CGT. Nous avons procédé par enquête en envoyant un questionnaire à chaque personne dont nous avons obtenu les coordonnées par la CGT.

Ce questionnaire est divisé en 4 parties situation personnelle et familiale ; vie professionnelle ; activités syndicales ; appartenance politique, associative, religieuse, participation à la Deuxième Guerre mondiale. Les réponses ont été traitées par tris croisés et analyse factorielle des correspondances. Cette biographie collective, qui décrit les caractéristiques sociologiques des élus montre leur cohésion et leur homogénéité. Presque la moitié des nouveaux élus est renouvelée au congrès suivant. Ensuite, la stabilité se renforce et elle est particulièrement forte parmi les hauts responsables. D’autre part, des événements politiques ou syndicaux qui sont pour beaucoup à l’origine de l’engagement syndical, la formation syndicale suivie massivement ou l’appartenance des 3/4 des élus au PCF sont autant d’éléments qui renforcent cette mémoire collective.

Les responsabilités syndicales sont devenues pour 3/4, de ces élus, une activité salariée exercée de nombreuses années avec des changements de poste. Cette activité syndicale pourrait être l’explication de l’élévation du niveau social, particulièrement sensible, des grands-parents aux enfants : le nombre d’ouvriers est en baisse très importante et ceux qui le sont encore sont, en majorité, qualifiés.

KUNDE Kurt, Le SNI d’octobre 1935 à juin 1940 dans le département de la Seine, Maîtrise [Antoine Prost], Univ. Paris 1 CRHMSS, 1986, 218 p., index

La période qui s’étend d’octobre 1935 à l’armistice de juin 1940 est particulièrement mouvementée sur le plan politique et social. La CGT, réunifiée début 1936, est le théâtre d’affrontements entre « tendances » qui s’opposent de plus en plus violemment à l’approche de la guerre.

La section de la Seine du Syndicat National des Instituteurs est partie prenante des débats qui traversent la CGT Profondemment pacifistes, ses dirigeants animent l’opposition au « bellicisme » incarné, selon eux, par la majorité confédérale de Jouhaux et par le PCF. Cette conviction s’affirme particulièrement à propos de la guerre civile espagnole et de Munich.

Le pacifisme n’occupa pas à lui seul toutes les discussions du SNI de la Seine. En réalité, la politique de la section touche à toutes les grandes questions qui agitent la CGT : l’alternative entre Réforme et Révolution, l’unité syndicale et l’indépendance par rapport aux partis et aux gouvernements. En la matière, les discours généraux trouvent des prolongements pratiques dans l’actualité avec la réunification syndicale et la victoire du Front populaire. Des contradictions apparaissent rapidement entre théorie et pratique, particulièrement en ce qui concerne l’indépendance syndicale.

Les débats de la section ne sont pas réservés aux seuls militants, mais touchent un public qui s’élargit considérablement. C’est par milliers que les instituteurs adhèrent entre 1935 et 1938. Qui sont-ils ? Pourquoi adhèrent-ils ? Comment est structurée l’organisation ?

Le mémoire tente de trouver des réponses à ces questions ainsi qu’à celles posées par l’orientation de la section dans la presse syndicale et les entretiens de plusieurs militants de sensibilités différentes.

MARRAST Anne, Mémoires des grèves de 36 dans les grands magasins, Maîtrise [Antoine Prost, Lucette Le Van-Lemesle], Univ. Paris 1 CRHMSS, 1986, 114 p. + annexes

Les grands magasins entrent en grève le 6 juin 1936 ; la quasi-totalité du personnel, en majorité des femmes, s’y associe. Ces grèves des grands magasins ont particulièrement frappé l’opinion, essentiellement du fait de la participation massive de femmes au mouvement, et, qui plus est, de femmes dont les grèves révélaient le contraste poignant entre leur élégance obligatoire et leur condition précaire d’employées de grands magasins.

Dans la presse de l’époque, ces femmes apparaissent comme des héroïnes qui combattent vaillamment auprès de leurs collègues masculins ou comme des victimes consentantes de la grève. Dans les deux cas, la différence des sexes était perçue de manière très rigide et l’on ne sait rien du vécu de ces femmes des grèves de 36. Ce sont pourtant les premières grèves auxquelles elles ont participé, ce qui pose la question d’un vécu féminin des grèves.

Le cinquantenaire du Front populaire rendait possible et particulièrement intéressant le recours aux sources orales. Nous avons donc recueilli les témoignages de 23 vendeuses de grands magasins, aujourd’hui retraitées qui ont participé aux grèves de 36. Ces témoignages, source de notre étude, sont précieux à plusieurs titres : regard sur le passé, ils permettent d’envisager un vécu (des vécus) féminin(s) des grèves, une expérience qu’on a longtemps confondue avec celle des hommes ; regard sur le temps, il s’agit de la mémoire d’une époque telle qu’elle est dite par les actrices elles-mêmes, avec les mécanismes de sélection, de reconstruction, le rapport étroit du présent au passé.

MASSA Patrick, La mémoire historique de la presse ouvrière à l’époque du Front populaire, Maîtrise [Antoine Prost], Univ. Paris 1 CRHMSS, 1986, 218 p.

Ce travail a pour objet la mémoire historique construite par les organisations ouvrières dans la conjoncture très particulière du Front populaire qui voit une réactivation des traditions républicaines. C’est pourquoi il est centré sur les rapports existants alors entre la mémoire républicaine et la mémoire ouvrière.

La mémoire unie et divise. Ainsi, le souvenir des grandes grèves, des 1er mai célèbres, de la Commune, oppose le mouvement ouvrier dans son ensemble à l’ennemi de classe. Mais chaque tendance vénère ses propres pères fondateurs et les polémiques présentes se nourrissent des anciennes querelles (les scissions, la charte d’Amiens). De plus, quand un homme fait l’unanimité (Jaurès) chacun prétend être le meilleur héritier de sa pensée. Manifestement, les partisans du Front populaire croient revivre 1789. Ils s’identifient au Tiers-Etat et aux Jacobins, tout en assimilant la bourgeoisie de 1936 à la noblesse coblentzarde. Mais, certaines réticences de Syndicats contrastent avec l’ardeur du PCF à célébrer le culte de la Grande Révolution.

Cette opposition se retrouve clairement dans le domaine culturel, le PCF étant le plus favorable à la culture humaniste et rationaliste, fondement du républicanisme, alors que les amis de Belin font preuve d’un certain ouvriérisme.

Au-delà de ces questions et de la difficulté à concilier les idéaux socialistes et républicains, cette étude tente de mettre en évidence les aspects partisans de toute gestion de la mémoire, et certaines particularités du discours commémoratif.

Sources : Le Populaire, L’Humanité, Le Peuple, Syndicats, La Vie Ouvrière.

MELKA Joël, Naissance et développement d’un syndicat de l’enseignement technique : le Syndicat National de L’Enseignement Technique – Apprentissage Autonome, Maîtrise [Antoine Prost, Jacques Girault], Univ. Paris 1 CRHMSS, 1986, 177 p.

La crise syndicale de 1947-1948 provoque la scission du monde syndical français. Les enseignants militaient au sein de la Fédération de l’Éducation Nationale adhérant à la CGT Comme le reste du monde ouvrier, ils doivent choisir entre leur maintien à la CGT et leur adhésion à la CGT-FO. Mais très rapidement une troisième alternative se propose à eux et ils se prononcent en, majorité, au travers de leurs syndicats nationaux, pour l’unité au tour de la FEN-Autonome.

Dans les Centres d’Apprentissage, la situation est différente. La direction cégétiste du SNET-Formation Professionnelle affirme traduire la volonté des militants en confirmant son adhésion à la CGT Cette situation entraîne la scission du syndicat et crée une concurrence syndicale que les autres syndicats de l’enseignement ne connaissent pas. Même si le Syndicat National de l’Enseignement Technique — Apprentissage — Autonome (SNET-AA) ne naît pas dès la scission de 1947-1948, comme son concurrent SNET-FO, il en est tout de même le fruit.

L’étude retrace, à travers la presse syndicale, les conditions de la naissance du SNET-AA et ses premières difficultés vis-à-vis des autres syndicats de Centres d’Apprentissage, comme de la FEN-Autonome. Elle analyse ensuite, le développement du SNET-AA et son comportement face aux politiques scolaires durant la décennie 1949-1959.

MOINARD Alain, Les photographies des événements de Mai 68 dans la presse régionale quotidienne, Maîtrise [Antoine Prost, Danièle Tartakowsky], Univ. Paris 1 CRHMSS, 1986, 103 p.

La presse régionale possède un public particulier, qui lui est très fidèle. De ce fait elle joue un rôle très important dont il est rarement question. Ce mémoire se penche, à travers vingt-deux quotidiens régionaux, sur les photos des événements de Mai 68 qui y furent publiées pendant les mois de mai et juin (soit deux mille clichés environ).

Le corpus regroupe un pourcentage important de l’ensemble des tirages de l’époque (pratiquement tous les quotidiens diffusés à plus de 100 000 exemplaires) et couvre l’ensemble du territoire français métropolitain.

L’étude des rapports entre les journaux et les photos d’actualité (régionale, parisienne et étrangère) est faite au travers de grandes parties (gros tirages, petits tirages, quotidiens illustrés). Mais très vite, cette première classification, qui tient compte des structures de la presse apparaît sans intérêt. Les rédactions firent des choix très différents et cette diversité est le trait marquant de l’étude. Une dernière partie présente quelques-uns des clichés les plus utilisés.

Les conclusions respectent une certaine réserve. La logique des options rédactionnelles n’est pas toujours évidente. Néanmoins, sont mis en évidence, entre autres, l’importance de la couverture des événements et, en particulier, de ceux de la capitale.

MORERE Hélène, La loi du 10 août 1927 sur la Nationalité, Maîtrise [Jacques Girault, Antoine Prost], Univ. Paris 1 CRHMSS, 1986, 201 p. + annexes

En 1926, les résultats du recensement annoncent que les étrangers représentent désormais plus de 6 % de la population française. La question de leur intégration se pose alors avec force. L’outil principal mis en place par le gouvernement pour réaliser l’assimilation de ces hommes sera le « Code de la nationalité » promulgué le 10 août 1927, qui facilitera à la fois la naturalisation des étrangers, mais aussi l’acquisition de la nationalité française à la naissance.

À travers les ouvrages et articles publiés dans les années 26-27 et la lecture des débats parlementaires sur le projet de loi, enthousiasmes et oppositions se dessinent. La plus grande partie des parlementaires et des observateurs ne sont pas hostiles au projet, arguant de la dénatalité française, mais de nombreuses mises en garde sont formulées et des arguments nationalistes surgissent souvent. Pourtant le texte voté en 1927 sera finalement le plus libéral que la France n’ait jamais connu en cette matière.

NAUDET Jean-François, La grève de mai-juin 1968 à la RATP, Maîtrise [Antoine Prost, Danièle Tartakowsky], Univ. Paris 1 CRHMSS, 1986, 2 vol., 486 p.

Ce travail a été réalisé essentiellement à partir de l’étude de tracts syndicaux et politiques (ces derniers étant moins nombreux), complétés par divers documents de la RATP permettant de rendre compte des problèmes spécifiques à l’entreprise telles l’organisation du travail, la gestion de la masse salariale, etc.

Quelques interviews ont aussi été réalisées, des dirigeants de l’époque, des syndicats, mais aussi de l’entreprise.

Les conclusions ont été les suivantes : – la grève — bien qu’insérée dans un mouvement général — a été fortement marquée par le caractère spécifique de ce milieu qu’est la Régie. – la nécessité finale d’un compromis a déterminé dès le début un certain type d’occupation de l’entreprise avec en particulier la volonté affichée par les syndicats de maintenir un statu quo (même fragile) avec la direction. – si les syndicats ont su parfaitement, au début, encadrer, voire provoquer une très relative « spontaneité » ouvrière, la reprise a été beaucoup plus difficile. Selon l’auteur, Mai 68 a été un échec dans l’immédiat, mais aussi à moyen terme, d’où quelques commentaires sur des problèmes qui se sont posés au cours des années 1970.

VIDAL Jean-Marc, Les petits commerçants et les artisans à Nevers 1900-1940, Maîtrise [Antoine Prost, Lucette Le Van-Lemesle], Univ. Paris 1 CRHMSS, 1986, 162 p. + annexes

Ce travail a pour point de départ une double constatation :

– rien n’est plus ambigu, difficile à cerner, que cette association pourtant si courante : « artisans – petits commerçants ». Au début du siècle, d’ailleurs, entre l’atelier et la boutique, le problème ne se posait même pas. Il n’existait pas de nomenclature officielle comme aujourd’hui pour établir une distinction pas toujours très claire. Quelle est donc, dans ce cadre si flou, la frontière entre une unité qui doit bien exister et une diversité si flagrante ?

– on associe communément artisans et petits commerçants à ce marais social que l’on appelle « classes moyennes », et eux-mêmes sont les premiers à revendiquer cet attachement. Mais quels sont les vrais critères d’appartenance à ce groupe social, jamais clairement définis tant il est vrai que le trajet, les aspirations des « petits », pourtant si chers à la société française (petits artisans, petits commerçants, petits rentiers, petits patrons…), ne sont guère faciles à suivre ?

Pour essayer de répondre à ces deux questions nous avons choisi une période : 1900-1940, époque charnière entre les conceptions traditionnelles héritées du XIXe siècle et le début de formes nouvelles, prémices de l’après-guerre (sociétés à succursales multiples, grands magasins…), et surtout un lieu : Nevers, ville moyenne de tradition commerciale.

L’analyse systématique des Annuaires locaux permet notamment de retracer la composition de ce groupe, son évolution, son implantation dans l’espace urbain et ses relations avec les autres groupes sociaux. Elle souligne l’importance de la polyactivité.

VINCENT Catherine, Les Trains de plaisir du Front populaire, Maîtrise [Antoine Prost, Lucette Le Van-Lemesle], Univ. Paris 1 CRHMSS, 1986, 240 p. + annexes

L’été 1936 est pour beaucoup des Français, celui des premières vacances. Le cinéma, la télévision, les romans, les livres d’histoire et, plus encore la mémoire collective de notre pays perpétuent cette image. Il semble cependant important d’essayer de mieux apprécier l’ampleur du changement qui découle du vote, le 20 juin 1936, de la loi instituant un congé payé annuel pour tous.

À cet effet, le train semble particulièrement intéressant à étudier. Il est le seul qui permette de se faire une idée de l’importance numérique des vacanciers, puisque les billets vendus et les voyageurs transportés sont des réalités mesurables. Qui plus est, il semble répondre aux besoins, envies et possibilités financières des nouveaux vacanciers. Enfin, il est au cœur d’une vaste politique menée par le premier Sous-secrétaire aux Sports et aux Loisirs, Léo Lagrange.

Appuyée principalement sur les différents documents émanant des six grandes compagnies ferroviaires privées (annuaires Chaix, rapports d’activités, revues), cette étude permet de dégager : – la mise en place d’une entreprise de séduction et de sensibilisation des directeurs des compagnies dirigée vers les bénéficiaires de la loi du 20 juin. – l’apparition d’un nouveau vacancier, dont les motivations, les aspirations, le mode de congé diffèrent de ceux des estivants d’avant 1936. – l’émergence d’une perception du temps de loisirs.

1985

ALTMAN Patrick, Les conséquences de la crise économique des années 30 sur la population juive immigrée de Paris, Maîtrise [Antoine Prost, Bruno Groppo], Univ. Paris 1 CRHMSS, 1985, 130 p.

La population juive de Paris augmente considérablement dans les années encadrant 1930. Ces immigrés de culture yiddish et d’origine polonaise pour la plupart vont connaître les difficultés inhérentes à tout étranger arrivant dans une France qui élabore une législation anti-étrangers depuis 1926 (de nombreux immigrés sont clandestins), cumulées aux problèmes liés à la crise économique qui atteint profondément la France à partir de 1932 (baisse des prix et chômage massif).

Ce contexte va favoriser la multiplication d’ateliers dans les métiers que l’on appellera juifs (tous les métiers concernant l’habillement), et permettre aux fabriquants de disposer d’une main-d’œuvre abondante prête à travailler pour n’importe quel prix.

On assiste, dans la crise, à une plus grande diffusion de l’article de confection ou de tricot sans amélioration notoire du niveau de vie des ouvriers juifs.

Si le fabricant, le façonnier, ou l’ouvrier sont juifs, cela n’empêche pas l’éclatement de grèves très dures. La victoire du Front populaire fera naître de grands espoirs comme l’attestent quelques journaux syndicaux en yiddish. La période voit simultanément d’une montée de l’intérêt que les immigrés portent au mouvement communiste sans pour autant le capter totalement.

AUDRAIN Catherine, MORINEAU Laurent, Les ouvriers du livre dans le conflit du Parisien libéré, Maîtrise [Danièle Tartakowsky, Antoine Prost], Univ. Paris 1 CRHMSS, 1985

Ce sujet est à la fois un sujet classique, puisqu’il s’agit du récit d’une grève et un sujet extrêmement contemporain puisqu’il porte sur la période 1975-1977. Nous avons voulu à la fois analyser une des premières grèves françaises de la période récente née des problèmes de modernisation des matériels en période de crise et aussi décrire un groupe socio­professionel qui allie un fort degré de structuration et une attitude particulièrement résolue durant ce conflit.

Cette étude retrace une grève longue de 29 mois du mois de mars 1975 au mois de juillet 1977. Nous avons voulu étudier, dans la première partie, les principales caractéristiques des acteurs de ce conflit. Nous avons accordé une large place à l’étude des ouvriers du livre, un groupe socioprofessionnel spécifique, en 1975. Dans la seconde partie, nous avons en retraçant les grandes étapes du début de ce conflit, analysé quelques-unes des formes originales de la lutte revendicative des ouvriers du livre de la presse parisienne.

Le conflit du Parisien Libéré n’est pas seulement un conflit humain, il faut lui ajouter des caractéristiques juridiques, syndicales et politiques sur lesquelles se greffent les négociations et l’issue de l’affaire. La seconde partie du mémoire s’efforce de mettre en évidence des aspects moins connus du conflit.

Ainsi, les aspects juridiques permettent, en en rappelant le droit des ouvriers et celui de leur patron, d’étudier les deux partenaires face à la justice et de dégager quelles ont été les différentes procédures engagées pour mener à bien les négociations dans l’entreprise.

Le conflit ayant largement dépassé le cadre de l’entreprise, les répercussions ont été nombreuses dans les milieux syndicaux et politiques. Dans un premier temps sont étudiées les revendications syndicales, les actions les appuyant et les divergences nées à leur propos. Le second temps de ce chapitre traite des problèmes politiques en indiquant les positions des différentes forces en présence et l’attitude du gouvernement en place à ce sujet.

La dernière partie indique quelle est l’issue de ces vingt-neuf mois de lutte. Est-ce une victoire et pour qui ? Quelles sont les répercussions d’un tel conflit ? au niveau syndical ? dans la presse ? que deviennent les ouvriers du Parisien ?

Autant de questions auxquelles nous nous sommes efforcés de répondre grâce aux témoignages et aux articles dont nous disposions.

L’intérêt d’un tel mémoire porte sur l’étude d’un phénomène social ultra contemporain, ce qui n’est pas allé sans créer certains problèmes.

BINOCHE Patrice, Le débat syndical sur la politique d’immigration en France au début des années 30, Maîtrise [Bruno Groppo, Antoine Prost], Univ. Paris 1 CRHMSS, 1985, 241 p.

La crise économique que connut la France au début des années 30 fit de l’immigration une question de première importance. Entre la présence des travailleurs étrangers et l’existence de chômeurs français une relation de cause à effet fut rapidement établie.

CGT et CGTU, les deux organisations syndicales qui ont principalement retenu notre attention au cours de cette étude, développèrent des thèses différentes face à cette situation. La CGT, de tendance réformiste, se prononça pour un contrôle tripartite de l’immigration (gouvernemental, patronal et ouvrier), tant aux frontières que sur le territoire français. La CGTU, de tendance communiste, revendi­qua un contrôle strictement ouvrier.

Cette opposition fondamentale, qui s’inscrit dans le climat général du débat syndical, empêcha toute action commune pour des revendications pourtant parfois partagées (salaires égaux à ceux des Français, même protection sociale…).

Bien plus que par la crise, le débat syndical sur la politique d’immigration en France au début des années 30 fut marqué par l’opposition entre les deux principales organisations. La réunification modifia davantage leurs attitudes que ne l’avait fait quelques années plutôt l’apparition de la crise. Les travailleurs étrangers, comme l’ensemble du prolétariat de France, furent les victimes de cette division.

BLAVIER Yves, La critique de cinéma dans l’entre-deux-guerres : Léon Moussinac (1923-1933), Maîtrise [Antoine Prost, Danièle Tartakowsky], Univ. Paris 1 CRHMSS, 1985

Ce travail est centré sur le critique de cinéma communiste Léon Moussinac (1890-1964). Il s’appuie essentiellement sur des sources littéraires, c’est-à-dire sur toutes les chroniques parues dans l’Humanité de 1923 à 1933, sur d’autres périodiques et sur des archives privées (correspondance, manuscrits…).

Le mémoire replace d’abord Moussinac dans le contexte de la critique de cinéma d’alors. On découvre un militant très actif dans le domaine culturel et parfaitement inséré dans les milieux intellectuels.

Le procès de Moussinac intenté en 1926 par une firme de cinéma révèle une large solidarité contre les pressions publicitaires. L’idéologie est cependant présente dans ses écrits. On s’aperçoit du poids de Moussinac dans les débats sur le cinéma d’autant que le PC (comme le reste de la gauche) y consacre peu de place dans les années vingt. Moussinac oppose deux formes de cinéma, antagonistes celui du monde capitaliste qui n’est qu’une industrie mercantile et moribonde et d’autre part le cinéma soviétique en développement. De même, il propose une théorie de cinéma, synthèse entre sa formation artistique inspirée de Louis Delluc et les exigences d’un art engagé. L’équilibre ne se fait pas toujours aisément d’ailleurs. Enfin Moussinac unit critique et action militante. En étudiant sa rubrique de cinéma, on découvre ainsi des détails sur plusieurs structures auxquelles il prit part (ciné-clubs, coopératives).

La critique de Moussinac nous offre un panorama de l’activité communiste dans le cinéma et présente aussi l’avant garde cinématographique d’alors. Quoi d’étonnant puisque le critique unissait les deux ?

BONZON Thierry, Cent quatre-vingt dix lettres de pacifistes (juin 1916-octobre 1916) : étude d’une population et d’un discours pacifiste au travers d’une correspondance adressée au député Brizon, Maîtrise [Antoine Prost, Jean-Louis Robert], Univ. Paris 1 CRHMSS, 1985

24 juin 1916 : Après Karl Liebknecht en Allemag­ne, trois députés français votent contre les crédits de guerre. À l’issue de ce vote, l’un d’eux — leur porte-­parole, le socialiste minoritaire Pierre Brizon, député de la deuxième circonscription de Moulins — reçoit près de deux cents lettres d’approbation. Celles-ci constituent le fonds sur lequel nous avons travaillé.

L’étude entreprise prend pour objet tout à la fois une population pacifiste, le discours de ses membres et la façon dont ils se représentent et se situent à l’intérieur de la société en guerre de 1916.

Si le sentiment de former une population importante voire majoritaire au sein de la société est partagé par l’ensemble des correspondants, on peut mesurer les difficultés qui se présentent à la construction d’un mouvement pacifiste. Elles sont réelles et constituent un obstacle à l’émergence d’un « nous » collectif qui ne soit pas qu’une simple gestuelle verbale, mais traduise la conscience qu’ont les correspondants former, plus qu’une simple collectif d’individus, un groupe conscient, voire un véritable mouvement.

À cet égard, le rejet de toute action pacifiste sur la personne de Brizon d’une part et dans l’avant­-guerre d’autre part témoigne d’une sorte d’impossibilité pour les correspondants à concevoir l’émergence d’un mouvement pacifiste agissant et autonome qui puisse dépasser le périmètre étroit d’un cercle militant. Sur le fond, on voit mal comment les pacifistes pourraient surmonter cet interdit tacite — que beaucoup font leur — touchant l’entreprise de défense nationale ainsi que le caractère mêlé de la population pacifiste dont le discours lui-même témoigne.

BURGER Anny, La politique municipale de Villejuif (1925 – 1934), Maître [Antoine Prost, Danièle Tartakowsky], Univ. Paris 1 CRHMSS, 1985, 145 p.

La ville de Villejuif, devenue depuis 1925 municipalité communiste, se donne en 1929 pour maire une personnalité communiste hors du commun : Paul Vaillant Couturier.

Ce mémoire de maîtrise étudie les tenants du ; pouvoir municipal ces quatorze années durant, leurs intentions, leurs pratiques, et leurs moyens et dégage les évolutions majeures de la politique municipale communiste.

Cette politique tente d’abord de parer au plus pressé et concentre ses efforts sur la mise en viabilité des lotissements et la construction d’un premier groupe scolaire indispensable dans le bas-Villejuif en 1930. Elle acquiert, sous l’impulsion de Paul Vaillant Couturier et du fait de la crise économique une dimension nouvelle que révèle une étude approfondie des budgets municipaux. S’inscrivant désormais dans un projet global, elle privilégie avant toute chose les besoins de l’enfance et de la jeunesse et, pour mieux préparer la génération qui fera « les lendemains qui chantent », prend en charge le quotidien dans tous ses aspects (santé, instruction, loisirs et vacances).

Elle devient aussi un puissant facteur de l’hégémonie communiste sur Villejuif.

Les responsabilités nationales de Paul Vailant Couturier répondent en partie du caractère exemplaire de la gestion communiste villejuifoise. Une gestion qui ne se veut pas modèle, mais plutôt la « matérialisation de l’utopie ».

CHAGNON Louis, Les fédérations des métaux CGT et CGTU de 1922 à 1935 : organisation et militants, [Antoine Prost, Jean-Louis Robert], Univ. Paris 1 CRHMSS, 1985, 152 p. + 107 p. d’annexes

Ce mémoire est divisé en cinq chapitres et un épilogue.

Le premier chapitre présente les « structures et fonctionnement des Fédérations ».    Le second chapitre est consacré aux « militants, effectifs et implanta­tion géographique » ; il ne faut pas y trouver un dé­veloppement exhaustif sur ces problèmes, mais des traits généraux, au demeurant indispensables à une bonne appréhension des Fédérations. On remarquera les huit cartes illustrant l’implantation géographique.

Les trois chapitres suivants sont découpés en périodes chronologiques déterminées par les ruptures relevées dans l’histoire de la Fédération unitaire. Le troisième chapitre 1922-24, aborde les problèmes consécutifs à la scission, ainsi que les tendances au sein des Métaux unitaires. Le quatrième chapitre 1925-28, explique le comportement des Métaux confédérés face au problème de l’unité posé par les Unitaires. Il aborde la naissance d’une seconde Fédération unitaire. Le cinquième chapitre : 1929-33, analyse d’une part de la réaction des Confédérés face à l’affaiblissement des Unitaires, d’autre part de la deuxième bolchévisation et les problèmes d’organisation de la Fédération unitaire.

L’épilogue 1934-35, intitulé « vers l’unité », comporte une approche des conséquences du 6 février 1934.

EBEL Frédéric, Les scouts de France de 1929 à 1939. Évolution et histoire interne [Antoine Prost], Univ. Paris 1 CRHMSS, 1985, 149 p.

Ce travail n’a pas pour but de montrer comment le scoutisme s’insère dans le courant général de retour à la nature et de développement de sociétés de gymnastique et autres associations d’éducation physique. Pas plus qu’il ne cherche à le situer parmi la jeunesse catholique des années trente.

Notre démarche est inverse. Elle est de voir dans quelle mesure le scoutisme est un mouvement tout à fait original par ses méthodes et par le mode de vie et de pensée qu’il propose.

D’autre part, nous voulions comprendre le paradoxe qui existe entre le fait que le scoutisme ait été un précurseur dans de nombreux domaines (campisme, pédagogie de l’adolescent, par exemple), et qu’il soit passé à la postérité comme un mouvement socialement conservateur et placé dans les rangs de la droite militariste.

Le choix précis des Scouts de France, outre les motivations personnelles, tient dans le fait qu’il s’agit de la seule association française qui ait eu une large audience.

Il nous a semblé, au cours du travail, qu’il est de fait sans grand intérêt de juger les scouts d’après les réactions sociales admises, qu’elles soient de notre époque ou de l’époque d’étude. En effet, le scoutisme n’ayant pas de visées sociales, toutes ses prises de position dans ce domaine ne sont pas différentes de celles du corps social dont est issue la majorité des membres.

Par contre, il est plus instructif de saisir les spécificités scoutistes, quand elles existent, et de mettre en rapport les positions des scouts avec les valeurs et les thèmes qui sont ceux du scoutisme.

GRANGER Stéphane, Le concours international de la maison individuelle, Maîtrise [Antoine Prost], Univ. Paris 1 CRHMSS, 1985, 171 p.

L’objet de ce mémoire est — à travers la presse spécialisée, les études sociologiques effectuées pour le Ministère de l’Équipement et les enquêtes sur le terrain — d’étudier le Concours International de la Maison Individuelle, lancé le 31 mars 1969 par M. Albin CHALANDON, alors ministre de l’Équipement et du Logement, pour rendre accessible à toute la propriété d’une maison individuelle et promouvoir un nouveau type de constructeurs.

Après une étude des conceptions d’Albin CHALANDON en matière – d’urbanisme, puis du lancement du concours lui-même, ses modalités et ses résultats, sont analysées localisations et conditions de réalisation des ensembles de logements, ainsi que leur architecture et les expériences d’innovation. Ensuite est dressée une typologie des acquéreurs qui montre que malgré une forte proportion d’ouvriers (presque la moitié), les « chalandonnettes » ont touché une clientèle un peu plus aisée que prévu à cause des augmentations de prix.

Les différents problèmes survenus dans la construction et le fonctionnement des lotissements sont également étudiés, et il s’avère que les conditions très strictes du CIMI ainsi que l’emploi de nouveaux matériaux et procédés de fabrication sont responsables des nombreuses malfaçons et absences d’équipements subies par les habitants.

Le bilan enfin montre, outre une relative satis­faction des acquéreurs l’un objectif social malgré tout pratiquement atteint et de très intéressantes expériences architecturales, mais si l’essor de la construction de maisons individuelles en France a effectivement démarré avec le CIMI, il ne s’est toutefois pas produit dans les proportions souhaitées à cause de la méfiance des promoteurs-constructeurs.

GRANJON Philippe, Les Nationalisations dans la presse hebdomadaire des confédérations ouvrières (1965-avril 1981), Maîtrise [Antoine Prost], Univ. Paris 1 CRHMSS, 1985

Ce mémoire de maîtrise rend compte des résultats obtenus grâce à l’analyse systématique de tous les articles consacrés aux nationalisations parus dans les hebdomadaires des confédérations ouvrières entre le 1er janvier 1965 (au lendemain de la scission de la CFTC) et le 30 avril 1981 (à la veille de la victoire de la gauche). Il s’agit de « La Vie Ouvrière » (CGT), de « Syndicalisme Hebdo » (CFDT) et de « Force Ouvrière Hebdo » (FO). Seul « Syndicalisme CFTC » est un mensuel, la CFTC n’éditant plus d’hebdomadaire depuis la scission de novembre 1964.

L’analyse par thème des articles sélectionnés a montré l’existence d’une relative convergence d’opinion entre les organisations syndicales dans la dénonciation du rôle donné aux entreprises déjà nationalisées.

Mais de réelles divergences sont apparues en ce qui concerne les nationalisations à venir, entre les confédérations réservées, voire méfiantes, par rapport à cette question (la CFTC, FO et la CFDT jusqu’en 1976) et celles qui en font leur principale revendication (la CGT et CFDT à partir de 1977). Dans cette partie, il a été mis en évidence que la réflexion des organisations ouvrières s’articulait autour de trois dates clefs où un grand nombre d’articles ont été publiés en 1965 (scission de la CFTC et naissance de la CFDT), 1972 (signature du Programme Commun) et 1977 (remise en cause du Programme Commun).

GUERBER Eric, Les Fédérations des Metaux, lieux d’émission d’analyses socio-économiques (1914-1982), Maîtrise [Antoine Prost, Jean-Louis Robert], Univ. Paris 1 CRHMSS, 1985, 206 p.

Les Fédérations des Métaux offrent la double particularité d’appartenir dès l’origine à la tendance syndicaliste-révolutionnaire de la CGT et de jouer, au sein de la Confédération, un rôle grandissant lui insufflant notamment une pensée moderne, résolument tournée, à partir des années 1905, vers l’analyse socio-économique.

Le présent travail s’attache à répondre aux deux questions suivantes :

a) Par quel processus le syndicalisme-révolutionnaire d’Action directe est-il passé, en quelques années, de l’espérance concrète d’une transformation radicale de la société à la patiente étude des réalités socio-économiques qui considère l’acquisition de la connaissance des mécanismes de l’économie capitaliste comme une nécessité pratique et stratégique.

b) Comment les délégués et les dirigeants fédéraux ont-ils ajusté leur stratégie et leur tactique à la connaissance nouvelle du milieu économique.

Les recherches, guidées essentiellement par l’étude des Compte rendus de congrès fédéraux, mettent en évidence les cinq points suivants :

1/De 1892 à la fin du siècle, c’est-à-dire lors de la phase de formation des fédérations, le travail d’analyse n’est pas une tâche réellement spécifique.

2/Au tournant du siècle, tandis que l’idée de révolution sociale est à l’ordre du jour, prédomine chez les militants une vision utopique de la société qui présuppose la possibilité de s’affranchir radicalement des réalités économiques et sociales inhérentes au système capitaliste.

3/Dans les années 1904-1905 naît, sous l’impulsion essentielle d’Alphonse MERRHEIM, une nouvelle forme d’analyse qui s’attache à décrire l’ordre réel, saisi dans son aspect économique.

4/Orientée non plus uniquement vers le monde ouvrier, cette nouvelle analyse expose avec précision les mouvements les plus récents de l’économie capitaliste et souligne l’engagement du patronat français dans un processus de consolidation, d’organisation et de concentration.

5/La connaissance plus complète du rapport des forces en présence acquise par cette voie a influé sur l’élaboration de la stratégie fédérale, et ce, particulièrement dans la période de crise traversée par le syndicalisme révolutionnaire dans les années 1911-1914.

GUEYDAN Geneviève, Les idées économiques de la Révolution prolétarienne, rêve syndicaliste-révolutionnaire 1925-1939, Maîtrise [Antoine Prost, Jean-Louis Robert], Univ. Paris 1 CRHMSS, 1985, 220 p.

La R.P. dont les principaux animateurs furent Monatte, M. Chambelland et Robert Lauzon s’opposait au réformisme comme au communisme orthodoxe et servit d’organe à la Ligue Syndicaliste qui rassemblait des minoritaires de la CGT et de la CGTU.

Cette riche revue développa grâce à Robert Lauzon une analyse économique à la forme claire et rigoureuse, et aux thèmes varies. Au temps de la Prospérité, la R.P. expose les mécanismes et les avantages de l’inflation elle étudie aussi à travers la double problématique de l’impérialisme et de la rationalisation les mutations structurelles du capitalisme et leur portée pour le mouvement ouvrier. À partir de 1929, la R.P. s’interroge sur les causes de la crise. L’étude des formes et du sens de l’intervention économique de l’État débouche sur une critique du capitalisme d’État bourgeois et soviétique. Elle se prolonge dans l’analyse du plan de la CGT que la R.P. critique comme solution économique et comme stratégie politico-syndicale et auquel elle oppose des contre-projets. À partir de 1936 l’analyse économique intervient seulement comme appoint dans l’étude du Front populaire, de la guerre d’Espagne et de la marche à la guerre. Conformément à une démarche marxiste ces problèmes économiques sont traités dans leur dimension socio-politique tandis qu’ils sont restitués par rapport aux positions des confédérations en raison de la nature syndicale et minoritaire de la R.P.

LE COUR GRANDMAISON Olivier, Le mouvement de la paix pendant la guerre froide (1948-1952). Le cas français, Maîtrise [Antoine Prost, Danièle Tartakowsky], Univ. Paris 1 CRHMSS, 1985

De ces années de guerre froide et pour ce qui est du Mouvement de la paix, n’émerge plus que l’Appel de Stockholm pour l’interdiction des armes atomiques. Pourtant, il ne fut qu’un moment dans l’histoire de celui-ci.

Restituer et comprendre, au-delà de cet appel d’où venait en France la   structure qui l’avait porté, qu’elles furent ses initiatives avant et après tel est l’objet de cette étude. Ceci supposait d’étudie d’abord les origines particulières des Combattants de la paix de ce pays et leur évolution. Nés d’une association d’anciens résistants regroupés pour défen­dre les idéaux qui étaient les leurs pendant le combat pour la Libération, sa vocation initiale était d’agir sur l’ensemble du champ politique dans lequel elle évoluait la paix n’étant qu’un élément marginal. La guerre froide, l’influence du Parti Communiste allaient la transformer en une structure luttant exclusivement sur cette seconde question. Dès lors, sa vocation et son histoire changent pour se confondre presque totalement avec celle des Partisans de la paix à l’échelle mondiale. On assistera alors à la lente émergence de la coexistence pacifique qui deviendra bientôt le thème structurant l’ensemble des activités du mouvement.

Comment s’est développé ce processus et quels ont été ses effets et ses conséquences sur le mouvement français, c’est ce que nous avons examiné ensuite.

Ainsi, c’est à travers l’étude de cet itinéraire qui s’étend sur une période de quatre ans et qui s’achève presqu’en même temps que se conclue la guerre froide qu’il est possible de comprendre la trajectoire particulière du mouvement, les campagnes qu’il a menées et la place qu’il a occupée pendant ces années de tensions internationales très importantes.

LE PRADO Daniel, Cinéma et histoire : l’image de la femme dans le monde ouvrier et populaire en France (1945-1958), Maîtrise [Antoine Prost], Univ. Paris 1 CRHMSS, 1985

Brosser la silhouette de la femme dans le monde ouvrier et populaire au sein de la société de la IVe République et cela par l’intermédiaire du cinéma de fiction tel était le but poursuivi par ce mémoire. Il fallait donc, à partir d’une réalité toute subjective, saisir un élément révélateur de l’ensemble d’un système de valeurs propre à cette période 1945-1958 et tâcher de débusquer dans les discours du milieu du cinéma ce que la société laissait, volontairement ou par inadvertance, transparaître d’elle-même. Dès lors avant d’aborder le sujet dans son essence, il s’avérait important de comprendre l’état d’esprit dans lequel s’était élaborée la production cinématographique et notamment les conséquences de la tutelle économique américaine concrétisées par les accords Blum-Byrnes cela en liaison avec l’établissement d’une république bourgeoise auquel correspondait la mise à l’écart par une quasi « chasse aux sorcières » d’un courant qui aurait pu être le néoréalisme français digne prolongement du courant ouvriériste généré par le Front populaire.

Cela dit, même si les circonstances politiques étaient peu favorables à l’élaboration d’une nouvelle image guide de la femme, affirmation qui bat en brèche les principes législatifs faussement prometteurs posés à la Libération en faveur du deuxième sexe, du moins à l’aide de quelques films, minoritaires au regard de l’ensemble de la production, nous avons pu reconstituer les lieux, les faits et gestes dans un triple cadre spatial, relationnel, professionnel, marqués pour la plupart des stigmates socioculturels d’un milieu du cinéma prisonnier de son autocensure et, de fait, rarement objectif à l’égard de la réalité ouvrière et populaire.

Après un découpage des films, une étude attentive des scénarios, mais également une compilation d’articles, de périodiques cinématographiques, d’ouvrages sociologiques, littéraires et historiques qui venaient étayer des sources cinématographiques par nature mouvantes et incomplètes, nous sommes parvenus à cerner le problème principal d’une société à contre-courant de l’évolution des mœurs qui s’avère malade de la famille, du couple et de la femme. Par un discours cinématographique négatif à l’égard du deuxième, la IVe République montre bien que celui-ci vit une phase de transition.

MARCHAND Marie-Pierre, Les ouvriers des métaux du XIXe arrondissement (1926-1936), Maîtrise [Antoine Prost, Jean-Louis Robert], Univ. Paris 1 CRHMSS, 1985, 180 p. + annexes

Ce sujet, qu’il faut replacer dans le cadre d’une enquête collective menée par le CRHMSS sur les ouvriers des Métaux français depuis la fin du XIXe siècle jusqu’à la veille de la Seconde Guerre mondiale, offre le principal intérêt de cerner très précisément un groupe de métallurgistes parisiens. En effet, à l’aide de renseignements tirés des livres de recensement d’un secteur du XIXe arrondissement, pour les années 1926 et 1936, ce mémoire s’attache à définir la condition professionnelle des ouvriers des Métaux, mais aussi leur environnement familial, leur origine géographique et leurs caractères démographiques.

L’analyse des caractéristiques propres à une population bien déterminée s’enrichit du rappel constant au contexte économique, social et démographique de la période de l’entre-deux-guerres. Cette confrontation est particulièrement intéressante dans le domaine de la structure professionnelle puisque ce groupe de métallurgistes, constitué d’une très forte majorité d’ouvriers qualifiés, semble assez peu concerné par les mutations qui traversent le secteur du travail des métaux (rationalisation des méthodes de production, éclatement des corps de métiers).

Mais au-delà de la mise en valeur de la cohérence professionnelle et sociale des ouvriers des Métaux du XIXe arrondissement, le mémoire s’attache à présenter toute la diversité des situations individuelles. Réunis par l’appartenance à un même secteur d’activité, les métallurgistes n’en sont pas moins très différents les uns des autres, en ce qui concerne l’âge, la situation familiale, l’origine géographique et le sexe.

C’est l’analyse de ces différences qui permet de nuancer les conclusions et de présenter un visage plus fidèle et plus vivant de cette population.

NEMECEK Karel, La vie politique, économique et sociale d’une commune de banlieue : Aulnay-sous-Bois, 1875-1935, Maîtrise [Antoine Prost, Jacques Girault], Univ. Paris 1 CRHMSS, 1985

En 1872, Aulnay-lès-Bondy était encore un petit bourg rural (de 727 habitants) entièrement centré sur l’activité agricole. L’ouverture d’une gare (en 1875) désenclava la commune et suscita le démarrage de sa croissance urbaine. Entamée dès 1883 par la création du quartier du Parc, cette croissance s’accéléra à partir de 1898 du fait d’une 1re vague de lotissements pavillonnaires ; une 2de vague — la plus importante — se développa au cours de la 1re décennie de l’entre-deux-guerres.         

La population de la commune passa de 1659 habitants en 1896 à 7141 en 1911 et à 31 426 en 1931, date à laquelle le mouvement de croissance s’interrompit. À cette époque Aulnay était devenue l’une des plus importantes communes de banlieue résidentielle de la région parisienne.

L’un des axes de cette étude réside dans l’analyse des transformations de la vie sociale de la commune qui accompagnèrent ces mutations : – bouleversement des structures sociologiques de la population, caractérisé par la croissance constante des couches salariées et en particulier des ouvriers ; – conflit jusqu’en 1914 entre les habitants du Vieux­Pays et habitants des quartiers neufs du sud de la commune ; – activité locale des diverses organisations politiques et mise en place de leurs structures communales d’action ; – problèmes créés par l’urbanisation anarchique, conditions de vie et action des mal-lotis des années 20 ; – expérience de Théâtre populaire menée à Aulnay par J. Princet entre 1906 et 1914 ; – mise en place d’un réseau d’association de sociabilité ou de loisirs.

L’autre axe de cette étude est constitué par l’analyse de la vie politique à partir de la recherche de ce qui dans ces diverses données peu nous fournir des éléments d’interprétation de l’évolution de l’électorat aulnaysien, laquelle aboutit en 1935 à l’élection d’une municipalité communiste.

PREVOST Marc, La suppression du poste de receveur dans les autobus parisiens, Maîtrise [Antoine Prost], Univ. Paris 1 CRHMSS, 1985, 172 p.

Étudier la suppression du poste de receveur c’est décrire la disparition d’un métier traditionnel, les effets de l’évolution de notre société à l’égard de la haute technologie aux dépens du savoir-faire et de la présence humaine ; ceci dans le cadre d’une entre­prise nationalisée, la RATP.

Imaginée dans les années 1920, la transformation du système d’exploitation traditionnel de l’autobus (un receveur, un machiniste) n’était pas facile à réaliser. Elle supposait un certain nombre d’innovations techniques et tarifaires pour limiter le temps perdu aux arrêts par la vente et le contrôle des titres de transport. Le coût de ces améliorations fut longtemps jugé excessif en comparaison des économies qu’il permettait de réaliser. Seules quelques voitures roulaient donc sans receveur (sans appareillage technique particulier) dans un but de rentabilité, sur des lignes déficitaires et de faibles trafics.

En 1967, cette conception allait être modifiée. De plus en plus, les usagers préféraient la voiture individuelle aux transports en commun, particulièrement aux autobus jugés inconfortables et lents. Le réseau routier connaissait donc une désaffection de sa clientèle. Dans le même temps, l’État révisait sa politique à, l’égard des entreprises nationales et décidait de modifier leur gestion pour les rendre plus productives. Cela se traduisit à la RATP par la volonté de rationaliser les systèmes d’exploitation et de réduire les dépenses de personnel.

Il faut intégrer la suppression des receveurs dans ce contexte. Ce fut à la Régie la première opération d’une telle envergure. Mettre en valeur les modalités de cette opération n’était donc pas sans intérêt possibilités de formation offertes au personnel, organisation des mutations, garanties proposées aux agents à reconvertir.

L’originalité de notre sujet tient en grande partie au fait que la RATP ne licencie pas. Il a donc semblé intéressant de s’interroger sur les différentes motivations qui pouvaient inciter une telle entreprise à supprimer une catégorie d’emplois et sur la manière de reclasser les titulaires de ces postes.

SOLLET Benoît, Habitat et famille des ouvriers de la métallurgie à Sèvres : 1896-1936, Maîtrise [Antoine Prost, Jean-Louis Robert], Univ. Paris 1 CRHMSS, 1985

À partir des renseignements contenus dans les listes nominatives de la ville de Sèvres, on a essayé de préciser l’évolution de l’habitat et de la famille des métallurgistes habitant cette ville de 1896 à 1936. Une étape préalable a été nécessaire pour cerner au mieux cette population. Elle a fait apparaître une indétermination des métiers due, d’une part, à l’imprécision des termes utilisés pour les désigner, et d’autre part, à l’évolution de la qualification ouvrière. On a également pu noter l’arrivée successive de nouveaux métiers. Ainsi les manœuvres apparaissent sur les recensements en 1911, les ouvriers et les sténodactylos en 1921, les O.S. en 1936.

Dans son ensemble, la population métallurgiste de Sevres ne cesse de rajeunir durant toute la période, ce qui contraste avec le vieillissement général de la population française constaté à partir de 1911. En fait, Sèvres s’inscrit dans le développement de la région parisienne, point d’aboutissement de l’exode rural. Il apparaît que tout le phénomène migratoire des métallurgistes de Sèvres se situe pratiquement dans le quart nord-ouest de la France.

L’immigration étrangère, quant à elle, est caractérisée par l’arrivée massive des Belges à la faveur de la Grande Guerre. Ces derniers étant en majorité des professionnels, ceci explique qu’il faille attendre 1936 pour enregistrer une baisse de qualification du travail immigré alors que le phénomène a pu se produire plus tôt ailleurs.

Les données des listes nominatives de Sèvres concernant l’habitat permettent de déceler une densité maximum dans le logement juste avant la Grande Guerre.

Celle-ci débouche sur le phénomène pavillonnaire des années 20 dans lequel les métallurgistes de Sèvres s’inscrivent pleinement.

Mais au plus fort de la vague pavillonnaire, 80 % des métallurgistes logent encore en immeuble or il apparaît que pour ces derniers, si la pression du logement connaît un répit dans les années qui suivent la guerre, l’entassement est redevenu la règle en 1936.

L’étude de l’accession au logement individuel suivant la profession enregistre le phénomène de l’évolution de la qualification ouvrière : en 1936 un tourneur n’a pas plus d’espoir d’habiter un pavillon qu’un journalier ou un O.S. En fait, derrière ce terme se cache le plus souvent un manœuvre sur tour.

Le principal enseignement des données concernant les groupes domestiques des métallurgistes de Sèvres est un recul de la famille nucléaire au profit de la famille élargie dans l’entre-deux-guerres. Il semble que deux facteurs se soient conjugués pour faire reculer la famille conjugale durant cette période : d’une part le déséquilibre démographique occasionné par la guerre qui a poussé nombre de veuves chez leurs enfants et d’autre part le contexte économique qui a contraint les ouvriers à se rassembler dans des groupes domestiques élargis, au sein desquels fonctionnait une entraide réciproque. (Le contexte économique est très dur à Sèvres en 1921 avec Renault qui vient de licencier la moitié de son personnel).

En 1921 la famille élargie, c’est d’abord les collatéraux. Cela confirme une entraide économique : on aide les nouveaux arrivants dans la région parisienne et les chômeurs.

En 1936 cette famille élargie c’est d’abord les grands-parents il s’agit plus d’un soutien de famille du fait de l’allongement de la vie et du manque de ressources des plus agés.

SPIRE Juliette, La bibliothèque de la Bourse du Travail de Paris, Maîtrise [Antoine Prost, Jean-Louis Robert], Univ. Paris 1 CRHMSS, 1985, 207 p.

L’objet de cette étude est d’analyser le contenu d’une bibliothèque ouvrière et syndicale, à travers l’examen de ses acquisitions entre 1898 et 1914, et de définir la vocation et le but de cette institution, dans le contexte de l’action éducative des Bourses du Travail et du développement du syndicalisme. Cette analyse a été effectuée grâce au traitement statistique informatisé, à l’aide d’un logiciel statistique permettant de dégager les grandes orientations de la bibliothèque.

Entre 1898 et 1906, la bibliothèque de la Bourse de Travail de Paris est un centre de documentation économique et sociale et de réflexion militante, une bibliothèque professionnelle et technique, mais aussi une bibliothèque d’éducation générale, comme le souhaitait le fondateur des Bourses, Fernand Pelloutier.

Après 1906, à la suite des conflits entre les syndicalistes révolutionnaires et le gouvernement, et surtout après l’affirmation de l’indépendance syndicale à Amiens, l’institution est délaissée des syndicalistes administrateurs et contrôlée par la Préfecture qui en fait un lieu d’éducation économique, civique et technique destinée surtout à intégrer la classe ouvrière.

Cette étude décrit ce centre de formation ouvrière et ses enjeux, tout en montrant que la pratique du subventionnisme a entravé sa fonction révolutionnaire et a abouti à son abandon, au nom de l’indépendance syndicale en matière éducative.

1984

FOURRE Véronique, La jeunesse ouvrière chrétienne de 1940 à 1947. Crise d’adolescence d’un mouvement de jeunes chrétiens, Maîtrise [Michel Launay], Univ. Paris 1 CRHMSS, 1984

La Jeunesse Ouvrière Chrétienne, créée en 1926 en Belgique, offre plusieurs thèmes de recherche intéressants.

Ce mouvement se situe à la confluence d’une doctrine et d’une classe sociale historiquement opposées l’une à l’autre : Le Christianisme et le monde ouvrier. Issu d’une tradition sociale chrétienne remontant à l’Encyclique RERUM NOVARUM, il innove cependant en spécialisant son action à la classe ouvrière et en créant ainsi les conditions d’un élargissement de l’expérience à d’autres classes sociales. Enfin, il a en France un succès tout à fait remarquable, le plaçant parmi les tout premiers mouvements de jeunesse en 1939.

L’intérêt de ce mouvement s’amplifie en 1940, car deux éléments déterminants interviennent :

1/Le premier est l’arrivée au pouvoir du Maréchal Pétain entraînant : la disparition de l’unité nationale du mouvement avec au Nord une JOC dissoute, officieuse voire clandestine et au Sud, une JOC officielle évitant difficilement une trop grande compromission avec le nouveau régime. Un choix rapidement inéluctable entre sa vocation chrétienne et sa tradition ouvrière.

2/Le second élément est, au-delà de ce choc événementiel, la « fermentation » de la catholicité française remettant en cause son action apostolique celle en particulier du mouvement jociste jugée à la fois temporelle et trop peu évangélique.

L’occupation est donc pour la JOC : – une existence quotidienne, – une remise en cause « politique » – un débat de fond idéologique. Ces trois dimensions ont des implications déterminantes dans l’évolution de ce mouvement, car elles insufflent un esprit différent dégagé de la traditionnelle doctrine sociale de l’Église, tout en formant des militants différents dans leur engagement temporel et politique.

Notre travail s’attache à étudier les changements imputables à l’occupation et leur pérennité au-delà de ce choc historique. Cette étude est uniquement basée sur les archives du Secrétariat Général de la branche masculine et française du mouvement.

MIALHE Paul-Henri, Étude socio-professionnelle d’une rue du XIe arrondissement entre 1926 et 1936, Maîtrise [Antoine Prost, Jacques Girault], Univ. Paris 1 CRHMSS, 1984

L’objectif est de mener une étude historique en utilisant l’ordinateur. Cet a priori conditionne le choix de la source qui doit nécessairement prendre en compte la spécificité de l’ordinateur. À cette fin, on a retenu les trois recensements de la ville de Paris en 1926, 1931 et 1936, complétés par les listes électorales de 1925, 1930 et 1935. Pour exploiter les indications données par les recensements, deux procédés pouvaient être retenus : soit travailler par sondage sur l’ensemble du quartier de La Roquette, soit se limiter à un lieu de vie particulier : place, rue. C’est cette deuxième solution qui a été choisie et l’étude porte sur la rue Saint-Sabin, non loin du Faubourg Saint Antoine. L’étude comporte un ensemble de tableaux et de graphiques.

L’évolution de la rue pendant la période 1926-1936 est étudiée sous deux aspects : d’une part l’évolution des personnes stables (quels sont leurs points communs et éventuellement, quels infléchissements se produisent au sein de cette population), d’autre part, l’évolution l’évolution globale de la rue telles qu’elle est reflétée par chacun des trois recensements. Dans ce but, sont étudiées l’évolution de la composition des familles (étude comparative, description), et celle des professions qui fait apparaître les modifications structurelles et conjoncturelles de la rue.

Au terme de l’étude, on peut faire les constatations suivantes :  – En ce qui concerne la population : Le renouvellement est important : de 1931 à 1936, il est de 51 %. La moyenne d’enfants par famille diminue peut-être en raison de la conjoncture économique. Le travail des femmes devient plus régulier. Elles investissent le secteur des services. – En ce qui concerne les activités : De 1926 à 1936, on note un pourrissement du marché de l’emploi. Essoufflement du secteur production dû à un changement de structure économique. Stagnation du secteur commerce. Dynamisme du secteur des services. La qualification des actifs est en baisse, surtout pour les femmes et les jeunes. Si le marché de l’emploi est souple en 1926, il devient rigide en 1936. La rue Saint Sabin elle-même change de caractère : d’active et bruyante, elle devient peu à peu plus calme.

1983

AVRAN Isabelle, La Fédération CGT de l’habillement. Discours et pratiques syndicaux dans une branche professionnelle à majorité féminine.1947-1968, Maîtrise [Antoine Prost, Jean-Louis Robert], Univ. Paris 1 CRHMSS, 1983

Les années 1947 à 1968 sont, après plusieurs mois d’optimisme, des années difficiles pour la Fédération CGT de l’habillement, autant du fait de l’ampleur des revendications à défendes, ce qui constitue pour elle une priorité (notamment la défense des salaires) que du fait d’une influence (fluctuante) faible (bien que majoritaire par rapport aux autres fédérations).

Elle informe, propose, explique, organise des journées d’actions nationales (surtout après 1962) qui ont un succès limité, dans un climat tendu et aboutit à des victoires assez partielles. Il faut pourtant souligner l’écho de la grève des midinettes, en 1949, et surtout l’importance de Mai 1968 entraînant des milliers d’ouvriers, de femmes, de jeunes dans l’action syndicale que beaucoup découvrent. Mais il faut noter cependant les difficultés de la Fédération à prendre en compte les dimensions et les enjeux des mutations qui s’opèrent dans la branche.

Les femmes sont de plus en plus nombreuses à tous les échelons du syndicat. Mais, ce n’est qu’à la fin des années 60 que l’on sent réellement mûrir un début de réflexion spécifique à leur égard, parallèle à la campagne de la CGT. En fait, par ses prises de position, la Fédération se veut surtout un large syndicat de la classe ouvrière unie. Ainsi, devenue pour une part une Fédération « féminine », elle a peut-être eu surtout le mérite d’associer (ou d’intégrer) l’histoire des femmes de l’habillement à celle du mouvement ouvrier français.

BACKOUCHE Isabelle, Les Actualités Cinématographiques Gaumont de 1956, Maîtrise [Antoine Prost, Michel Launay], Univ. Paris 1 CRHMSS, 1983

Un double intérêt nous a conduits à travailler sur les Actualités Cinématographiques (AC) : envisager une société par un biais nouveau et analyser le discours d’un moyen d’information.

Le choix de 1956 se justifie par la position charnière de cette année dans la période après-guerre, que ce soit sur le plan politique (française et internationale) ou social (aspects matériels et quotidiens).

Ce mémoire propose trois éclairages différents. Une première partie présente les problèmes de réalisation des AC et les conditions de leur réception dans les années 50. Elle fait ressortir la dimension industrielle de ce moyen d’information ainsi que les spécificités de son public. Dans un deuxième temps, nous nous intéressons aux AC comme moyen d’information. De quoi parlent-elles ? Comment en parlent-elles ? L’étude des modalités du discours des AC (Guerre d’Algérie, relations internationales, vie quotidienne des Français), vérifiant concrètement les enjeux de leur discours. Leur apport principal pour l’historien apparaît alors clairement : permettre de comprendre comment événements, crises, mutations sont vécus — et surmontés ou évacués — par les contemporains de la société concernée.

L’AC s’adressant à un public large et hétérogène se doit d’aborder les questions essentielles de l’année 1956. Mais elle sait, et elle en a surtout les moyens, construire un discours qui est à la fois le reflet d’une réalité donnée et un écran par rapport à celle-ci : dualité qui légitime l’intérêt que l’historien peut lui porter.

COULAMBON Gilles, L’Humanité et le procès des seize, Maîtrise [Antoine Prost], Univ. Paris 1 CRHMSS, 1983, 157 p.

L’Humanité, organe du Parti communiste français a publié environ 70 articles pendant la période du premier procès de Moscou. L’étude de ces articles nous a permis de mettre à jour un certain nombre de faits qui nous permettent de tirer les conclusions suivantes : – l’Humanité a été durant cette période le principal relais de la politique de Staline en Europe. – l’Humanité a falsifié, déformé l’histoire des dirigeants de la Révolution d’octobre. – l’Humanité a calomnié Trotsky, Sédov et les militants de la IVe internationale. – l’Humanité a tout fait pour empêcher la mobilisation au sein du mouvement ouvrier, en expliquant que tous ceux qui osaient défendre les accusés étaient des fascistes.

Pour terminer, nous affirmons que l’Humanité s’est disposée dès le 19 août 1936 à soutenir et à couvrir les premières exécutions des dirigeants du Parti bolchévique. Par ailleurs bien que l’Humanité n’en dise mot, il ne faut pas oublier que ce premier procès marque le commencement de la terreur de masse contre les ouvriers, les paysans et les opposants au régime stalinien.

DELAVAUT-BERGER Maryse, L’implantation du parti communiste dans une cité cheminote : Longueau, 1920-1936, Maîtrise [Antoine Prost], Univ. Paris 1 CRHMSS, 1983

À partir des archives départementales de la Somme, (recensements, archives de police, presse), cette étude a pour objet de déterminer les conditions et les modalités d’implantation du parti communiste dans la petite ville ferroviaire de Longueneau, de 1920 à 1936.

L’organisation communiste naît dans un milieu sociologiquement homogène, celui des agents de la Compagnie du Nord, à partir pour l’essentiel, du travail syndical d’un noyau de militants très actifs, qui entraîne le centre cheminot vers la CGTU, lors de la scission.

La progression électorale du PCF est régulière pendant la période avec un premier succès lors des municipales de 1925. Longueau devient, dès les années 30, le bastion rouge autour duquel le parti communiste se développe dans l’ensemble du département.

Le rôle dynamique joué par la cité cheminote s’impose partout particulièrement à Longueau, en 1933, d’un hebdomadaire régional du PCF : le Travailleur Somme et Oise, dont la diffusion entre pour beaucoup dans les succès électoraux du Front populaire qui font de Louis Prot, maire de Longueau, et de Jean Catelas, cheminot du centre Amiens-Longueau, les deux premiers députés communistes de la Somme.

DULOUT Yves, Les liens de la jeunesse ouvrière chrétienne et du syndicat CFTC pendant les années trente, 1930-1939, Maîtrise [Antoine Prost, Michel Launay], Univ. Paris 1 CRHMSS, 1983, 284 p. + annexes, graphiques et illustrations.

À partir des archives du secrétariat général de la JOC, l’étude envisage quelles furent les raisons et la nature des relations de deux organisations d’inspiration chrétienne dans les années trente : une organisation ouvrière de jeunesse (la JOC) de création alors récente (1927) ; qui se donne pour but d’assurer une formation intégrale de la jeunesse salariée ; un syndicat : la confédération française des travailleurs français fondée en 1919, de composition sociologique hybride et surtout marquée par l’épithète générique de son prédécesseur (SECI) : un syndicat des employés du commerce et de l’industrie.

En position de convergence et de synchronisme, les deux organisations se caractérisent par une adéquation de quelques principes d’origine identique : une doctrine, dérivée des derniers enseignements de l’Eglise en matière sociale et économique, une « position » politique, démocrate sociale dont on tente de préciser les caractères, une problématique d’Action catholique. En bref, un fonds qui détermine parfois ponctuellement, parfois durablement des accords et des campagnes communes. On a bien évidemment privilégié la JOC, son rôle, ses manifestations, les caractères de son action, ses motifs d’adhésion au syndicalisme chrétien, plus que les structures du syndicat lui-même. Il s’agissait de réfléchir sur l’apport que la JOC a pu fournir à la CFTC, la manière dont elle envisageait ses relations à la branche adulte professionnelle. Que le qualificatif de chrétien soit commun aux deux organisations n’élude pas pour autant en effet l’opposition de deux ordres de discours irréductibles à eux-mêmes. En dix ans cependant, l’histoire des liens de la JOC et de la CFTC traduit une évolution certaine, consacrée par le suivi constant d’un corps de revendications, une unité de fait pendant le Front populaire.

Au travers de ces liens, des questions économiques, politiques, des querelles de principes et de compréhension, c’est un certain angle de lecture de l’histoire des années trente qui transparaît. Ils relatent d’une manière fidèle les crises du moment et l’importance des essentiels acquis du Front populaire dont la JOC et la CFTC furent également, bien qu’exclues du Rassemblement populaire, les instigatrices.

FORMAN Hervé, 1967-1968 avant la grève générale : les grèves en France, Maîtrise [Antoine Prost], Univ. Paris 1 CRHMSS, 1983, 210 p.

En 1967-1968, avant la grève générale en France, les grèves ouvrières, les manifestations professionnelles, comme celles liées au mécontentement des paysans, des jeunes, des étudiants annonçaient-elles l’explosion de mai-juin 1968 ?

P. Viansson Ponté faisait part, dans Le Monde du 3 mai 1973 d’« un type de manifestations anciennes ». Inversement A. Touraine dans Le Mouvement de Mai ou le communisme utopique relatait une « forme nouvelle de la lutte des classes ».

Où devait-on « classer » — en admettant que cela soit possible — les grèves massives des métallurgistes bordelais, des mensuels de Saint-Nazaire, des ouvriers du textile dans la région lyonnaise ? Claude Durand dans Grèves revendicatives ou grèves politiques, acteurs pratiques du mouvement de Mai indiquait ce que sous-tendaient ces approches divergentes et fournissait les premiers éléments de la typologie. Pouvait-on vérifier l’affirmation de Serge Mallet qui depuis la publication de La nouvelle classe ouvrière a trouvé de nombreux souscripteurs, selon laquelle les intellectuels auraient alors arraché à la classe ouvrière l’avant-garde dans une « nouvelle lutte de classe » n’opposant plus capitalistes et ouvriers.

Les grèves ouvrières du premier trimestre de l’année 1967 étaient-elles isolées dans une période sans précédent de paix sociale dans l’industrie ? Il fallut le recul nécessaire du contexte historique — tant politique qu’économique et social — dans la décennie pour rétablir une réalité parfois déformée par les impressions encore trop proches des événements de l’année 1968.

C’est avant tout dans les travaux de l’INSEE, du Ministère des Affaires sociales, du Ministère du Travail et de la Sécurité sociale qu’on a systématiquement puisé les données pour établir un profil des conflits, la presse syndicale et d’opinion donnant la chronologie.

La confrontation de ces données d’horizons très différents amenait un résultat qui pouvait surprendre. On devait admettre en avançant dans l’étude que nombre d’analyses parfois considérées comme dépassées — voir « archaïques » — se trouvaient actualisées, particulièrement celles portées il y a près d’un siècle par Rosa Luxembourg dans Grève de masses, Parti et Syndicats.

FRYDMAN Didier, Les communistes montreuillois 1935-1939, Maîtrise [Antoine Prost, Jacques Girault], Univ. Paris 1 CRHMSS, 1983

Ce mémoire propose une approche du Parti Communiste Français entre 1935 et1939, à travers une étude sur les adhérents montreuillois. Il vise à expliquer comment au cours de ces quatre années, les militants ont transformé leur ville en un puissant bastion du PCF.

Quels sont les hommes et les femmes qui mettent en œuvre, à Montreuil, la politique du parti communiste ? Dans quelle mesure et avec quels moyens parviennent-ils à influencer leurs concitoyens ? Quelles difficultés ou facilités rencontrent-ils dans cette tâche ? Telles sont les questions principales qui font l’objet de cette recherche.

C’est un parti communiste essentiellement ouvrier qui s’adresse aux Montreuillois à cette époque, et le recrutement important des années 1936-1937 ne parvient pas à modifier cette caractéristique.

Les capacités d’intervention du PCF auprès des classes moyennes et des intellectuels sont donc réduites, à un moment pourtant où gagner ces catégories d’habitants constitue une priorité du parti.

Cependant, malgré ces obstacles intrinsèques, les résultats électoraux montrent que les communistes montreuillois rayonnent sur des milieux très divers et que leur influence s’élabore de façon différente selon les quartiers et les pratiques militantes. Il apparaît que ce qui détermine cette influence dans un quartier, n’est pas toujours le nombre d’adhérents, ou la proportion d’ouvriers qui s’y trouvent, mais plutôt la faculté des communistes à se saisir des problèmes quotidiens des habitants.

Avant même son succès électoral de 1935, le PCF utilise ou crée à Montreuil, des organisations de masse (comités d’intérêts généraux, comités de chômeurs…) qui lui permettent de s’ouvrir sur un très large public. Une fois à la mairie, il met en place d’autres structures afin que ce réseau couvre l’essentiel de la vie sociale des Montreuillois.

C’est ce travail quotidien qui, à Montreuil, donne la possibilité aux communistes d’aborder avec succès le soutien à la République espagnole ou l’unité du Front populaire.

Tels sont brièvement résumés, les divers éléments qui caractérisent le mode de fonctionnement et d’influence du PCF à Montreuil.

GEORGI Franck, La première « Bataille socialiste » : histoire et portrait d’une tendance dans le Parti socialiste SFIO (1927-1935), Maîtrise [Antoine Prost], Univ. Paris 1 CRHMSS, 1983, 242 p.

À la différence d’autres « tendances » au sein de la SFIO, la « Bataille socialiste » n’a pas jusqu’ici particulièrement retenu l’attention des chercheurs. Pourtant, la tendance animée par J. Zyromski a joué un rôle déterminant dans l’évolution du socialisme français de l’entre-deux-guerres. Par son action, elle a puissamment contribué à vaincre les éléments réformistes du Parti qui, par deux fois, ont failli entraîner la SFIO dans la voie de la participation gouvernementale. Gardienne de l’orthodoxie doctrinale, la B.S. fut l’adversaire déterminé des « néo-socialiste » et obtint leur exclusion en 1933. Enfin, à partir de 1934, la tendance pèse de tout son poids afin que le Parti socialiste s’engage dans la voie de l’unité avec le Parti communiste avant de militer activement en faveur de la constitution d’un Front populaire.

Ce mémoire est basé sur des sources diverses : archives personnelles de J. Zyromski — tout récemment ouvertes eu public —, Archives nationales, collection complète du journal de la tendance, la Bataille socialiste, rapports de congrès, presse, brochures, témoignages, etc. Il se propose d’étudier la B.S. de sa naissance en 1927 à la défection de Marceau Pivert en 1935 : après cette date, la tendance et le journal changent de visage. La « première » bataille historique sera appréhendée dans sa dimension historique et dans sa dimension structurelle. La « première » Bataille socialiste sera appréhendée dans sa dimension historique et dans sa dimension structurelle. La partie chronologique s’efforce d’articuler l’histoire de la tendance avec celle du parti : date charnière pour la SFIO des années trente, le six février 1934 est aussi le moment où la Bataille bascule de la défensive à l’offensive, du combat contre la collaboration de classes à la lutte active pour l’unité et la prise révolutionnaire du pouvoir. Une autre partie, plus synthétique, essaie de faire ressortir un certain nombre de réalités structurelles touchant au journal, aux militants, à l’implantation, à l’influence, à l’idéologie, aux liens de la B.S. avec l’appareil du Parti.

Enfin, l’étude éclaire un certain nombre d’aspects jusqu’ici laissés dans l’ombre : recherche des origines de la B.S. à partir de 1924, rapports avec le planisme, le syndicalisme, etc. La première B.S. apparaît comme une réalité complexe, hétérogène, qui désigne à la fois le rassemblement le plus large des antiparticipationnistes — dont P. Faure — et une tendance de gauche originale, toujours présente, incarnée par Zyromski. Celle-ci poursuivra son chemin seule à partir des années de 1936, après que ses prises de position des années 1934-1935 eurent éloigné d’elle, successivement, modérés (P. Faure) et pacifistes révolutionnaires (M. Pivert).

HERVOUET Elisabeth, Les Petits Bonhommes : Un journal pour l’enfance ouvrière-1911-1914, Maîtrise [Antoine Prost, Jean-Louis Robert], Univ. Paris 1 CRHMSS, 1983

Ce mémoire repose sur le dépouillement de la collection des Petits Bonshommes, de 1911 à 1914, ainsi que sur celui des principaux journaux du mouvement ouvrier (L’Humanité, La Bataille Syndicalisme, La Voix du Peuple…) de 1900 à 1914.

À la fin de l’année 1909, un groupe de syndicalistes, de socialistes et de coopérateurs décide de créer la Ligue ouvrière de protection de l’enfance, une organisation qui veut aider à l’éducation de l’enfance ouvrière.

Après avoir étudié les liens qui unissent les organisations ouvrières à la Ligue et les activités de cette dernière, ce mémoire analyse le résultat de la principale d’entre elles : le journal Les Petits Bonhommes.

Paraissant du premier janvier 1911 au dix juillet 1914, Les Petits Bonhommes ont pour but l’élévation de la conscience des enfants, la formation des futurs syndicalistes. On y remarque donc de nombreux articles politiques et éducatifs. On note cependant, dans les deux dernières années, une évolution vers un journal plus divertissant, moins politique.

KRIKORIAN Nathalie, Analyse linguistique et historique du discours politique. Les éditoriaux de Louis Pauwels : « Le Figaro-Magazine » (mai-septembre 1981), Maîtrise [Michel Launay], Univ. Paris 1 CRHMSS, 1983

À travers l’analyse linguistique et historique des éditoriaux du Figaro-Magazine, le but de cette étude est de mettre en évidence la spécificité d’un fonctionnement discursif. Il s’agit en partant du discours comme base d’étude, de présenter les différents paramètres d’ordre social, politique et idéologique dans la mouvance desquels il se situe et dont il constitue simultanément la manifestation actualisée et le témoignage.

Considérant que l’information « pure » en ce qui concerne la presse, ou l’objectivité des faits du point de vue historique ne sont que relatifs et s’offrent toujours comme des données déjà observées et/ou interprétées, tout texte et particulièrement celui d’un discours politique est en lui-même une source de renseignements qui intéressent l’ensemble des disciplines de recherche en sciences humaines.

De ce point de vue, l’étude historique replace le discours dans son contexte sociologique, politique et idéologique, donnant lieu à des informations formelles que vient étayer, renforcer, voire éclairer ou approfondir l’analyse linguistique proprement dite. L’analyse linguistique s’exerce sur les différents niveaux d’intelligence du discours, à la fois comme paramètre les conditions (socio-historiques) de production du discours.

L’analyse lexicologique des éditoriaux de L. Pauwels vise à éclairer le sens des processus argumentatifs propre à ce discours, à en affirmer les enjeux politiques et idéologiques à partir desquels se fonde une stratégie argumentative susceptible d’être isolable en tant que spécifique d’un certain « discours de droite » situé dans la mouvance des droites contre-révolutionnaire de type « fascistes ».

LE ROUX-YAHIEL Martine, L’Histoire du Groupe Français d’Éducation Nouvelle de 1922 à 1962, Maîtrise [Antoine Prost], Univ. Paris 1 CRHMSS, 1983

L’Histoire du GFEN a été étudiée à travers la revue du mouvement « Pour l’Ère Nouvelle » et des archives privées. Ce mouvement se présente dès lors comme l’héritier de la plupart des grands pédagogues depuis J.J. Rousseau, son but essentiel étant d’aboutir au développement harmonieux de l’enfant au sein de la société. Il s’inscrit par ailleurs dans un cadre plus large : la Ligue Internationale Pour l’Éducation Nouvelle.

L’Histoire du GFEN s’articule autour de trois périodes : de 1922 à 1929, le GFEN filiale française du mouvement international, jette les bases d’une action militante en faveur des idées nouvelles en éducation sous l’égide de personnalités du monde intellectuel de l’époque. De 1929 à la veille de la guerre, le groupe s’oriente vers une politique plus revendicative à l’égard des questions populaires, particulièrement au moment du Front populaire. Après la guerre, subissant le contre coup de l’échec du plan Langevin-Wallon, il tente de se perpétuer à travers des expériences nouvelles, ne pouvant plus espérer un écho favorable au sein des instances officielles.

Il apparaît au terme de cette étude que l’apport du groupe à la réflexion pédagogique en France reste incontestable, mais qu’il souffre d’un certain nombre de faiblesses : un recrutement étroit dans le milieu intellectuel bourgeois, un message qui « passe mal » dans le milieu enseignant, et une pratique qui se résume à des expériences novatrices isolées.

MORENO Emmanuelle, Étude sur les lycéens de Sens de la première guerre mondiale à nos jours. La démocratisation de l’enseignement secondaire à Sens de 1920 à 1980, Maîtrise [Antoine Prost], Univ. Paris 1 CRHMSS, 1983

Le but de ce mémoire est de cerner, à travers une enquête locale portant sur 9000 lycéens, les progrès de la démocratisation de l’enseignement secondaire et la façon dont celui-ci est devenu un instrument de sélection.

Après avoir retracé l’évolution des structures de l’enseignement secondaire dans la région de sens, on a procédé à l’étude quantitative de la clientèle des établissements secondaires de la ville de Sens de 1920 à nos jours. La recherche est essentiellement axée sur les transformations sociales et géographiques de cette clientèle. Si les inégalités géographiques s’atténuent grâce à l’essor des transports scolaires et à la création de collèges en zone rurale, les inégalités sociales sont toujours marquées. Les classes les plus modestes, autrefois exclues du lycée, sont maintenant accueillies au collège et leur élimination est progressive : l’orientation se substitue à l’exclusion. Seule l’élite des classes sociales défavorisées a accès à l’enseignement de second cycle long et à la filière noble C, tout comme autrefois, seuls les plus doués d’entre eux avaient accès au lycée. Les progrès de la démocratisation semblent plus apparents que réels. La restructuration de l’ensemble secondaire, la redéfinition des règles du jeu scolaire ont simplement changé le visage de la sélection.

PERRIAUX Anne-Sophie, La création du comité d’établissement de Renault-Billancourt, 1945-1952, Maîtrise [Antoine Prost], Univ. Paris 1 CRHMSS, 1983

Il n’y a pas de comité d’établissement à Boulogne avant 1947 ; c’est là un des aspects restrictifs de la législation RNUR par rapport à la législation nationale. En fait, de 1945 à 1947, le Comité Central d’Entreprise pallie cette carence. Institué par l’ordonnance de nationalisation, élu, il se donne rapidement les moyens d’assumer les tâches qui lui reviennent : gérer les œuvres sociales et contribuer à l’amélioration de la production et des conditions de travail. L’étroite unité de vue entre la Direction et la CGT, majoritaire au CCE, explique que la mise en place et le fonctionnement du comité ne donnent lieu à aucun désaccord.

À partir de novembre 1947, le comité d’établissement doit être, pour la CGT, un instrument de lutte. Les services sociaux, épurés, proposent des activités conformes à l’orientation syndicale.

En décembre 1950, la Direction riposte par la diminution massive de la subvention accordée au CE qui est contraint d’abandonner une partie des œuvres sociales, reprises par la Direction. La CGT ne change pas de stratégie pour autant.

En juin 1952, après la manifestation contre Ridgway, elle perd la majorité au sein du comité d’établissement. Les membres CGC, FO, SIR, CFTC du CE offrant les garanties du respect d’une stricte neutralité, la Direction se déclare favorable à un retour de la totalité des œuvres sociales au comité d’établissement de Renault-Billancourt en décembre 1952.

PEYRONNIN Philippe, « L’École Emancipée » 1919-1929 (Organe pédagogique hebdomadaire de la Fédération des Syndicats des Membres de l’Enseignement laïque), Maîtrise [Antoine Prost, Jacques Girault], Univ. Paris 1 CRHMSS, 1983

Cette étude retrace une étude de onze années, de 1919 à 1929, l’histoire de L’École Émancipée, revue pédagogique et syndicale gérée et administrée par les instituteurs de la Fédération des Membres de l’Enseignement Laïque. Après avoir cerné les caractéristiques de l’époque et du milieu dans lesquels elle est diffusée, et analysé le sens et les motifs de son existence, ce travail présente la revue à travers ses différentes rubriques, ses collaborateurs et lecteurs et délimite la portée de son audience. Il revient ensuite sur la portée des combats successifs menés par la revue au cours des années vingt en dégageant les principes directeurs qui les suscitent et les lient. S’attachant plus précisément aux aspects syndicaux et sociaux, le mémoire suit l’évolution politique de l’École Émancipée partagée entre son passé syndicaliste-révolutionnaire et son attirance pour les thèses et les principes bolcheviques.

On y recherchera de quelle façon la revue participe durant cette période à la diffusion du communisme en France d’une part, et de l’autre, les raisons profondes de son opposition au PCF en 1929.

SINGER Philippe, L’Union départementale CGT de la Loire-Inférieure (1938-1939), Maîtrise [Antoine Prost], Univ. Paris 1 CRHMSS, 1983

L’image que nous donne l’UD CGT de Loire inférieure avant la guerre est comme le négatif de ce que l’on peut alors voir en France. Les communistes, partisans d’un syndicalisme de lutte des classes, apparaissent attachés à la défense des intérêts quotidiens des travailleurs tandis que les anciens confédérés abandonnent tout réformisme et adoptent un style révolutionnaire qui emprunte ses thèmes à la tradition anarcho-syndicaliste.

Pour saisir et étudier cette originalité, nous nous sommes concentrés sur les années 1938-39, difficiles pour la CGT puisqu’elles correspondent à son reflux après la victoire de juin 1936. Durement sollicités par la dégradation du climat politique et social, par les nécessités de la défense nationale et l’offensive conjointe à partir d’avril 1938, et du patronat et du gouvernement, les dirigeants syndicaux et les ouvriers se sont montrés tels qu’en eux-mêmes.

Exception faite de quelques minorités révolutionnaires sans influence, ils apparaissent modérés. Ce n’est pas par crainte de se faire déborder que les dirigeants confédérés adoptent un style révolutionnaire. L’anarcho-syndicalisme proclamé, sinon vécu, est purement démagogique. Mais il est dicté par un opportunisme dont les fondements sont profonds et qui tiennent à l’histoire du mouvement ouvrier en Basse-Loire et à la permanence de son contrôle par les Socialistes.

Le jeune Parti communiste français prit rapidement conscience de l’enjeu stratégique que représentait, après la Première Guerre, l’afflux sans précédent de la main-d’œuvre d’origine étrangère. Les fondements théoriques et les orientations principales de sa politique vis-à-vis de la MOE ont déjà été étudiés et sont relativement bien connus.

Partant du constat maintes fois vérifié qu’il y a une marge entre l’adoption de résolutions et leur mise en application, ce travail se propose, à partir de l’exemple des immigrés italiens, de déterminer quelle fut dans la pratique l’attitude des communistes français vis-à-vis de ces derniers dans la décennie qui sépare la dissolution de la Fédération communiste italienne de France et l’entrée de Giulio Ceretti au Comité Central du PCF.

L’identification et la description des organismes mis en place — les Centuries Prolétariennes, les Comités Prolétariens Antifascistes et, surtout, les groupes de langue italienne — et l’évaluation de l’influence du PCF dans l’immigration italienne — effectifs des groupes et implantation en Meurthe-et-Moselle — mettent en valeur deux phénomènes majeurs : – les tendances « autonomistes » des Italiens et leurs résistances aux décisions du PCF (à la bolchévisation en particulier) — une certaine indifférence et les négligences des membres et des comités du parti français qui, à la fin de la période étudiée, ne dirigeait et ne contrôlait toujours pas effectivement les groupes italiens.

1982

ATTIAS Eric, Les trotskystes en France sous le Front populaire. La scission du groupe « La Commune », Maîtrise [Antoine Prost], Univ. Paris 1 CRHMSS, juin 1982, 259 p.

Le projet de l’auteur a consisté, tout d’abord, à présenter les analyses originales défendues, dans la lutte des classes, par un groupe minoritaire. Le fond de ces analyses est constitué par la distinction que ces militants opérèrent toujours, entre la mobilisation révolutionnaire des masses, qui a abouti à la grève générale de mai-juin 1936, et la constitution d’une alliance politique, dite « Front populaire », liée au maintien du régime capitaliste. Une telle caractérisation du Front populaire renvoyait, bien entendu, à la nature de la social-démocratie et du stalinisme pris dans leurs exemples français. Dans un débat classique sur le Front populaire, il est parfois encore question de se demander si la grève de mai-juin 1936 a bien été un mouvement révolutionnaire, si Blum a bien échoué devant « le mur d’argent », si le Front populaire a, bien ou mal, préparé la guerre. Face à ces interrogations, à la fois profondes et tellement empreintes de confusion, les textes de Trotski apparaissent dans toute leur rigueur et toute leur cohérence.

Loin de la rigueur et de la cohérence apparaît, en revanche, l’activité des militants qui partagent l’analyse théorique de Trotski, mais qui expriment, le plus souvent, leurs désaccords avec lui dans la pratique. Bien que représentant, dans la lutte des classes, le véritable internationalisme, leurs positions restent très faibles dans la période 1935-1939.

L’auteur a essayé de pallier les difficultés soulevées par le manque de connaissances comptables, relatives au POI et au PCI, en ce qui concerne leurs effectifs, le tirage et la vente de leurs journaux. Il a tenté de répondre aux problèmes de compréhension posés par les séparations organisationnelles successives que connurent les militants trotskystes durant ces années. Le bilan de cette activité est celui que les trotskystes durant ces années. Le bilan de cette activité est celui que les trotskystes tirent de leur mouvement dans l’enfance : malgré l’inexpérience et les erreurs, l’héritage de Lénine et de Trotski a été transmis.

BAMPS Denis, La SFIO et la guerre d’Algérie, Maîtrise [Antoine Prost, Michel Launay], Univ. Paris 1 CRHMSS, juin 1982, 144 p. + annexes

L’essentiel de ce mémoire repose sur l’étude : – de l’intégrale des interventions faites devant les instances nationales de la SFIO (congrès, conseil, conférence nationale), – des notes prises en réunion de comité directeur, – de la presse nationale du Parti (Populaire, Populaire Dimanche…), – de certains quotidiens nationaux sur la période étudiée (Le Monde, L’Express, France-Observateur). De telles sources privilégient le niveau national.

D’abord discret, « le problème algérien » va rapidement polariser l’essentiel puis la quasi-totalité des débats au sein des instances nationales du Parti. 1945-1955 : la SFIO se remet des déchirures de la CED. L’Algérie n’apparaît pas comme un point de désaccord possible, mais comme un facteur d’unité. Même si quelques divergences exprimées par des courants fédéralistes apparaissent, l’unité demeure jusqu’à la fin de 1955 et se trouve renforcée lors de la campagne des législatives et le slogan « Paix en Algérie ». Après la victoire du Front Républicain, les inquiétudes exprimées par les fédéralistes s’intensifient. Mais c’est encore avec l’unanimité du Parti que G. Mollet accepte la présidence du conseil.

Le 6 février 1956 marque le tournant. La crise algérienne devient un facteur de division. La distance qui sépare la Majorité de la Minorité ne cesse de s’accroître au fur et à mesure que l’on s’avance dans la guerre d’Algérie, au point qu’une troisième force, en 1957, incarnée par G. Deferre, tentera de s’imposer en se plaçant dans une position intermédiaire. La crise de mai 1958, le vote d’investiture de de Gaulle, l’entrée de G. Mollet à titre personnel dans son gouvernement entraîne le Parti à la scission. Facteur d’union puis facteur de crise, la politique algérienne de la SFIO a accentué le mouvement d’affaiblissement que connaissait la SFIO depuis 1945.

Alors peut-on se contenter de résumer la politique de la majorité sous le cliché « politique de droite menée par un parti de gauche » ? La réponse est négative. Que toute perspective de départ dût entraîner une explosion qui mit en danger les institutions républicaines, le 13 mai, l’OAS, les barricades l’ont confirmé. De même, les principes demeurent assez défendables dans le contexte de l’époque et dans la logique d’une gauche réformiste. Mais une question reste en suspend : était-ce à la SFIO et aux socialistes de mener une telle politique ?

Étaient-ils capables de l’imposer au pays ? Étaient-ils capables d’éviter l’enlisement ?

BARRE Frédérique, La Fédération unitaire du Livre 1922-1935, Maîtrise [Antoine Prost, Jean-Louis Robert], Univ. Paris 1 CRHMSS, septembre 1982, 93 p. + annexes

L’évolution de la Fédération Unitaire du Livre de 1922 à 1935 doit être étudiée en liaison étroite avec celle de la CGTU. En 1925, alors que l’influence communiste est définitivement établie au sein de la confédération, la FUL, après un conflit violent sur le problème de « l’indépendance du syndicalisme », place elle aussi à sa tête une commission exécutive composée d’une majorité de membres du Parti communiste. Dès lors la rupture est définitive d’avec le Syndicalisme-Révolutionnaire qui avait prévalu jusque-là et qui se caractérisait notamment par la grande autonomie laissée aux sections. En 1929, la direction confédérale reconnaît le PC comme « avant-garde dirigeante du mouvement ouvrier ». Cette décision, entérinée par la majorité de la CE de la FUL, paraît inacceptable au secrétaire général Schumacher qui pour défendre ses idées, fonde un courant au sein de la CGTU. Le congrès confédéral donne raison à la ligne défendue par sa direction et met en échec les tendances prônant « indépendance du syndicalisme » ; il en va de même dans le FUL : Schumacher est amené à démissionner et le Comité National de 1930 adhère à la proportion des 2/3 à la thèse « majoritaire ». De 1929 à 1935, l’adhésion entre la CGTU et la FUL est totale aussi bien en ce qui concerne la politique des salaires que dans le domaine de l’unité. Jusqu’à 1934, les « Chefs réformistes » sont stigmatisés de façon catégorique dans les deux organisations, à partir de cette date la FUL (comme la CGTU) accepte d’engager des pourparlers avec son homologue confédérée, qui débouchent sur la réunification. Enfin il faut noter l’intérêt commun porté dès 1929 par les deux organisations révolutionnaires aux catégories les moins qualifiées : la désaffection de ces dernières étant sans aucun doute l’échec majeur de la CGTU comme la FUL.

BAS Françoise, Recherche sur les ébénistes d’art du Faubourg-Saint-Antoine de l’entre-deux-guerres à nos jours, Maîtrise [Antoine Prost], Univ. Paris 1 CRHMSS, octobre 1982, 130 p.

 Ce sujet, l’étude des ébénistes d’art dans leur quartier parisien, nous apporte des renseignements nouveaux sur le thème du groupe social artisanal. La période analysée (l’entre-deux-guerres à nos jours) n’ayant jamais été abordée, permet de connaître l’évolution historique, des techniques, de l’économie et des mentalités de ce groupe, à une époque relativement récente, et nous oblige ainsi à nous interroger sur la progression de ce métier en soixante ans.

Une telle étude nous intéresse à deux niveaux. Le premier, primaire, nous informe sur la vie quotidienne des artisans parisiens. Le deuxième niveau est la méthode utilisée pour la collecte de documents : volontairement directe, elle est composée en majorité d’interviews personnalisés et de la lecture de la presse artisanale. Cette méthode, construite sur le vécu des personnes concernées, nous permet d’aborder le sujet à la base, en nous imprégnant d’une atmosphère réelle et en nous évitant les nombreux a priori existants.

BEAUD Olivier, L’Union du personnel des administrations centrales : un mouvement de contestation chez les fonctionnaires des ministères, 1906-1914, Maîtrise [Antoine Prost, Jean-Louis Robert], Univ. Paris 1 CRHMSS, 1982, 191 p.

L’objet de cette étude est une petite association fédérative, qui a regroupé, au début du siècle, les employés « cadres » des différents ministères. Née en 1906, l’Union, apparue à l’époque de la naissance du syndicalisme dans la fonction publique, témoigne d’un certain mécontentement des fonctionnaires d’administration centrale. Ceux-ci ont vu leur situation professionnelle se dégrader lentement, qu’il s’agisse du montant de leurs traitements, dont l’évolution ne correspond pas à l’augmentation du prix de la vie, ou du déroulement de leur carrière, perturbé par les ingérences parlementaires.

Censée représenter tous les employés des ministères, l’Union est, en réalité, dominée par le groupe des rédacteurs et des chefs de bureau qui forment son ossature. Ses efforts ne seront, à l’exception des recours juridiques, guère couronnés de succès. L’état des sources (très inégales) a conduit à privilégier l’étude des revendications de cette Union, qui ne poursuit qu’un seul but : l’établissement commun aux administrations centrales. En fait, cette réforme administrative s’articule autour d’une idée-force, qui est l’acquisition de l’autonomie statutaire des fonctionnaires ; les revendications de l’Union sont, d’autre part, soutenues par une idéologie de légitimation propre aux fonctionnaires centraux. La crainte de la « prolétarisation et le souci constant de la « Carrière », qu’elle révèle, donne à cette association sa spécificité au sein du mouvement des fonctionnaires. 

BOURRICAND Catherine, De l’implantation du Parti communiste à Villeneuve-Saint-Georges entre les deux guerres, Maîtrise [Antoine Prost, Jacques Girault], Univ. Paris 1 CRHMSS, 1982, 167 p. + annexes

Villeneuve-St-Georges présente le cas d’une commune, qui s’inscrit dans l’étude générale de l’implantation du parti communiste, et dont les caractères sont particuliers du fait de la présence d’une grande majorité de cheminots au sein de la population. Certains problèmes habituellement favorables à cette implantation, tels que le manque de logements et le chômage ne figurent pas ici. Dans ce cas l’implantation s’est essentiellement appuyée sur un type de population composée d’ouvriers, jeunes, et d’origine provinciale, et une vie associative féconde. Les Villeneuvois connus pour leur force combative déployée au cours de 1920 sont particulièrement sensibles aux mouvements de masse at aux rassemblements au sein de syndicats ou autres associations. De plus le socialisme connu pour son rôle généralement important dans le développement du communisme dans toute la région parisienne, est bien implanté à Villeneuve. Représenté par un personnage très connu, Henri Leduc, il tient la municipalité jusqu’en 1935, et par une bonne administration rend la lutte difficile aux communistes. Ce combat incessant entre les deux partis donne une base à l’activité politique des militants malgré les périodes de ralentissement dans le recrutement des effectifs, ou le désintérêt porté à certaines réunions.

BOUTOT Françoise, Glandon, village du Limousin 1900-1980 : mémoires, passé, présent, Maîtrise [Antoine Prost], Univ. Paris 1 CRHMSS, 1982, 225 p.

Ce n’est pas à retracer l’histoire de Glandon, petite commune rurale du Bas-Limousin, au XXe siècle que ce travail prétend s’attacher, mais à écouter la mémoire des anciens du village.

En effet, la mémoire tisse des fils qui n’ont pas la rigueur de ceux de l’histoire « objective » des faits, propose ses propres constructions pour évoquer tant l’évolution du village que la vie qu’on y menait autrefois.

Tressées d’oubli, mystificatrices, doubles et apparemment contradictoires se révèlent ces constructions. Mais il ne s’agit pas tant de les mesurer à l’Histoire que de comprendre la mémoire comme un processus dynamique inscrit dans l’histoire. L’ambivalence de ses constructions est rapportée aux ambiguïtés mêmes du présent dans lequel la mémoire se déploie.

La mémoire, activité et non empreinte, entretient un rapport aussi étroit avec le présent qu’avec le passé : c’est ce que ce travail a voulu illustrer en donnant la parole aux « gens de Glandon ».

BRAUX Nathalie, Les événements de Charonne, février 1962, Maîtrise [Antoine Prost, Michel Launay], Univ. Paris 1 CRHMSS, 1982, 190 p. + annexes

Les événements de Charonne se déroulent dans un contexte de forte tension, due principalement à l’interminable conflit franco-algérien. La politique algérienne du Général de Gaulle qui vise la décolonisation suscite une vive opposition de la part d’un mouvement pro Algérie française : l’OAS. Ce groupement se fait connaître par la terreur aussi bien en Algérie qu’en France.

La manifestation anti-OAS du 8 février 1962, organisée par le PCF, le PSU, et la CFDT, répond à une série d’attentats commis la veille par l’OAS. Les forces de l’ordre interviennent violemment pour réprimer cette manifestation, et le bilan se solde par huit morts chez les manifestants, appartenant tous à la CGT ou au PCF, et plus de 240 blessés.

L’étude des articles de journaux prouve que la majorité de la presse parisienne soutient le gouvernement sinon pour la brutalité de la répression policière du moins pour sa fermeté anti-communiste, et sa volonté d’éviter les troubles. La presse communiste reste seule à clamer l’honnêteté des manifestants, et à dénoncer sans nuances les actions de la police.

Les très nombreuses réactions des partis, des syndicats, et d’organisations diverses, soutenant les participants du 8 février, expriment une condamnation de la répression policière, de la violence en général, et le souhait de voir s’achever la guerre. Elles permettent pour la première fois depuis longtemps des actions unitaires de la gauche.

Cependant, comme cette étude sur les événements de Charonne permet de le constater, le rassemblement populaire du 13 février 1962, lors des obsèques des victimes, ne symbolise ni une contestation absolue du gouvernement (car on mise sur le pouvoir pour le règlement du conflit) ni un soutien massif aux organisations de gauche (comme celles-ci ont voulu le croire). L’ambiguïté de ces événements réside dans les multiples interprétations politiques qui en ont été faites. La seule communément admise reste celle qui établit un lien de cause à effet entre les événements de Charonne et les Accords d’Evian.

DARVENNE Florence, La Fédération de l’habillement 1893-1914, Maîtrise [Antoine Prost, Jean-Louis Robert], Univ. Paris 1 CRHMSS, 1982, 240 p.

Cette maîtrise complète une étude de la Fédération CGT de l’habillement, déjà entreprise dans deux autres mémoires.

Elle étudie alors les origines de cette Fédération, rattachée à la CGT en 1903, sa création en 1893 et sa croissance difficile jusqu’en 1914. Cette période est marquée à la fois par le développement du travail féminin et par l’essor du syndicalisme. Dans cette optique, plus que l’étude d’un syndicat, il s’agit surtout de l’étude d’un syndicat, cette fédération : la prépondérance des femmes dans le métier, l’éparpillement des travailleurs, la majorité masculine dans le syndicat nous ont conduits à étudier les problèmes de développement syndical et les causes de ces difficultés.

Cette Fédération, précisons-le, est en 1914 (et par la suite) un syndicat mineur, ne groupant qu’une infime partie de la corporation, concurrencée par divers types de mouvements (coopération, syndicats confessionnels). Dès lors, son action, sa portée sont très réduites, l’élément essentiel demeurant la tentative de syndicalisme féminin, liée à l’essor du syndicalisme à cette époque d’une part, et à la croissance des groupements féministes d’autre part.

ELGAN Elizabeth, L’UNEF de 1962 à mars 1968, Maîtrise [Antoine Prost, Jean-Louis Robert], Univ. Paris 1 CRHMSS, 1982, 215 p. + annexes

Ce mémoire de maîtrise se propose de décrire l’histoire de l’UNEF, envisagée sous son aspect chronologique, entre la fin de la guerre d’Algérie et la crise de Mai 1968.

Il n’existe pour l’instant que peu d’ouvrages français sur le mouvement étudiant entre ces deux dates charnières. Outre une présentation quantitative du milieu étudiant de l’époque et une étude des structures de l’UNEF, le mémoire retrace, sur le plan national, les événements d’ampleur qui ont affecté le mouvement étudiant, les débats de l’appareil ainsi que les orientations successives telles que l’on peut les voir à travers les publications de l’UNEF.

Trois périodes sont discernées dans l’évolution de l’UNEF au cours de ces six années particulièrement riches pour l’histoire du syndicalisme étudiant. La première de ces périodes correspond à une phase ascendante, la seconde à une intensification de l’élaboration théorique et la troisième à un déclin.

Une tentative d’explication, à la fois du succès et de la crise de l’UNEF, est faite par un rapprochement avec la situation politique en France et dans le monde.

Le mémoire comprend également une chronologie, une bibliographie avec les sources, des notes, des tableaux et des annexes dont notamment une liste partielle des directions nationales.

FERRE Jean-Pierre, L’implantation du PCF à Montereau dans l’entre-deux-guerres, Maîtrise [Antoine Prost, Jacques Girault], Univ. Paris 1 CRHMSS, 1982, 170 p. + annexes

Tentative d’histoire locale, cette étude réalisée à partir d’une abondante documentation — sources statistiques, presse régionale, archives de police — donne à la notion d’« implantation » son acceptation la plus large. Il ne s’agit pas seulement d’analyser dans le détail l’évolution des suffrages communistes, de compter les adhérents, les cellules, le nombre de journaux vendus… mais de dégager un ensemble de réalités complexes de nature à expliquer l’ancrage communiste.

Cet ouvrage se divise en trois parties : la première est consacrée à l’étude des conditions de l’implantation communiste ; la seconde porte sur le passé socialiste de la commune, sur l’organisation communiste issue de la scission de décembre 1920 et de son influence électorale ; la troisième évoque l’activité municipale des élus puis le rôle du PCF lors du Front populaire.

La présence d’une importance classe ouvrière acquise en partie aux idées socialistes, avant « la Grande Guerre » semble s’imposer, dans l’enracinement communiste ou du moins comme un atout fondamental. L’effacement de la SFIO, puis l’expérience municipale de 1926 à 1929, lui permet de se présenter, dans un second temps, comme la seule alternative face à la droite, malgré son isolement politique jusqu’au Front populaire et en dépit des revers électoraux de 1929 et 1932.

Cette ville demeure donc, dans l’entre-deux-guerres, une des positions fortes du PCF, dans le département de Seine et Marne. Mais seule son adaptation aux réalités monterelaises, marquées par le déclin de l’industrie ancienne, le chômage latent accentué par la crise économique de 1931, lui a permis de consolider durablement son audience et de progresser.

GODINEAU Robert, Imprimerie, travail et culture : les activités culturelles proposées par le Comité central d’entreprise et le Comité d’établissement de la néogravure, 1946-1978, Maîtrise [Antoine Prost, Jacques Girault, Jean-Louis Robert], Univ. Paris 1 CRHMSS, 1982, 209 p.

Mon mémoire de maîtrise s’intitule : « L’activité culturelle du CCE de la néogravure de 1945 à 1978. » J’étudie cette activité culturelle à travers les archives, que j’ai classées, mais pas uniquement à travers elles. En effet, les documents liés aux activités culturelles sont finalement très rares dans le fonds d’archives déposé au CRHMSS : on n’y trouve même pas le catalogue de la bibliothèque (au hasard des entretiens, j’ai finalement retrouvé le catalogue d’Issy et de Corbeil). Il m’a donc fallu procéder à plusieurs interviews que j’ai voulu le plus diversifiés possible (membres du CCE, secrétaires de commissions Loisirs et Culture dans différents CE, bibliothécaire, membres de la direction, responsables d’organismes culturels, etc.). J’ai essayé de voir, dans mon étude, s’il y a eu, de 1945 à 1978, une évolution dans le rapport de l’ouvrier à la culture : autrement dit, si la proximité matérielle de la culture (bibliothèque sur les lieux du travail, sortie au spectacle prise en charge, dans tous les sens du terme, par le CCE, etc.) a rendu cette dernière moins imposante ou si elle reste encore un monde que les ouvriers n’arrivent pas à reconnaître comme le leur. Je m’intéresse aussi au problème particulier du discours sur la culture : les ouvriers de la néogravure sont des ouvriers du Livre bien particuliers : ils impriment des périodiques dont on dénonce souvent l’aspect abrutissant. Le discours sur la culture va-t-il s’en ressentir ? Évitera-t-on de parler d’une culture abrutissante ? Y aura-t-il un discours sur la culture plus « ouvrier du Livre » que « cégétiste », ou bien le contraire ? Et le discours lui-même… sera-t-il autre chose qu’un discours ? Les questions sont posées, les réponses pas toujours données. Les archives sont pauvres en documents culturels — et notamment en documents remontant aux années 1950, voire 1960 — mais elles m’ont fait étudier un problème bien particulier : l’activité culturelle d’un CE qui, par ailleurs, doit lutter pour la sauvegarde des emplois, de tous les emplois ; il faut souligner ainsi l’importance que j’accorde à la période de crise de la néogravure 1974-1978, période qui suit une époque où, après plusieurs années d’expérience, les élus commençaient à mieux maîtriser le problème culturel, mais aussi période où on utilisait d’abord son énergie pour la sauvegarde de l’emploi.

J’essaie donc d’étudier l’influence d’un Comité d’entreprise dans le rapport des ouvriers à la culture. Remplace-t-il l’Université, voire l’enseignement secondaire, que ne connaît pas la classe ouvrière ? Ses ambitions sont-elles autres que d’essayer de distraire l’ouvrier ? Et finalement, la préoccupation culturelle est-elle primordiale et peut-elle l’être ?

GOURSAT Anne et CONAN Mireille, L’École de la RATP et le Centre de formation des apprentis de la SNCF, Maîtrise [Antoine Prost], Univ. Paris 1 CRHMSS, 1982, 235 p.

Ce mémoire présente l’étude de deux écoles d’entreprise, celle de la SNCF et celle de la RATP.

Après un bref aperçu historique sur leur origine, il en suit l’évolution depuis 1945.

L’origine sociale et scolaire des apprentis, leur âge, leur nombre, leurs motivations occupent une place privilégiée. Puis l’accent est mis sur leurs résultats et leur progression professionnelle ultérieure. La description de la vie scolaire, de l’organisation des études et du fonctionnement administratif permet de saisir l’esprit qui anime ces écoles et de dégager les grandes orientations pédagogiques qui ont présidé à leur évolution.

En dernier lieu, le mémoire établit un parallèle entre les deux écoles en faisant ressortir les ressemblances et les différences : l’une devenant, à partir de 1971, une école technique privée, l’autre en choisissant le statut de CFA (Centre de formation des adultes).

JAMILLOUX Jean-Jacques, L’Union des syndicats de la Seine (CGTU) de 1922 à 1925, Maîtrise [Antoine Prost, Jean-Louis Robert], Univ. Paris 1 CRHMSS, 1982, 179 p. + annexes

Cette étude envisage l’Union des syndicats de la Seine CGTU depuis le lendemain de la scission syndicale, effective en janvier 1922, jusqu’au début de 1925 : elle se transforme alors en Union des syndicats de la Région parisienne.

Durant cette période, s’affrontent dans l’Union, comme dans la Confédération, des tendances qui peuvent se résumer en deux principales : les « syndicalistes communistes » de plus en plus proches du PCF et les syndicalistes révolutionnaires dits « purs », proches des conceptions anarchistes. Le Congrès de l’Union de 1925 constate précisément la déroute de cette dernière tendance, concrétisée par le départ en octobre 1924 des militants qui l’animaient. Un des buts de cette étude est d’analyser comment s’est préparée cette rupture et d’essayer de mieux cerner les contours des tendances.

D’autre part, elle présente une Union départementale aux prises avec des problèmes classiques (organisation des luttes, propagande, recrutement), mais aussi spécifiques à la période (afflux de main-d’œuvre immigrée, projet de loi d’assurance sociale, fascisme) ou à la région (croissance de l’agglomération parisienne). Quel type de réponse — attitude traditionnelle ou pratique nouvelle — y a été apporté ? C’est également ce à quoi cette étude a tenté de répondre.

LUCAS Catherine, Un organe de la presse fasciste italienne en France : Il pensiero latino, 1925-1927, Maîtrise [Antoine Prost, Jacques Girault, Philippe Gut], Univ. Paris 1 CRHMSS, 1982, 181 p. + annexes

Le Pensiero latino, « organe hebdomadaire pour l’union franco-italienne et des peuples latins » paraît le 2 décembre 1925 à Nice et dans le Sud-Est, région où résident de nombreux Italiens.

Une grande partie du journal est consacré à justifier la politique menée par les fascistes à l’intérieur de l’Italie. Le pensiero latino se livre également à une critique très violente des antifascistes réfugiés en France.

Giuseppe Torre, le directeur, essaie par l’intermédiaire de son journal de s’implanter dans la colonie italienne de la région en essayant en vain d’y créer une école et une Chambre de commerce italiennes, en fascisant les associations italiennes et en créant des liens entre ces dernières et les associations des villes frontière italiennes.

La polémique qui, tout au long de l’année 1926, oppose le Pensiero latino et la France de Nice et du Sud-Est, journal local qui ouvre ses colonnes aux antifascistes, crée un climat de tension parmi la population du Sud-Est qui inquiète beaucoup les autorités françaises. Elles hésitent cependant à interdire le Pensiero latino et à expulser son directeur de crainte de déplaire à Mussolini. Elles se voient contraintes à prendre ces mesures à la suite de l’affaire Newton Canovi.

MICHEL Alain, Les Eclaireurs Israélites de France pendant la Seconde Guerre mondiale, septembre 1939-septembre 1944 : action et révolution, Maîtrise [Antoine Prost, Michel Launay], Univ. Paris 1 CRHMSS, 1982, 136 p. + annexes

Mouvement de scoutisme juif fondé en 1923 par R. Gamzon, les Eclaireurs Israélites de France sont le produit de la rencontre entre différents courants de la jeunesse juive en France, dont les enracinements vis-à-vis du judaïsme traditionnel comme le sionisme sont souvent fonction d’une immigration plus ou moins récente.

Après avoir décrit la genèse de sa formation, le mémoire illustre la manière dont cette association s’est adaptée à la situation provoquée d’abord par la mobilisation de septembre 1939, puis par la défaite de juin 1940 et l’occupation de la France par la Wehrmacht.

Quatre types de conséquences semblent en découler : – une élévation du niveau de culture juive par une volonté éducative de « retour aux sources », – une diversification des activités scoutes traditionnelles par la création de centres permanents (maisons d’enfants, centres professionnels ou centres agricoles), – une volonté de légalisme qui s’exprime jusqu’en 1942 par les rapports officiels entretenus avec le gouvernement de Vichy et par la participation des EIF à l’UGIF, – une remise en cause progressive du légalisme, du fait de l’accélération des événements, remise en cause qui aboutit à une action clandestine de sauvetage des enfants juifs (la « sixième ») puis, plus tardivement, à la résistance armée (Compagnie Marc Hagueneau).

L’action et l’évolution des EIF pendant cette période sont essentiellement suivies à travers les activités de la Zone Sud, un bref aperçu étant fait des activités à Paris et en Afrique du Nord. Conçu essentiellement comme une histoire intérieure, le mémoire s’appuie sur les archives du mouvement et sur les témoignages des acteurs de l’époque.

MITTERAND Marie-Hélène, le Rassemblement national-populaire de Marcel Déat, 1941-1944, Maîtrise [Antoine Prost, Michel Launay], Univ. Paris 1 CRHMSS, 1982, 183 p.

Créé en février 1941 par Marcel Déat, le « Rassemblement national-populaire » appartient à la catégorie des mouvements dits « collaborationnistes », qui s’illustrèrent sur la scène française jusqu’en 1944 en prônant inlassablement la collaboration de la France avec l’occupant, et l’alignement de ses institutions sur le totalitarisme nazi. S’il n’a suscité, jusqu’ici, aucune étude systématique, le RNP mérite pourtant d’être distingué de ses homologues et concurrents, ne serait-ce qu’en raison de la personnalité de son chef et de la relative singularité de son discours à l’intérieur du cadre imposé par une idéologie de type fasciste.

L’objet de ce mémoire est donc de reconstituer l’histoire du RNP grâce à la description de ses structures et de sa composition, à l’analyse de ses thèses principales, ainsi qu’à l’étude de sa politique et des facteurs qui en expliquent l’évolution.

Ce travail utilise des sources variées, qui peuvent être regroupées en quelques catégories principales : les mémoires inédits de Marcel Déat, tout d’abord, rédigés après la Libération dans un souci d’auto-justification ; les organes de presse dépendant du RNP (L’œuvre et le National-populaire essentiellement), ainsi que les nombreux tracts et brochures édités par le parti de 1941 à 1944 ; enfin, les rapports des correspondants départementaux de la Seconde Guerre mondiale, qui ont dépouillé les documents permettant d’évaluer de façon synthétique le nombre des adhérents du RNP, leur type de représentation socio-politique et leurs activités.

Le RNP apparaît fondamentalement comme un représentant authentique du fascisme français, tant par son organisation calquée sur le parti hitlérien, que, par son style d’action et sa vocation affirmée à devenir « parti unique ». Mais ce fascisme est resté médiocre et dérisoire, de par l’impuissance montrée par le parti de Déat à émerger comme mouvement de masse et à influer réellement sur le cours des événements.

NATAF Nicole, L’exode des juifs de Tunisie 1956-1962, Maîtrise [Antoine Prost, Michel Launay], Univ. Paris 1 CRHMSS, 1982, 129 p.

L’indépendance de la Tunisie en 1956 allait faire basculer l’équilibre précaire que la communauté juive avait tenté d’établir depuis l’installation du protectorat. Équilibre entre plusieurs valeurs, l’attachement à son sol natal, la volonté de conserver ses valeurs ancestrales et en même temps le désir de s’identifier à l’Occident par l’intermédiaire du protectorat, l’espérance de croire que celui-ci allait lui apporter une certaine promotion sociale.

Le régime de Bourguiba allait-il lui conserver cette place privilégiée que les Français lui avaient conférée ?

Dans un premier temps, il semble que même si des changements sont envisageables, le gouvernement tunisien lui fasse preuve de tolérance et d’une acceptation totale de ce groupe pourtant marginal. Cependant, très vite des problèmes vont apparaître. Problèmes extérieurs dus au conflit moyen-oriental et renforcés par des prises de position sionistes de la Communauté juive de Tunisie. Mais aussi des problèmes intérieurs dus eux en tout premier lieu à l’unité du pays. En effet, cette nécessité d’unité pouvait difficilement supporter l’existence d’un groupe qui désirait vivre sa spécificité.

Des mesures allaient donc se renforcer, mesures prises à l’encontre de la Communauté et qui allaient progressivement la priver de tout ce qui constituait sa vie quotidienne, de ce qui lui donnait son originalité.

Privés de leurs guides, des hommes qui menaient un combat pour leur existence, les Juifs préféreront quitter le pays. Aussi, dès 1958 (date de la disparition totale de la Communauté), on assiste à un premier mouvement de départs massifs. Mouvement qui se reproduira de nouveau en 1962, alors que la France et la Tunisie venaient de s’opposer dans un conflit armé à cause de la base de Bizerte. Pour rester, ils doivent comprendre qu’il faut renoncer à tout un passé.

Départs qui se feront sans réflexion dans un contexte politique et économique rempli de tensions.

Leur choix se porte en grande majorité vers la France, pays qu’ils croient connaître, avec lequel ils se sentent des attaches, mais qu’ils perçoivent en réalité à travers la société caricaturale que leur avait montrée le protectorat.

La France des Juifs Tunisiens est donc un mythe et l’apprentissage du quotidien sera difficile pour cette Communauté que rien ne préparait à la transplantation.

PATE Christian, Représentations de la guerre d’Espagne à travers les actualités cinématographiques Gaumont et Éclair, 1936-1939, Maîtrise [Antoine Prost, Michel Launay], Univ. Paris 1 CRHMSS, 1982

Un long dédain affiché par le monde savant a récemment cédé la place à la réhabilitation du film, en tant que source historique, pour la connaissance du XXe siècle. Cette certitude partagée, alliée avec les résultats éloquents des travaux pionniers existants, ont motivé l’élaboration du présent mémoire.

Le « bâti » de l’étude a été construit au moyen d’un terrain d’enquête précis : les maisons d’actualités Gaumont et Éclair, et au moyen d’une question particulière : la guerre d’Espagne.

La première partie de l’étude constitue une familiarisation documentaire. Elle s’ouvre sur une définition des différents types de documents filmiques utilisés comme supports du sujet retenu, pour se clore sur un premier ensemble d’estimations, relatifs au comportement des deux maisons par rapport à l’événement considéré sous l’angle intérêt-désintérêt.

La seconde partie de l’ouvrage concerne une étude des représentations de la guerre d’Espagne présentée par les deux maisons d’actualités.

Cet objectif semble avoir été rempli, un certain nombre d’attitudes ayant été mises à jour : ont été écartés les bouleversements trop radicaux engendrés par la Révolution, dans une certaine mesure, la participation étrangère. Enfin, un parti pris exprimé de façon voilée en faveur de la cause franquiste se manifeste au travers d’une indulgence certaine.

Partant de cet ensemble de constatations effectuées à partir des stricts messages délivrés par les bandes d’actualités, notre second objectif a été de tenter de cataloguer ces deux organes de la presse filmée sur l’échiquier politique de l’époque.

Peu prolixes sur la guerre d’Espagne, nous avons donné un ensemble d’informations valides et posées par des jalons, des pistes, pour l’étude de cette presse filmée qui reste à faire.

PETIT Olivier, Le Sous-Prolétariat parisien durant la Première Guerre mondiale, Maîtrise [Antoine Prost, Jacques Girault], Univ. Paris 1 CRHMSS, 1982, 154 p.

L’étude est organisée selon deux axes de recherche. Le premier veut établir une géographie du sous-prolétariat par quartier. Le second veut faire le point sur la politique municipale à l’égard du sous-prolétariat. Dans les deux cas, les sources, statistiques ou non, qui ont permis la recherche, sont issues des publications municipales et préfectorales.

La géographie du sous-prolétariat s’appuie sur une typologie structurelle, sur une typologie évolutive et sur leur confrontation. Il s’agit là des points forts du mémoire. On sent bien la difficulté qu’a présentée pour l’auteur l’utilisation des sources statistiques et l’on peut regretter parfois le choix de certaines méthodes.

La politique du conseil municipal est présentée dans une série de « clichés » qui permettent un tour d’horizon du problème. On peut regretter la superficialité de l’approche qui, entre autres lacunes, considère le conseil municipal sans tenir compte des personnalités et des appartenances politiques de ses membres.

Le principal défaut de ce mémoire tient à son expression pas toujours très claire et au manque de réflexion sur le problème qu’une meilleure assise bibliographique ou méthodologique aurait pu permettre.

La principale qualité de ce mémoire est de faire une première approche de la question sous de nombreux aspects : maladies, logements, natalité, mortalité, aide publique, soupe populaire, chômage, asiles de nuit, idéologie, etc.

RIVET François, Les Comités mixtes à la production 1944-1949, Maîtrise [Antoine Prost, Michel Launay], Univ. Paris 1 CRHMSS, 1982, 53 p.

Institués en mai 1944 par Fernand Grenier, Commissaire à l’Air en AFN, les Comités mixtes à la production sont implantés en métropole par Charles Tillon à partir de 1945. Cependant, dès septembre 1944, à l’issue de l’Accord de Toulouse, voit le jour dans le Sud-Ouest de la France, une structure à mi-chemin entre les CMP et les Comités de Gestion.

Mis en place dans l’aéronautique, puis dans tout le secteur de l’armement en 1946, les CMP seront cette même année institués par Marcel Paul, dans l’entreprise nationalisée EDF-GDF. Dotés d’attribution essentiellement techniques, les CMP ont avant tout pour but, dans une période de reconstruction économique, d’accroître la production par la mobilisation et la confrontation des expériences et du savoir de chacun dont la prise en compte est garantie par l’existence d’une procédure d’appel permettant de porter un désaccord devant une instance supérieure.

Créés dans l’enthousiasme, les CMP vont cependant se heurter à la méfiance d’une partie de l’encadrement et pâtir du manque de formation des militants syndicalistes. La mise en place des CE dont les attributions plus étendues, bien que plus consultatives, répondaient mieux aux difficultés du moment, se fera dans nombre de cas, au détriment des CMP, qui ne vont subsister que dans les établissements d’État travaillant pour l’armement, et à EDF-GDF.

TOURRET Marc, L’Union Sportive Métropolitaine des Transports. Monographie d’un club sportif de 1928 à 1960, Maîtrise [Antoine Prost, Jacques Girault], Univ. Paris 1 CRHMSS, juin 1982, 267 p. + annexes

Comment l’institution sociale que forme l’Union Sportive Métropolitaine des Transports a-t-elle résisté, de façon plus ou moins efficace, aux modifications structurelles qui l’affectèrent entre 1928 et 1960 ? La monographie de ce club patronal omnisport, devenu après la Libération le club d’entreprises relativement autonome de la RATP, propose de suivre ce mouvement qui cache en fait une pluralité d’évolutions dont la complexité vient moins des installations et des finances du club que des statuts juridiques, des pratiques sportives diversifiées et des mentalités originales de ses sociétaires.

Ce club, dont la croissance aboutit à un éclatement des activités et des modes de pensée de ses sportifs aux origines sociales, géographiques, politiques plus hétérogènes et parfois conflictuelles, a, paradoxalement, toujours souhaité d’être considéré comme un espace neutre délié du cadre social traditionnel. Il était donc nécessaire, mais insuffisant de décrire la seule singularité de ce milieu qui, pour en saisir la signification historique, devait aussi être toujours replacé dans son contexte.

VANLERBERGHE Sabine, Les nationalisations dans la presse syndicale confédérale de septembre 1944 à décembre 1946, Maîtrise [Antoine Prost], Univ. Paris 1 CRHMSS, 1982, 165 p.

La Libération constitue une étape importante de l’évolution du syndicalisme ouvrier sur la question des nationalisations. C’est à la Libération que l’ensemble des composantes du syndicalisme ouvrier se rallie à l’idée de nationalisation. Par ailleurs, c’est une période où les nationalisations deviennent une réalité économique.

La lecture de la presse syndicale permet de saisir l’importance des nationalisations en tant que thème revendicatif. Celle-ci varie en fonction de l’agenda parlementaire, de l’actualité syndicale et des événements politiques. L’analyse des articles a permis, d’autre part, de préciser quelles étaient les idées dominantes justifiant les nationalisations : dénonciation du pouvoir des trusts, argument force autour duquel s’organisent les autres thèmes ; élargissement de la démocratie à l’économie, non seulement au sein de l’entreprise, mais aussi au niveau national ; développement économique auquel est liée la revendication d’une planification de l’économie.

Il convient de souligner l’opposition fondamentale entre la CGT et la CFDT sur la stratégie syndicale qui doit permettre l’émancipation ouvrière. Dans la perspective d’une transformation des structures économiques, condition de cette émancipation, la CGT lie la défense des intérêts économiques des travailleurs à celle de leurs intérêts politiques. Par contre, la CFTC refuse cette politisation de l’action syndicale et entend réaliser l’émancipation ouvrière par une évolution du statut des travailleurs dans l’entreprise, sur la base de la co-gestion et de la co-propriété.

WAUTIER Delphine, L’image de la femme à travers la caricature des grands quotidiens (janvier 1914-juin 1919), Maîtrise [Antoine Prost, Jean-Louis Robert], Univ. Paris 1 CRHMSS, 1982, 153 p.

Ce mémoire étudie les caricatures des cinq quotidiens dont le tirage est le plus important dans la période : Le Petit Parisien, Le Journal, Le Petit Journal, Le Matin, L’Intransigeant. Y ont été révélés environ mille dessins dans lesquels apparaissent des personnages féminins.

Il existe de janvier 1914 à juin 1919 deux types d’illustrations :

Dans le premier cas, il s’agit d’un dessin d’humour largement misogyne qui met en scène des personnages féminins comiques et conventionnels destinés à faire rire ççpar leur physique et leur comportement. Ce genre de dessin est le seul représenté avant la guerre et se situe la plupart du temps dans le cadre des rubriques comiques ; il se maintient pendant le conflit et revient en force dès la fin des hostilités.

En revanche, la guerre donne naissance à un type d’illustrations très différentes qui n’ont plus comme fonction première un rôle humoristique ; il s’agit d’un dessin de propagande à caractère symbolique et politique : la femme y est dotée d’un rôle de premier plan.

Ces deux types de dessins de mêlent durant le conflit, mais il semblerait que dès la fin de la guerre, les journaux réutilisent l’iconographie d’avant les hostilités pour représenter les personnages féminins.

1981

BENTABET Fathi, RODIER Catherine, L’immigration algérienne et l’Hôpital franco-musulman, dans la région parisienne, entre les deux guerres (1915-1947), Maîtrise [Antoine Prost, Jacques Girault], Univ. Paris 1 CRHMSS, 1981, 296 p.

Cette étude tente de dégager la situation sociale de l’immigration algérienne en région parisienne dans l’entre-deux-guerres. Après avoir établi le nombre approximatif des Algériens et leur répartition géographique, nous décrivons leurs conditions de vie, celles d’une main-d’œuvre coloniale, à travers trois problèmes insolubles pendant toute la période : le travail, le logement et les maladies.

Pour répondre à cette situation, le Conseil municipal de Paris, après accord préalable du gouvernement, propose la création d’un service s’occupant exclusivement des Algériens. En mars 1925, un arrêté du préfet de Police crée le « Service de surveillance et de protection des indigènes nord-africains », appelé par les contemporains « la rue Leconte ».

Ce service, divisé en deux sections, l’une de surveillance (administration, police), l’autre d’assistance (médico-sociale) est mis en place progressivement. Parallèlement, la branche administrative et policière prend peu à peu le contrôle de la section d’assistance puis de toutes les affaires concernant l’immigration.

Pour couronner cette « politique coloniale », le Conseil municipal de Paris et le département de la Seine, avec la participation de l’État, de la colonie, inaugurent en 1935 l’Hôpital franco-musulman de Bobigny qui devait, avec le cimetière un peu plus tard, susciter une lutte directe entre l’État et la municipalité communiste.

Ces créations ne répondent pas aux nécessités du moment, elles restent très en deçà des besoins réels de l’immigration.

La politique est privilégiée sur le social : l’infrastructure médico-sociale (administration, dispensaires, foyers, bureaux de placement, hôpital, cimetière…) ne sert qu’à mieux encadrer, mieux pénétrer dans la masse ouvrière pour une répression plus efficace.

BESNARD Thierry, Le Socialiste (1885-1905), journal guesdiste, Maîtrise [Jacques Girault, Antoine Prost], Univ. Paris 1 CRHMSS, 1981, 244 p.

Le Socialiste, feuille confidentielle et sans moyens, est confronté durant vingt ans aux problèmes classiques des journaux socialistes des débuts de la IIIe République : le manque de succès et de notoriété et la concurrence tyrannique de la grande presse, le problème du choix de l’adoption d’un langage et d’un vocabulaire révolutionnaire, auxquels il faut ajouter la difficulté pour un journal de se situer et d’évoluer dans le créneau nouveau des organes de partis politiques. Il ne parvient pas à y répondre d’une manière véritablement originale malgré des efforts pédagogiques et doctrinaux particulièrement appréciables. Mais la fonction de l’historien n’est ni celle d’un moraliste ni celle d’un censeur. Le bénéfice que l’on peut tirer de l’étude du Socialiste tient dans le fait qu’il est le porte-parole privilégié de la vie et de l’action du POF. Certes, le décalage traditionnel qui existe entre la praxis d’un parti politique et la voix dont elle use pour s’exprimer n’est pas entièrement surmonté, mais le journal reflète bien les aléas, les hésitations, les va-et-vient de l’engagement politique du POF, son incapacité à concilier son hérédité marxiste et la réalité socio-économique très diversifiée de la société française. L’impasse théorique à laquelle il aboutit à sa correspondance dans l’échec pratique du guesdisme comme parti de la classe ouvrière.

Outre une étude générale portant sur les rubriques du Socialiste, ce mémoire étudie plus particulièrement la révolution russe de 1905 telle qu’elle transparaît à travers les colonnes du journal.

BRIDEY Patrick, Monographie communale : sur l’activité des communistes à Antony, de la Libération à 1962, Maîtrise [Antoine Prost, Jacques Girault], Univ. Paris 1 CRHMSS, octobre 1981, 211 p.

Antony, petite ville de la banlieue de Paris, située à l’extrême sud du département de la Seine de l’époque, connut une croissance démographique qui devait modifier la nature sociologique de sa population : la vie municipale n’allait-elle pas s’en trouver changée ? L’évolution politique d’une commune n’est pas seulement le reflet de l’évolution de la nature de sa population. L’exemple d’Antony permet de saisir la complexité des facteurs qui conditionnent la vie municipale : personnalités locales, problème de génération militante, impact d’une situation militante particulière (guerre froide, etc.), construction d’un complexe résidentiel étudiant.

Durant cette période (1944-1962), les rapports de la section du Parti communiste d’Antony avec celle de la SFIO évoluèrent sans que jamais le rôle primordial des communistes s’en trouve affecté : peu investis dans la vie municipale avant la guerre, les communistes furent cependant élus pour diriger la Commune à la Libération. En 1955, ils ne s’associèrent pas à la SFIO pour élire un maire socialiste, mais cependant, une entente devait se conclure lors des Municipales de 1959. Durant cette période (1944-1962), l’audience électorale déclinait, et cela, malgré le réservoir militant que représentait la Résidence universitaire d’Antony.

Les causes des succès et des échecs des communistes d’Antony permettent-elles de comprendre la vie politique d’autres communes ? Sans s’ériger en modèle, le cas d’Antony permet de répondre partiellement à la question.

CAUBET Antoine, Avant-gardes culturelles et avant-garde politique en France dans les années 1920, Maîtrise [Antoine Prost, Jacques Girault, Claude Willard], Univ. Paris 1 CRHMSS, octobre 1981, 205 p.

Culture, idéologie, théorie, politique : comment s’essayer à une histoire de ces lieux aux contours mal définis, aux rapports indécis et le plus souvent confus ? Ces catégories s’articulent et se confrontent violemment au cours des périodes de ruptures ou de bouleversements : les « années vingt », les « Années folles » étaient un temps particulièrement foisonnant en « avant-gardes » culturelles — autre notion à caractériser — qui se trouvèrent face à une autre avant-garde, politique cette fois : la SFIC.

Certes les surréalistes retiennent souvent l’attention en ces débats d’après-guerre ; certes la littérature joue un rôle central dans les évolutions intellectuelles et culturelles en France. Pourtant existent en ces années d’autres groupes, dont un — le groupe « Philosophies » — qui s’essaie à un « Renouveau de la philosophie », qui résolument se met aux côtés des avant-gardes culturelles du temps. Or, qui dit avant-garde résume une violente volonté de rupture avec un passé, idéologique et culturel ici.

À ne prendre cette notion d’avant-garde qu’en un sens fort strict, l’histoire du groupe serait un échec : sur le terrain de la pratique théorique, l’activité du groupe est largement enserrée dans un dispositif philosophique bien gardé, celui de la « philosophie officielle », celle de Bergson, Lavelle, Hamelin… Dans une dialectique sans cesse mouvante, le groupe se révolte contre une philosophie qui est pourtant le seul terrain possible de sa pratique. Et c’est à travers ce combat que s’ébauche une vision globale de la culture, de la politique : cette vision est en même temps stratégie politique et ouvre la voie à une politique effective. L’année 1925 est à ce point de vue un pivot essentiel, tant pour les surréalistes que pour les philosophes qui se tournent alors vers le Parti communiste. Ce passage au communisme entraîne nouvelles questions, nouvelles pratiques et rend problématique l’existence du groupe, jusqu’à son éclatement.

Cet essai voudrait montrer qu’aucune cloison étanche ne sépare « culture, idéologie et politique », mais en même temps que ces trois catégories sont fort loin de se résumer les unes aux autres, elles se renouvellent et s’articulent en des dispositifs jamais innocents chez les intellectuels.

CASSARD Jean-Pierre, Les militants trotskystes français pendant la 2e guerre mondiale : septembre 1939-1944, Maîtrise [Antoine Prost], Univ. Paris 1 CRHMSS, 1981, 202 p.

Ce travail de recherche porte sur une période peu connue de l’histoire du trotskysme en France. Il ne prétend pas être une histoire du trotskysme pendant la guerre, mais plutôt une contribution à cette histoire.

La recherche historique reste ouverte même si ce travail a bénéficié de l’apport très important des archives du Centre d’études et de re­cherches sur les mouvements trotskystes et révolutionnaires internationaux (88, rue Saint-Denis, 75010, Paris).

La place des trotskystes reste encore à étudier dans les auberges de jeunesse, leur intervention régionale ou dans les usines, ou même dans le milieu étudiant.

Les militants trotskystes et leurs organisations à la veille de la Deuxième Guerre mondiale sont extrêmement faibles et divisés. L’étude porte sur leur intervention dans la classe ouvrière pour leur maintien pendant la drôle de guerre en tant qu’organisations trotskystes dans une période où la SFIO rallie la Défense nationale et le PCF la politique du pacte germano-soviétique, après la défaite de la France et l’occupation partielle qu’elle subit par les armées nazies, cette maîtrise rapporte l’activité des deux principales organisations trotskystes françaises en liaison avec la question nationale, la Charte du travail, l’intervention dans les syndicats, etc.

Le 22 juin 1941 met fin au pacte germano-soviétique. Le PCF anime la résistance patriotique. Les positions politiques des trotskystes s’éclaircissent : défense inconditionnelle de l’URSS, mais aussi aucune alliance avec la Résistance dominée par la bourgeoisie gaulliste. Le STO, les déportations en Allemagne et la résistance de la classe ouvrière, la défaite de Stalingrad pour les armées allemandes, ouvrent une période de mobilisation de la classe ouvrière. Cette maîtrise traite de ce que furent les positions des trotskystes sur les réponses à apporter à la radicalisation des ouvriers en France et en Europe. C’est-à-dire la discussion pour l’unification des organisations trotskystes françaises au sein du PCI en mars 1944, et leur tactique pour s’implanter dans la classe ouvrière avec les Groupes ouvriers du CCI, et le Front ouvrier du POI.

Ce travail traite aussi l’un des aspects les plus controversés de l’activité des trotskystes, à savoir le travail de fraternisation engagé en direction des ouvriers allemands sous l’uniforme. Alors que le PCF et l’ensemble de la Résistance développaient une politique chauvine, concentrée dans le mot d’ordre « Mort aux boches ! », il essaie de montrer enfin la place des trotskystes en France pendant la Deuxième Guerre en prenant en compte la politique du PCF, principal parti ouvrier.

CHAUBET François, Marcel Déat et la SFIO, Maîtrise [Antoine Prost], Univ. Paris 1 CRHMSS, 1981, 122 p.

Ce mémoire présente une biographie qui s’appuie sur les Mémoires de Marcel Déat, récemment ouverts aux chercheurs, sur un éventail de sources imprimées (archives de congrès, presse socialiste et radicale pour une petite partie).

Elles nous ont permis de suivre la trajectoire de Marcel Déat de 1926 à 1933, date à laquelle il est exclu, après avoir occupé une place importante au sein de la SFIO.

Cet agrégé de philosophie, d’abord spécialiste des problèmes de la culture, en vient à dégager progressivement une philosophie de l’action politique, inspirée du réformisme.

Nous avons observé les conflits qui opposaient entre elles les diverses tendances de la SFIO Déat, qui agissait à l’intérieur de la tendance droitière du parti, a été victime de l’exacerbation des oppositions entre les courants, tout comme son ambition personnelle qui le poussait vers la dissidence.

DARGENT Claude, Étude lexicale comparée d’éditoriaux de journaux de droite dans les années trente en France, Maîtrise [Antoine Prost], Univ. Paris 1 CRHMSS, 1981, 160 p.

Le but de ce mémoire était de trouver, à l’aide d’une étude lexicale, des indices tangibles et mesurables aux oppositions et aux points de convergences politiques de quatre quotidiens de droite. On a retenu L’Action Française, L’Aube, La Croix et L’Écho de Paris, qui sont étudiés dans une double perspective diachronique et synchronique au long des années trente.

Après avoir mesuré la part de sa première page que chaque journal consacre à chacun des grands domaines de l’actualité, on a surtout étudié de manière quantitative et qualitative l’emploi d’un lexique de douze termes dans les éditoriaux des quatre quotidiens.

La « marche vers la guerre » tout d’abord se lit aisément de 1933 à 1939 ; les caractères propres de chaque journal sont particulièrement accusés dans cette décennie de crises.

Au plan synchronique ensuite, les caractéristiques de chaque quotidien sont claires. L’Aube est surtout préoccupée par les réformes de société et par la justice dans les rapports internationaux. La Croix a une conception très conservatrice de la société, mais a renoncé au discours nationaliste. L’Écho de Paris recherche surtout de « bonnes élections » qui aideront à la conservation de la société. L’Action Française se distingue par un nationalisme violent et une nostalgie exprimée à maintes reprises de la France d’Ancien Régime. Or, si les caractères propres de L’Aube et de La Croix étaient assez apparents a priori, il n’en allait pas de même des différences entre L’Écho de Paris et L’Action Française.

DENIS-MORILLON Agnès, Les femmes et le syndicalisme dans la Fédération CGT de l’habillement (1936-1946), Maîtrise [Jacques Droz, Antoine Prost, Jean-Louis Robert], Univ. Paris 1 CRHMSS, 1981, 268 p.

Cette étude constitue la suite du mémoire de Françoise Blum, Féminisme et syndicalisme : les femmes dans la Fédération de l’Habillement [Jacques Droz, Jean-Louis Robert], Univ. Paris 1 CRHMSS, 1977, 205 p.

Françoise Blum avait travaillé sur la période allant de 1914 à 1935, nos recherches ont porté sur les années 1936-1946.

Cette étude montre les rapports des femmes et du syndicalisme dans la Fédération CGT de l’Habillement de 1936 à 1946 (rappelons le caractère essentiellement féminin de la main-d’œuvre dans cette branche d’activité).

À cette époque, les ouvrières de l’habillement prirent part aux luttes de la classe ouvrière. En 1936, elles participèrent au vaste mouvement de grèves, pendant l’occupation, de nombreuses ouvrières aidèrent la Résistance ; certaines militantes vécurent dans la clandes­tinité. Pendant les années du Front populaire et à la Libération, l’insertion des femmes dans l’organisation syndicale s’améliorait, mais elle posait toujours des problèmes. D’une manière générale, la syndicalisation dans l’habillement progressait ; elle restait cepen­dant relativement très faible. Si les femmes étaient devenues plus nombreuses dans l’organisation syndicale après les grèves de 1936, elles gardaient un rôle mineur dans la vie de la Fédération avant la guerre. À la Libération, la situation change ; des femmes occupent des postes de direction, les discours des militantes deviennent plus féministes, alors que les femmes ont acquis le droit de vote.

L’histoire de la Fédération CGT de l’Habillement est aussi retracée dans ce mémoire. En outre, l’auteur évoque l’évolution de l’industrie de l’habillement et de la situation des ouvrières de 1936 à 1946.

GARDAIX Gilles, Les CEMEA, mouvement d’éducation. Esquisse d’une époque, 1945-1957, Maîtrise [Antoine Prost, Jacques Girault, Claude Willard], Univ. Paris 1 CRHMSS, 1981, 156 p.

1945-1957, la France se reconstruit, elle cherche de nouvelles voies dont l’action culturelle en sera le symbole. Ce travail essaie de montrer ce qu’est un mouvement d’éducation populaire, comment il a pu naître, quels liens existent entre ce mouvement et le monde ouvrier, comment il s’est inscrit dans une politique et comment il en fut marginalisé par une certaine politique.

Mais faire l’histoire des CEMEA ne se dissocie pas de celle de l’Éducation nouvelle. Ceci est capital pour comprendre l’esprit de l’époque. Mais faire cette histoire, c’est aussi analyser et comprendre la place que prend l’enfant dans notre société dès 1945. Vacances des enfants, école, centre aéré, allocations familiales, etc.

Élaboré pour l’essentiel à partie de la revue des CEMEA, Vers l’Éducation nouvelle, ce travail permettait de reconstituer les stages de 1945 à 1957 organisés par les CEMEA et l’évolution de leur activité.

LECLERCQ Franck, L’Humanité et le gouvernement en 1947, Maîtrise [Antoine Prost], Univ. Paris 1 CRHMSS, 1981, 178 p. + annexes

Dans l’histoire du Parti communiste français, la période de l’après-guerre est la plus déterminante, politiquement.

Ainsi, le Parti communiste, après une participation gouvernementale, jusqu’au mois de mai, se fait évincer. Dès lors, il s’agit, à partir d’une lecture exclusive de l’Humanité, d’apprécier comment et de quelle façon le Parti communiste réagit et analyse cette nouvelle situation et ce qui l’a rendue possible, en distinguant les trois moments de cette année : pendant la présence des communistes au gouvernement, puis leur révocation pour aboutir, en novembre-décembre 1947, à une opposition radicale et définitive.

LECOQ Dominique, La politique de construction des organismes de HLM en région parisienne de 1945 à nos jours, Maîtrise [Antoine Prost], Univ. Paris 1 CRHMSS, 1981, 133 p. + annexes

Les tentatives de mise en place d’une structure d’habitation destinée aux couches les plus défavorisées de la société, appelée « habitation à bon marché » puis « habitation à loyer modéré », ne connaîtra un réel développement qu’au début des années soixante.

L’aide de l’État dans le secteur HLM se transforme face aux nouvelles structures économiques. Les conséquences de cette politique se traduisent, pour les organismes HLM, par une augmentation des charges financières diminuant le nombre et la qualité des logements construits.

Les difficultés rencontrées par les organismes HLM ont orienté leur construction, d’une part vers les zones hors agglomération parisienne et d’autre part vers les catégories socio-professionnelles les moins défavorisées. Ainsi la diminution du nombre de logements HLM et leur destination effacent le caractère social du secteur HLM.

LEFRANÇOIS Catherine, L’opinion publique en Seine Inférieure sous l’occupation (juin 1940 – septembre 1944), Maîtrise [Antoine Prost], Univ. Paris 1 CRHMSS, 1981, 326 p.

L’objectif, qui est de démonter les mécanismes d’évolution de l’opinion publique, implique un plan chronologique.

• Dans un premier temps, l’opinion subissant le choc de la défaite et de l’occupation, s’en remet à un sauveur providentiel : l’image que l’opinion se forme de Pétain coïncide avec celle que Pétain donne de lui.

• La défection vis-à-vis du régime naît en juin 1941 de l’impact de l’entrée en guerre de l’URSS, qui révèle une des bases idéologiques de la Révolution nationale : l’anticommunisme. Celui-ci, à la fois, rapproche ceux que le pacte germano-soviétique avait éloignés de la collaboration, et pousse dans la Résistance tous ceux qui souhaitent la victoire de l’Armée Rouge. Les difficultés économiques, la relève, les sanctions contre l’ensemble de la population vont directement concerner l’opinion publique et l’obliger à sortir de sa réserve. Le processus d’éclaircissement au sein de l’opinion est irréversible à partir de novembre 1942 : il s’agit alors de démonter les méca­nismes qui permettent au courant de la Résistance d’influer sur le cours de l’opinion. La certitude de la victoire alliée regroupe, à partir de juillet 1943 (débarquement anglo-américain en Sicile), la majorité de l’opinion qui, après une phase de repli, due à l’attente du débarquement en France, exprime son adhésion à la Résistance par le vote de 1945.

Ce travail montre que l’évolution de l’opinion n’est pas linéaire, mais discontinue, et qu’elle s’explique par l’impact prédominant sur la vie quotidienne des phénomènes économiques, tout autant que par les événements extérieurs. Le retournement de l’opinion s’éclaire en dé­couvrant que, dès novembre 1940, l’adhésion au maréchal Pétain se fis­surait, cependant que le général de Gaulle ne fait pas l’unanimité en août 1944.

MENAGE Jean-Pierre, Les majoritaires de la CGT et la Révolution russe, 1917-1923, Maîtrise [Jean-Louis Robert], Univ. Paris 1 CRHMSS, 1981, 233 p.

Cette étude, qui repose sur la presse et les sources imprimées, se divise en deux parties chronologiques aux traits spécifiques. Entre mars 1917 et l’été 1920, les commentaires des majoritaires de guerre sur la Révolution russe sont inspirés avant tout par un réflexe national et patriotique. L’attitude majoritaire face à février, face à octobre, ou face à l’intervention alliée, est d’abord fonction des circonstances politiques françaises et de la situation des majoritaires dans la Confédération. La Révolution russe est moins perçue comme phénomène social que comme phénomène national. Dans ces conditions, le bolchevisme est moins évalué comme doctrine que comme politique. Sur le plan théorique cependant, ce dernier est réfuté parce qu’il est en rupture avec la forme de marxisme héritée de la IIe internationale, parce qu’il apparaît, dans sa doctrine comme dans ses manifestations politiques, comme un contresens historique. Cette idée est au centre de toute l’argumentation majoritaire depuis au moins 1918.

Entre l’été 1920 et la fin 1923, les responsables syndicalistes majoritaires réagissent contre le bolchevisme, d’abord parce qu’au travers de la propagande de l’Internationale communiste et des échos qu’elle rencontre parmi les minoritaires, c’est l’existence et la raison d’être de la Confédération qu’ils jugent mises en cause. Ils s’emploient dès lors à situer le débat fondamental qui secoue la CGT sur le seul terrain qu’ils maîtrisent : celui du syndicalisme. Ils opposent l’objectif des réalités soviétiques au subjectif des discours politiques de l’Internationale communiste, ils tentent de redéfinir l’identité confédérale en posant la contradiction du bolchevisme et du syndicalisme. Ils se révèlent ainsi incapables d’assumer les remises en cause que le bolchevisme impose dans un processus entièrement nouveau et revendiqué comme tel. La scission dans la CGT, la NEP en Russie, marquent chacun à leur manière, un terme à la grande crise ouverte en 1920-1921. Les commentaires majoritaires peuvent alors se permettre de fournir une première critique élaborée du bolchevisme et de l’expérience soviétique.

MERABTI Nora, Le Syndicat national des instituteurs et la guerre d’Algérie, Maîtrise [Antoine Prost, Jacques Girault], Univ. Paris 1 CRHMSS, 1981, 124 p.

La décolonisation ne pouvait manquer de poser des problèmes à tous les citoyens et à toutes les organisations, qu’elles soient politiques ou syndicales.

Le Syndicat national des instituteurs, de par l’importance de ses effectifs et la place qu’occupent l’école primaire et ses maîtres au sein de la société coloniale, était le plus à même de réagir au sein du corps enseignant, face au problème colonial.

Depuis la fin de la guerre mondiale, qui voit l’éveil des nationalismes dans les colonies, le SNI, comme l’enseignement des enseignants, ne cessera lors de ses congrès d’affirmer l’attachement des instituteurs à la défense des droits des peuples à disposer d’eux-mêmes. Cependant, ce qui ressort des prises de position de la majorité autonome, est une ignorance de la violence de la colonisation et, par voie de conséquence, de la décolonisation. Son anticolonialisme est beaucoup plus une protestation d’ordre moral et se caractérise par une méfiance à l’égard des nationalismes. Lorsque la guerre d’Algérie éclate, le SNI réagira mollement et couvrira la « pacification » par l’armée française. Elle ne lancera aucune action directe, et sa politique sera la prudence tant que dureront les événements.

MICHELET Stéphane, L’exclusion de la Section française de la Quatrième Internationale, Maîtrise [Antoine Prost], Univ. Paris 1 CRHMSS, 1981, 288 p.

Ce travail a été réalisé à partir de la revue Quatrième Internationale et surtout à partir des bulletins intérieurs du Parti communiste internationaliste (Section française de la Quatrième Internationale) de l950 à 1952. Il est essentiellement organisé suivant deux axes :

• une étude de la Quatrième Internationale, de son fonctionnement au début des années cinquante ;

• le déroulement de la scission dans la Section française puis son exclusion de la Quatrième Internationale.

L’introduction commence par une brève étude sur un sujet jusqu’ici peu exploité : l’étude du trotskysme après Trotski qui est un résumé de l’histoire de la Quatrième Internationale avant 1950, résumé succinct, mais nécessaire

L’ouvrage se divise en trois parties : une première partie est une étude de l’implantation et du fonctionnement de la Quatrième Internationale en 1950 ; la seconde est une étude des textes qui sont à l’origine des clivages politiques qui ont engendré la scission du PCI, textes disponibles dans les bulletins intérieurs de l’Internationale ; la troisième porte sur le déroulement des débats au sein du PCI puis de la scission, de 1950 à 1952.

La position du S.I. obligeant les militants du PCI à entrer dans les organisations du PCF, représentait un tel désaveu de l’action antérieure des militants trotskystes français, que la majorité du PCI après s’être prêtée à des compromis, devait finalement s’y refuser. Une scission s’ensuivit dont les conséquences affectent durablement le mouvement trotskyste.

La conclusion de l’ouvrage porte sur les conséquences politiques et organisationnelles que va avoir cette exclusion de l’Internationale.

MICHON Pascal, Recherches sur l’idéologie de la Nouvelle Revue française de 1919 à 1924, Maîtrise [Antoine Prost], Univ. Paris 1 CRHMSS, 1981, 179 p.

En 1919, la NRF, née dans les dernières années de l’avant-guerre, n’est encore qu’une jeune revue dont le succès n’est pas assuré. Les années vingt verront fleurir cette « rose des vents », comme l’appelait François Mauriac, véritable centre idéologique et culturel qui irriguera la pensée française, voire européenne, pendant tout l’entre­deux-guerres.

Cette recherche se donne comme une analyse sur un cas précis de ce que l’on appelle l’humanisme, analyse de sa structure et de son fonctionnement, mais aussi des enjeux politiques qu’il recèle et des stratégies qu’il a dû mettre en œuvre pour affermir son hégémonie idéologique au cours des premières années de l’après-guerre. Tour à tour les rapports avec Proust, Freud, le Dadaïsme, Bergson ou l’Action française, viennent décrire une géographie idéologique — et politi­que — des années vingt.

Cette étude se voudrait donc une contribution à l’histoire des idéologies dont elle analyse le fonctionnement dans les pratiques mêmes auxquelles elles imposent leurs règles et desquelles elles ressortent, à leur tour, transformées. Ainsi, l’examen porte successivement sur la sociabilité, définie comme le tissu des liens interindividuels qui sous-tend une expérience en commun de la culture et de la politique, puis sur cette expérience même de lecture et d’écriture, et enfin sur le discours politique qui en a résulté. On a tenté de construire une approche « pragmatique » du politique aux dépens des analyses qui l’identifient au pouvoir d’État, l’objet étant de montrer que le pouvoir se joue en fait à tous les échelons sociaux par le biais de l’idéologie qui, fixant une image de l’homme et un emploi du langage, détermine les règles et les limites du discours de tout sujet parlant et, ce faisant, son rapport au social.

NORGUEZ Marc La stratégie du PCF en 1953, Maîtrise [Antoine Prost, Jacques Girault], Univ. Paris 1 CRHMSS, 1981, 180 p.

À l’aide des textes officiels, ce mémoire tente de suivre et de comprendre la logique et la cohérence de la stratégie politique des communistes français entre décembre 1952 et mars 1954. Il constitue également un essai de compréhension du processus d’élaboration de cette stratégie en mesurant l’influence du mouvement communiste international et l’analyse de la réalité française, dans le cadre de l’année « charnière » de la « guerre froide » qui est marquée par une relative accalmie de la tension internationale et de la mort de Staline.

Cette étude part d’une étude attentive des événements nationaux, internationaux et propres au PCF. Il apparaît vite que le PCF a une chronologie qui lui est particulière, et une vision personnelle de la réalité.

Ce caractère est confirmé dans la deuxième partie qui veut répertorier les thèmes d’intervention du PCF à la lecture, chaque semaine de l’éditorial de France nouvelle. La lecture de la réalité par le PCF amène à l’examen des grilles de lecture et nécessite le large détour de l’analyse communiste.

À ce moment quelques réflexions sont proposées à propos du dogmatisme et de l’analyse vivante.

Enfin, retour à la chronologie pour examiner l’évolution de l’action communiste, avec les distinctions entre les objectifs, l’orientation et le moyen. Ici aussi, quelques jalons sur le fonctionnement du Parti et l’« Affaire Lecoeur ».

La stratégie du PCF a déjà fait couler beaucoup d’encre : gageons que ce n’est pas terminé. Tant mieux même s’il est certain que le terrain n’est pas sûr. Raison de plus de ne pas s’y aventurer avec de fausses certitudes.

REVOL Claude, Recherche sur la vie associative et les organisations corporatistes des instituteurs de la Haute-Loire, des origines à la naissance du Syndicat national (1898-1920), Maîtrise [Antoine Prost, Jacques Girault], Univ. Paris 1 CRHMSS, 1981, 171 p. + 82 p. annexes

Fondé sur une étude attentive de la collection — complète — des bulletins de l’Amicale, ce travail met à jour la lente affirmation d’une volonté corporative des maîtres du département, substituant une vie associative d’abord centrée sur la corporation à celle qui privilégie l’environnement immédiat de l’école.

Les instituteurs de la Haute-Loire font avec l’Amicale l’apprentissage de la vie associative, ce qui permet de suivre pas à pas l’élaboration des groupements solidaristes puis de défense corporative qui annonce le puissant Syndicat national. Cette évolution semble se faire harmonieusement, mais l’étude d’archives privées, de la presse et une rupture durable au sein du personnel à l’occasion de la guerre, conduisent à une seconde lecture faisant la part d’un souci extrême d’éviter l’abord des questions susceptibles de nuire à la cohésion du bloc primaire.

La question laïque semble alors faire la spécificité du cas de la Haute-Loire. Elle n’est pas le catalyseur des efforts aboutissant à l’Amicale, les « ingérences politiques » apparaissent beaucoup plus nettement. Mais l’hostilité des cléricaux et la surveillance soupçonneuse des « républicains » provoquent un environnement extrêmement contraignant qui amène des maîtres de sensibilités différentes à cohabiter au sein d’une même association en s’efforçant de donner l’impression d’une corporation unie. Un modus vivendi est — difficilement — trouvé par le contraste entre la fermeté des positions corporatives et la prudence la plus extrême en matière de questions sociales. Les « affaires » de 1917 et la transformation en syndicat repoussent, en 1920, les maîtres modérés vers les associations solidaristes.

STRAUSS Jean-Louis, La SFIO et les nationalisations (1943-1946), Maîtrise [Antoine Prost], Univ. Paris 1 CRHMSS, 1981, 162 p.

Ce mémoire repose sur le dépouillement exhaustif de la presse socialiste — quotidienne et périodique — de l’époque, de nombreuses brochures de propagande, de comptes-rendus des Congrès et Comités directeurs, et sur l’analyse des témoignages des principaux acteurs de cette période mouvementée. Un échange de correspondance fructueux avec le maire de Commentry, Georges Rougeron, a conduit à des recherches plus approfondies sur les expériences dites « périphériques » qui se sont développées dans plusieurs régions (Allier, Rhône, Gard, Marseille, Toulouse, Saint-Raphaël…) avant d’être étouffées dans l’œuf dans le cadre du retour à la « légalité républicaine ».

Les premiers chapitres font un inventaire rapide du cheminement des nationalisations dans le discours socialiste, mettant en évidence le passage d’un concept théorique à un instrument de la politique économique qui trouvera sa première concrétisation lors du Front populaire. On verra ensuite comment les réformes de structure se justifient par le rôle malfaisant des trusts dans l’économie et la vie politique et par leur trahison préméditée de 1940.

Les socialistes, qui ne veulent pas se satisfaire de la confiscation des biens des traîtres et des mises sous séquestre qui en découlent, manifestent leur impatience devant les dérobades du général de Gaulle et le réveil des puissances d’argent. La SFIO élabore des projets de loi garantissant la participation des travailleurs à la gestion et conservant aux entreprises concernées leur pleine autonomie de gestion. On verra se mettre en place les principales réalisations et leurs limites. L’échec de la « Constitution sociale » et le déclin corrélatif du Parti socialiste, les déviations bureaucratiques et étatiques… expliquent que cette grande œuvre de rénovation est restée à l’état d’ébauche et ait été détournée de ses objectifs. C’est donc à un bilan mitigé qu’on est amené, avec une impression d’inachevée et de fragilité, mais les résultats apparaissent largement positifs en dépit de tous les obstacles.

SCHOONWATER Monique, La SFIO et les coopératives agricoles jusqu’en 1914, Maîtrise [Antoine Prost, Jacques Girault, avec la collaboration de F. Boudot], Univ. Paris 1 CRHMSS, juin 1981, 195 p.

Cette étude soulève un aspect particulièrement important de la question agraire pour les socialistes avant 1914, qui consistait à préciser une politique d’approche vis-à-vis de la petite et moyenne paysannerie.

D’où une réflexion sur l’idée de coopération en agriculture qui visait à aboutir à une exploitation en commun du sol dans le cadre des expériences héraultaises de coopération socialiste. Compère-Morel, ancien militant du POF, spécialiste de la question agraire au sein de la SFIO, jouera ici un rôle prépondérant : il s’agit non pas d’élaborer un socialisme pour les paysans, mais de mettre en œuvre une propagande pour intégrer la petite propriété paysanne à la doctrine socialiste.

Mais face à un mouvement coopératif placé sous le signe du patronage direct des organisations agrariennes et basé sur une apologie de la propriété privée, le point de vue socialiste sera amené à se nuancer : doit-on accepter l’esprit dans lequel fonctionnent ces coopératives, sous prétexte qu’elles constituent déjà un point de rassemblement et d’initiation à l’action collective ? Est-ce là la meilleure façon d’aboutir, à long terme, à une volontaire mise en commun des terres par les paysans ? Où bien doit-on plutôt essayer de donner d’emblée aux coopératives une appartenance socialiste nettement affirmée ?

Cette recherche tente donc de faire le point sur deux sujets qui s’imbriquent de par leur problématique :

– politique socialiste vis-à-vis de l’idée de coopération agricole ;

– situation du mouvement coopératif dans l’agriculture au début du siècle et positions socialistes vis-à-vis de ce mouvement.

TISSERAND Michel, Chelles (Seine-et-Marne), la vie politique et municipale, 1903-1939, Maîtrise [Antoine Prost, Jacques Girault], Univ. Paris 1 CRHMSS, 1981, 204 p.

Ce mémoire repose sur les archives départementales, l’état civil et les délibérations du Conseil municipal. Les listes de recensement n’ont pu être utilisées.

Chelles, entre 1903 et 1939, se développe rapidement ; l’accroissement de population entre 1901 et 1936 est de 300 % ; ce simple bourg rural du début du siècle devient une ville à part entière.

Elle est dépendante de Paris : la moitié des Chellois ont un emploi à Paris. Elle est à la limite de la Ceinture rouge, mais n’en fait pas totalement partie. Comme dans beaucoup de communes de banlieue, le Parti communiste y gagne les élections municipales de 1935, mais cette victoire paraît fragile, car l’union avec les socialistes est éphémère.

Chelles ne fait pas totalement partie des communes directement dépendantes de Paris et a, d’autre part, une originalité propre par rapport au reste de la Seine-et-Marne, plus agricole.

VIER Fabienne, Le statut du médecin en question : le médecin et la Sécurité sociale de 1945 à 1948, Maîtrise [Antoine Prost], Univ. Paris 1 CRHMSS, 1981, 158 p.

Avant l’apparition de la Sécurité sociale, les médecins exerçaient la médecine de façon libérale, ils fixaient leurs honoraires ; ces derniers n’étant pas remboursés, la médecine était vraiment libérale. La généralisation de la S.S. à toute la population a permis le développement de la consultation médicale, accessible désormais à toute une frange de la population qui se situait avant l’extension des lois sociales dans les classes les plus pauvres.

Tout d’abord, cette généralisation a été bénéfique pour le corps médical qui a vu ainsi s’élargir sa clientèle, et donc ses revenus augmentés. Ces bénéfices ont surtout été sensibles pour les médecins se trouvant au bas de la hiérarchie médicale ; cependant la situation — remboursement des frais ; augmentation de la consommation médicale ; liberté de l’honoraire — ne pouvait se poursuivre. Pour la Sécurité sociale, il y avait un trop grand décalage entre ce qu’elle remboursait et les honoraires des médecins.

C’est pour arriver à un taux de remboursement plus normal que l’évo­lution de 1945 à 1948 était nécessaire, imposant enfin aux médecins un tarif conventionnel. C’est le but de ce travail d’étudier le bouleversement que l’on pourrait appeler le premier choc conventionnel qu’a subi cette profession par l’étude de textes officiels et d’articles parus dans la presse médicale.

Elle revêt une importance particulière aujourd’hui même, alors que la profession médicale vient de subir un deuxième choc conventionnel : après avoir limité le montant de chaque acte, la Sécurité sociale s’est en effet vue dans l’obligation de limiter le nombre global des actes (c’est la notion d’enveloppe globale) face à l’accélération récente de la consommation médicale dans les pays industrialisés.

1980

BENCHERIFA Mustapha, La Tunisie en milieu colonial : M’Hamed Ali et les luttes syndicales 1924-1925, Maîtrise [Antoine Prost, Claude Liauzu], Univ. Paris 1 CRHMSS, 1980

La période 1924-1925 revêt une importance capitale et décisive dans l’histoire du mouvement ouvrier tunisien. Elle a connu la naissance d’une Centrale ouvrière indigène autonome, malgré de nombreux obstacles. Le monde des travailleurs était divisé : la discrimination sur la base des nationalités était institutionnalisée. À travail égal, le salaire n’était pas égal. Une confusion de fait des syndicats européens et des autorités du protectorat était pratiquée aux dépens des ou­vriers indigènes. Dans un milieu colonial, la répression était de rigueur. L’ignorance caractérisait l’indigène.

Les autorités coloniales étaient conscientes de l’importance de l’enjeu. Elles ont frappé dur : la CGTT fut dissoute. Elles ont vite com­pris que si la CGTT continuait à exister, elle aurait constitué une force avec laquelle on devait composer. C’était la première fois que les indigènes se donnaient un contre-pouvoir afin de défendre eux-mêmes leurs intérêts, contrecarrant ainsi la politique coloniale.

Cette recherche résume les mécanismes qui ont abouti à la manifesta­tion de la prise de conscience et de la volonté d’émancipation des indigènes

BERTRAND Olivier, Recherche de la « nature politique du Parti ouvrier d’unification marxiste (POUM) à travers une étude critique de sa bibliographie (1917-1939), Maîtrise [Jacques Droz], Univ. Paris 1 CRHMSS, 1980, 193 p.

Ce travail cherche bien moins à être l’œuvre d’hispanisant qu’à apporter une contribution, modeste, à une réflexion sur l’histoire du mouvement révolutionnaire de l’entre-deux-guerres.

La bibliographie actuelle du POUM tend, soit à le présenter comme un parti typiquement espagnol, en dehors de toute autre référence, soit à porter un jugement sur lui d’un point de vue léniniste, à partir d’une étude critique de cette bibliographie, nous tentons de montrer qu’au contraire, le POUM s’est rattaché, sans en avoir conscience ex­plicitement, à tout un mouvement de résistance au léninisme, refusant son hégémonie idéologique au nom du marxisme révolutionnaire et de l’exigence d’autonomie du prolétariat ; ce dont ni l’hagiographie poumiste, ni l’analyse léniniste ne pouvaient évidemment rendre compte pleinement. Il nous a donc fallu nous tourner vers toute une historiographie qui sortait du cadre espagnol pour mettre en évidence cet­te convergence de fait entre le POUM et un courant révolutionnaire occidental anti-léniniste qui a eu son épicentre en Allemagne dans les années 1920.

Cet emprunt à l’histoire révolutionnaire d’autres pays européens souligne la nature même de notre démarche se situant tout entière, à son niveau, dans cette entreprise de réhabilitation, en renouveau depuis une dizaine d’années, de tout un pan oublié du mouvement ouvrier qui en fait pourtant partie intégrante, sans préjuger de savoir si se trouve ici la vérité du mouvement social.

CHICLET Christophe, Le Parti communiste grec pendant la guerre civile grecque, 1944-1949, Maîtrise [Jacques Droz, Antoine Prost], Univ. Paris 1 CRHMSS, 1980, 226 p.

Le Parti communiste grec (KKE), après avoir monopolisé la Résistance nationale, s’est lancé, contrairement au PCF et au PCI, à la conquête du pouvoir en décembre 1944. Mais les conférences de Moscou, Yalta et Potsdam ont laissé la Grèce dans le camp occidental. Le Parti, abandonné par l’Union soviétique et écrasé par les troupes britanniques, a été contraint de signer la reddition de Varkiza en février 1945.

La fin de l’entente entre les grands alliés, les prémices de la guerre froide, la terreur blanche en Grèce ont poussé le Parti communiste grec à reprendre le chemin de la montagne et de la guerre civile. La guérilla dirigée par le général Markos-Vafiades a connu un réel suc­cès en 1947 et 1948. Mais, en juin 1948, le principal support de l’armée démocratique grecque, Tito, est mis au ban du monde communis­te. Cette rupture est d’autant plus dramatique pour le mouvement démocratique grec que Staline a exprimé son désir d’en finir avec la guerre civile. La direction stalinienne conduite par Nikos Zacharia­dis va alors purger le Parti de ses « titistes » et transformer la guerre de guérilla en guerre régulière. Ce véritable suicide va accélérer les événements et le Parti communiste grec sera exterminé en août 1949.

Ainsi l’intervention alliée, la non-intervention soviétique, l’exclusion de Tito, la décomposition interne du mouvement communiste grec et la structure sociale de la Grèce se sont unies pour créer un conflit de six ans (1943-1949) entraînant la fin tragique du mouvement démocratique grec pour de nombreuses années.

Cette étude est surtout orientée vers la définition et l’explication des différentes lignes politiques suivies simultanément ou successivement par le KKE, Les tendances et les conflits internes résultant de ces différentes lignes politiques sont également étudiés.

DARROUX Sylvie, Le Syndicat national des instituteurs à la conquête des campagnes. Un exemple : La Terre libre, Maîtrise [Antoine Prost, Jacques Girault], Univ. Paris 1 CRHMSS, 1980, 108 p.

La Terre libre est un journal lancé en 1934 par le Syndicat national des Instituteurs en direction des campagnes pour lutter contre le fascisme et réaliser le Front populaire.

L’étude a privilégié trois points fondamentaux :

– Le rôle du Syndicat national dans cette création (buts poursuivis, méthodes prises en charge, diffusion) à partir du dépouillement de L’École libératrice, de L’École émancipée et de bulletins départementaux.

– L’étude du journal en lui-même lui a permis de saisir comment le Syndicat national est allé à la rencontre des masses paysannes, comment il a divulgué son idéologie, et de voir également comment les lecteurs ont façonné le journal. En un mot, l’étude a permis de saisir la spécificité de ce journal au sein de la presse agricole,

– Un essai de bilan, une synthèse terminale permettant de quantifier et de qualifier l’impact de ce journal ; deux approches différentes ont été utilisées pour mesurer cet impact (lecture de la presse, enquête menée auprès des instituteurs),

Cette étude fait connaître la politique du Syndicat national des instituteurs dans les années trente et sa tentative pour sortir d’un cadre purement corporatif. Le journal se voulait une tâche d’information et d’éducation « libératrice ». Cette tâche n’a été que partiellement remplie à cause du caractère artificiel et surimposé du journal. Cet exemple illustre la quasi-impossibilité pour un groupe social déterminé de prendre en charge les objectifs d’un autre groupe.

DURAND-MOUCHE Martine, La « politique paysanne » du Parti communiste français à la Libération, août 1944-mars 1946, Maîtrise [Antoine Prost], Univ. Paris 1 CRHMSS, 1980, 204 p. + annexes

Ce mémoire traite du programme paysan du Parti communiste français à la Libération, tel qu’il est exposé dans l’hebdomadaire La Terre et dans les textes officiels du PCF. Puis sont abordées les questions de l’implantation et de l’influence des communistes dans les campagnes, celles du PCF. Puis sont abordées les questions de l’implantation et de l’influence des communistes dans les campagnes, celles du PCF directement et celles de ses militants et responsables actifs au sein de la Confédération générale de l’agriculture.

L’activité communiste dans le mouvement syndical paysan est aussi abordée en relation avec la « politique paysanne » du PCF : l’activité des dirigeants communistes, responsables des « questions paysannes », sur la question de l’unité syndicale puis sur les appréciations qu’ils portent sur les orientations de la CGA et leurs principales préoccupations en matière de syndicalisme agricole.

L’exemple du département des Côtes-du-Nord illustre les deux aspects de l’influence d’une fédération communiste en milieu paysan et de l’activité déployée par ses militants dans l’Union départementale de la CGA.

Plusieurs témoignages oraux recueillis sont publiés.

FABREGUET Michel, Les syndicats et l’Assemblée consultative provisoire (novembre 1944-octobre 1945), Maîtrise [Antoine Prost], Univ. Paris 1 CRHMSS, 1980, 179 p.

La participation de cinq organisations syndicales, dont la CGT et la CFTC, à l’Assemblée consultative provisoire de Paris, qui faisait suite à la participation de la seule CGT à l’ACEP d’Alger, s’expliquait par l’engagement du mouvement syndical dans la Résistance et par l’évolution du mouvement syndical, entre les deux guerres mondiales envers l’action parlementaire.

Devant l’ampleur des ruines à la Libération, le syndicalisme tendait moins à se définir comme force revendicative que constructive. Dans une assemblée politiquement très à gauche et gagnée à leur cause, les syndicalistes furent actifs et surent diversifier leurs centres d’intérêt (surtout les cégétistes), tout en conservant une nette prédilection pour les problèmes sociaux. Confrontés aux problèmes de l’heure (remise en ordre économique du pays, épuration, salaires, emploi, problèmes régionaux et internationaux), ils firent triompher devant l’ACP leurs conceptions des grandes réformes de structure : nationalisations, création des Comités d’entreprise, organisation de la Sécurité sociale. Malgré ces succès, ils mesurèrent rapidement les limites de leur action.

Le GPRF se souciait peu des avis de l’ACP : ainsi, l’ordonnance du 22 février 1945 instituant les Comités d’entreprise fut très en retrait de ce qu’avait prévu l’ACP. Le syndicalisme vécut pleinement l’échec de la Résistance/Révolution. Mais surtout, malgré sa puissance, le mouvement syndical fut incapable de surmonter les divisions politiques qui réapparurent très rapidement : la CFTC, politiquement « homogène », en souffrit moins que la CGT dont les sympathies politiques se partageaient entre différentes tendances. Les différentes organisations syndicales ne purent donc que reconnaître leur inadaptation à une assemblée de caractère politique : l’expérience demeura sans suite. Mais si les Confédérations syndicales se replièrent sur le terrain économique et social, un certain nombre de syndicalistes, dont plusieurs anciens membres de l’ACP, embrassèrent une carrière politique et siégèrent dans différentes assemblées de la IVe République »,

GUELAUD Claire, Recherche sur la politique nationale et sur la politique internationale du PCF dans la région méditerranéenne (1934-1939) à partir de Rouge-Midi, Maîtrise [Antoine Prost, Jacques Girault], Univ. Paris 1 CRHMSS, 1980, 120 p.

Ce mémoire a été réalisé à partir du dépouillement de la presse du Parti, notamment à partir de Rouge-Midi, « organe régional de la SFIC » dans la région méditerranéenne. Notre recherche a porté essentiellement sur l’analyse d’un discours et négligé d’autres approches possibles de la politique du PCF,

En dépit de ces limites, nous avons essayé d’éclairer certains aspects de la politique du Parti dans le Midi méditerranéen, Le Parti, de 1934 à 1939, n’a pas dans cette région une politique spécifique. En revanche, il adapte la ligne générale aux conditions particulières du Midi, réussissant à l’enraciner dans la tradition républicaine provençale. Cette politique accroît l’audience et les effectifs du Parti et lui permet de s’implanter de façon plus solide dans la région méditerra­néenne et de se « réconcilier » avec une région où il était jusqu’en 1934 en position de faiblesse. Toutefois, à la fin de 1938, apparaît déjà un relatif isolement du PCF dans la région, ce qui le conduit à adopter une attitude défensive,

MURGIER, Pascal, La Commune et la politique du Parti Communiste Français : 1921-1939, Maîtrise [Antoine Prost, Jacques Girault], Univ. Paris 1 CRHMSS, 1980, 95 p. + annexes

Cette recherche porte sur l’évolution de la représentation (I) et de l’interprétation (II) de la Commune de 1871 dans le PCF.

Plus qu’une analyse des pratiques symboliques entourant les commémorations de la Semaine sanglante, plus qu’une étude de l’historiogra­phie de la Commune dans le Parti communiste, y est tentée la descrip­tion d’une « stratégie discursive ».

Les sources (L’Humanité, les Cahiers du bolchevisme, les ouvrages parus sur la Commune 1871 entre les deux guerres) n’y sont pas présentées comme des « documents » renvoyant à un « réel », mais sont décrites par les « modèles » qui peuvent être repérés, et qui organisent la dis­position des énoncés.

Plus généralement, c’est à une critique de la pratique historiogra­phique, et du discours politique, qu’elle voudrait introduire et à une réflexion sur les problèmes du signe dans l’Histoire.

FLAMMANT Thierry, Recherche sur l’École émancipée (organe pédagogique de la Fédération nationale des Syndicats d’instituteurs et d’institutrices) 1910-1914, Maîtrise [Antoine Prost, Jacques Girault], Univ. Paris 1 CRHMSS, 1980

En 1910 naît L’École émancipée, revue pédagogique imprégnée du souffle syndicaliste révolutionnaire. Le travail montre à quel moment et pourquoi elle est apparue, ainsi que les difficultés et l’audace des instituteurs qui l’ont créée indépendante.

Le mémoire présente les fondateurs et les collaborateurs, souvent méconnus de la revue. Mais surtout, il cherche l’originalité de l’École émancipée, revue pédagogique (lien entre Ferrer et Freinet) et revue syndicaliste. Mouvement ouvrier, féminisme, antimilitarisme, anticolonialisme : autant de thèmes choisis pour donner un aperçu vivant et exact de la revue et illustrer les positions des institutrices et instituteurs syndicalistes au début du siècle.

PEYRAT Marianne, La Fête des Mères de 1932 à 1950, Maîtrise [Antoine Prost], Univ. Paris 1 CRHMSS, 1980, 152 p.

La France célèbre la Fête des Mères depuis le XXe siècle, suivant en cela l’exemple des pays anglo-saxons, mais on retrouve cependant à travers l’histoire, de l’Antiquité à nos jours, des cérémonies analogues.

Officiellement consacrée en 1926, il a fallu attendre 1950 pour la voir légalisée, grâce aux efforts conjugués de l’État et des associations familiales.

Entre ces deux dates, des transformations, que l’étude de ses manifestations traditionnelles met en évidence, ont modifié à la fois sa célébration et sa signification : à l’origine Fête des mères de familles nombreuses, elle a acquis avec le gouvernement de Vichy le caractère qu’on lui connaît actuellement, où le nombre des enfants n’est plus pris en considération. Cette évolution a été favorisée par la préférence accordée à la fête familiale, au détriment des cérémonies officielles (remise de la Médaille de la Famille française).

L’implantation en France d’une telle manifestation fait partie d’un mouvement général en faveur de la famille nombreuse et a offert une large audience aux thèses natalistes préconisées par les gouvernements successifs de l’entre-deux-guerres.

Elle a véhiculé d’autre part une certaine image de la femme, celle de la mère au foyer, modèle en contradiction avec la réalité économique et sociale du temps et qu’a néanmoins tenté d’imposer l’État.

Cette étude s’achève sur le rôle tenu par la presse dans le conditionnement de l’opinion publique vis-à-vis de ce phénomène et les différentes utilisations qu’elle en a fait suivant les idées qu’elle défendait : presse féminine, enfantine, familiale, religieuse…

PICA Germinal, La fonction éducative des Bourses du Travail dans le mouvement ouvrier (1895-1914), Maîtrise [Antoine Prost, Jean-Louis Robert], Univ. Paris 1 CRHMSS, 1980, 278 p.

Cette étude porte sur l’ensemble des activités culturelles et éducatives des Bourses du Travail entre 1895 et 1914. Elle décèle un certain nombre de comportements culturels typiquement ouvriers. Ainsi l’institution de cours professionnels, si l’on suit les débats des congrès des Bourses et de la CGT à ce sujet, montre combien le mythe du « bon ouvrier digne et fier » qui hante la seconde moitié du XIXe siècle persiste dans l’expérience éducative des Bourses. Les cours professionnels furent d’ailleurs surtout impulsés par des ouvriers qualifiés dans le but de préserver les « métiers » menacés par la « spécialisation » ou la déqualification. L’institution d’un enseignement général avec bibliothèques, cours, conférences, participation aux Universités populaires fut surtout le fait de militants autodidactes qui tentaient de fonder un humanisme ouvrier et une culture prolétarienne. Mais l’échec des Universités populaires, la faible fréquentation des bibliothèques, montrent que, pour l’ensemble des syndiqués, l’ac­quisition d’un savoir livresque et « éclectique » passait au second plan par rapport au « métier » et à l’amélioration de la qualification professionnelle.

Les militants qui s’intéressèrent à l’éducation définirent une pensée pédagogique proche des aspirations ouvrières et inspirées de certaines idées libertaires. C’est ce que confirme la Conférence des Bourses de Marseille (1908). Mais après 1908, les expériences d’éducation de l’enfance (groupes de pupilles) auront une portée restreinte tandis que l’ensemble du service éducatif ne connaîtra aucune innovation. Seules les Jeunesses syndicalistes tenteront, au sein des Bourses, de donner un visage nouveau à ce type d’activités en essayant de concilier la culture avec les activités récréatives. Ainsi l’étude des activités éducatives et culturelles des Bourses du Travail permet d’exhumer une culture ouvrière, une pensée ouvrière sur l’éducation, d’en définir les aspects et d’en observer les centres d’intérêt de 1895 à 1914.

RODRIGO Jean-Michel, Recherches sur L’École Émancipée (organe pédagogique de la Fédération nationale des Syndicats d’instituteurs et d’institutrices) 1910-1921, Maîtrise [Antoine Prost, Jacques Girault], Univ. Paris 1 CRHMSS, 1980, 255 p.

De la naissance de l’École Émancipée, en octobre 1910 à Marseille, à son transfert à Saumur, onze ans plus tard, une profonde évolution s’opère. Le syndicalisme révolutionnaire qui se réalise pleinement au contact de la pratique pédagogique constitue le lien. De telles conceptions ont engendré un type de militants syndicalistes qui veut se perfectionner professionnellement tout en refusant de parvenir. L’École Émancipée est son journal pour la préparation de ses cours et son combat pour la reconnaissance du droit syndical des fonctionnaires.

L’École Émancipée ne disparaît pas avec la guerre, mais doit modifier sa formule. Elle parvient, malgré la censure, à véhiculer certains thèmes favorables à la paix. Expression des minoritaires, elle préconise l’adhésion à la IIIe Internationale.

ROMION Marie-Claude, Le discours anarchiste sur l’Éducation à travers Le Libertaire, 1905-1906, Maîtrise [Antoine Prost], Univ. Paris 1 CRHMSS, 1980, 91 p.

Cette étude est une analyse du discours anarchiste sur l’éducation, entreprise à partir des articles parus sur ce sujet dans Le Libertaire en 1905-1906. Elle a pour but de montrer comment fonctionne le discours libertaire sur l’éducation.

Une introduction comporte la présentation du journal et de ses collaborateurs. Elle envisage ensuite la constitution du corpus à partir des énoncés comprenant les mot-clés choisis pour l’étude. Puis elle explicite la méthode d’analyse retenue : une étude précise des termes dans leur emploi et leur cooccurrence permettant de mettre en évidence la structure du discours.

L’étude proprement dite se divise en trois parties. L’opposition constante de deux types d’éducation donnant au discours une structure binaire est démontrée dans la première d’entre elles. La seconde est consacrée à l’examen des données de l’opposition, envisagées pour les deux types d’éducation dans leurs principes, leurs dispensateurs, leurs méthodes et leurs résultats. À travers l’étude de la fonction de l’éducation, la dernière partie révèle la valeur politique et sociale sous-tendant tout le discours. Cette étude démontre donc la structure d’un discours de propagande,

SAURET Christine, La Catalogne de 1931 à 1936, Maîtrise [Antoine Prost], Univ. Paris 1 CRHMSS, 1980, 108 p.

Ce mémoire traite de l’évolution de la Catalogue à travers la presse. Bien que l’existence de la Catalogne représente un problème spécifique, son étude ne peut être envisagée que par rapport à l’Espagne.

Le travail se divise en six parties, chacune consacrée à un événement important, en Catalogne, durant la période 1931-1936. La chute de la monarchie, l’avènement de la République, l’élaboration du Statut de la Catalogne et les conflits qu’il suscite, le 6 octobre et la victoire du Frente popular, jusqu’au conflit qui éclate en juillet 1936. La multiplicité des partis et la préoccupation dominante de l’autonomie n’ont pas permis aux Catalans de mesurer à temps le danger des droites.

WOUTERS Ghislain, La publicité pour l’automobile. Conception et organisation de la publicité, image sociale de l’automobile de 1937 à 1973, Maîtrise [Antoine Prost], Univ. Paris 1 CRHMSS, 1980, 266 p.

Cette étude analyse l’évolution de l’image de l’automobile diffusée par la publicité de 1937 à 1973, sa signification et, dans la mesure du possible, les liens de cette image avec la réalité vécue. Elle repose sur les annonces parues dans différents supports de presse pendant les années 1937, 1954 et 1955, 1965, 1973, mais aussi sur des documents internes aux firmes (Renault) concernant leur conception de la publicité et la façon dont elles l’organisent.

On assiste à un affinement et (malgré un recul entre 1945 et la fin des années cinquante) à une présence de plus en plus forte et régulière de la publicité à travers la période. Cette évolution est liée au développement des agences et de l’utilisation de la publicité comme instrument de vente dans un marché de masse ; elle entraîne une augmentation de la force de persuasion et de la prégnance des annonces.

En même temps, on voit l’auto malgré l’utilisation de la symbolique par les agences, se banaliser pendant que son usage se développe. Conduire, dès avant la crise pétrolière, peut devenir peu agréable, surtout, alors que la sensibilité postulée par les annonces était différente selon les supports en 1937, une unification se produit entre ceux-ci dans l’après-guerre. De plus, la différenciation des motifs d’achat, voire des autos selon les catégories socio-professionnelles mises en scène (1937), cède le pas à une différenciation selon l’âge et le statut matrimonial et familial : à la représentation d’une société figée succède celle d’une société intégrationniste transmettant à toutes les catégories sociales un imaginaire qui est du reste celui des cols blancs.

Ce ne sont donc pas seulement des modes de sensibilité envers l’auto qui sont étudiés, mais aussi, à travers eux, des modes d’imaginaire plus généraux d’une société.