Représentations du marché noir parisien sous l’occupation

MOULIN Pascal, Représentations du marché noir parisien sous l’occupation, Maîtrise [Antoine Prost, Lucette Le Van-Lemesle], Univ. Paris 1 CRHMSS, 1993, 172 p.

L’expression de marché noir a fait fortune dans toute l’Europe pendant la Seconde Guerre mondiale. En France, elle est entrée rapidement dans le langage commun. Dans un grand centre urbain de zone nord comme Paris, l’occupation allemande et son corollaire de pénurie, ajoutés à l’impéritie des Services du Ravitaillement du gouvernement de Vichy, imposèrent la pratique et l’expression pour la désigner.

Le marché noir prit de l’ampleur dès les débuts de l’occupation. La population le subit dans sa vie quotidienne en même temps qu’une inflation toujours plus importante. La presse parisienne se fit l’écho de ses préoccupations, avec énormément de démagogie. Pourtant les Parisiens ne furent pas toujours hostiles au marché noir, car il était le seul à ravitailler Paris. Les autorités gouvernementales ont, elles, employé tardivement l’expression. Elles ont pourtant observé très vite une pénurie sur le marché officiel, une fuite des marchandises vers un circuit parallèle dans des proportions considérables. C’est seulement en mars 1942 que l’expression fut reconnue officiellement. Sont désignées alors comme faits de marché noir toutes les infractions aux règles du ravitaillement. Cette année marque une nette aggravation des peines encourues et après le 31 décembre 1942, les auteurs des infractions les plus graves risquaient jusqu’à la peine de mort. Pourtant, comme la population, les autorités ont été contraintes d’accepter que le marché noir fît partie intégrante de l’économie.

Cependant, les acteurs du marché noir ont été poursuivis et montrés du doigt. Pour la population, les paysans sont les grands responsables de la pénurie et les profiteurs de la situation. De son côté, la presse a fustigé les intermédiaires dont le nombre s’est considérablement accru avec l’épanouissement du marché noir. Les autorités gouvernementales n’ont pas choisi une autre cible pour expliquer les cas les plus graves. Enfin, tous s’accordaient à désigner les Allemands comme les grands coupables.