Les syndicats policiers et le maintien de l’ordre (1968-1973)

DU ROY Ivan, Les syndicats policiers et le maintien de l’ordre (1968-1973), Maîtrise [Antoine Prost, Danièle Tartakowsky], Univ. Paris 1 CRHMSS, 1995

L’une des tâches des fonctionnaires de police est de maintenir l’ordre. Depuis 1946, les policiers ont officiellement le droit de se syndiquer. Comment cohabitent ces deux esprits, représentant de l’ordre et syndicaliste ? Le climat social qui marque l’année 1968 révèle cet aspect paradoxal. De Mai 1968 à 1973, les policiers sont très sollicités dans leurs missions de maintien de l’ordre. Que ce soit lors des grandes manifestations syndicales ouvrières, face aux barricades étudiantes, ou confrontés aux commandos antifascistes gauchistes, le devoir des fonctionnaires de police est d’être présents dans la rue, pour maintenir, voire rétablir, l’ordre public. Le devoir du syndicaliste policier est tout autre. Il doit veiller aux intérêts matériels et moraux de sa profession et être vigilant sur l’utilisation politique de la police par le gouvernement.

Durant cette période, les publications syndicales policières nous éclairent sur leur vision des manifestants et des mouvements sociaux et sur leur conception du maintien de l’ordre. Les critiques de l’époque sur l’utilisation de la police font apparaître un malaise au sein du corps policier. Ce malaise est un des révélateurs du paradoxe du syndicalisme policier.

Cette situation met en évidence les deux orientations syndicales et politiques qui s’affrontent dans la police. La première, représentée par la Fédération autonome des syndicats de police (FASP), majoritaire, conçoit la police comme un service public, au service de l’ensemble des citoyens et ayant les mêmes intérêts. La seconde, partagée par les syndicats catégoriels, minoritaires, considère que le policier doit servir le régime en place, quel qu’il soit, et ne se soucier que des préoccupations matérielles et morales de celui-ci.