La CGT, la CGTU et les immigrés italiens de 1922 à 1935

DAL DEGAN David, La CGT, la CGTU et les immigrés italiens de 1922 à 1935, Maîtrise [Michel Dreyfus, Antoine Prost], Univ. Paris 1 CRHMSS, 1997, 174 p.

L’entre-deux-guerres voit la rencontre d’une immigration italienne alors à son apogée et d’un mouvement syndical divisé. Appréhendée en termes numériques, l’histoire de cette rencontre est celle d’un rendez-vous manqué : seule une faible proportion d’Italiens osa braver les répressions policière, patronale et fasciste pour franchir la porte d’un syndicat. De leur côté, les syndicats ne firent pas toujours preuve de l’internationalisme censé animer le mouvement ouvrier.

Pourtant, en dépit de la peur de la répression et du manque de bienveillance des syndicats français, les Italiens n’en furent pas totalement absents. La CGT et la CGTU furent donc confrontées à des adhérents d’un genre particulier. La CGT prétendait les intégrer en son sein au même titre que les Français. Elle a néanmoins, pour une large part, confié l’organisation des Italiens à des dirigeants en exil de la CGT italienne. La CGTU, elle, récusait le concept de nation et ne voulait voir que des prolétaires. Elle aurait donc dû refuser de regrouper les étrangers selon des critères nationaux. C’est pourtant en partie ce qu’elle fit avec les comités intersyndicaux de langue étrangère. La CGT et la CGTU ont donc été amenées à s’affranchir quelque peu de leurs partis pris idéologiques pour prendre en compte la réalité : il n’était pas possible d’organiser les étrangers comme les Français. Outre le fait qu’ils étaient étrangers, les Italiens avaient la particularité d’être originaires d’un pays vivant sous le joug d’une dictature. Cela induisait un rapport particulier au syndicalisme : le fascisme avait été antisyndical, le syndicalisme ne pouvait être qu’antifasciste. Il l’était même en tant que tel, dans la mesure où adhérer à un syndicat était en soi une profession de foi antifasciste. L’antifascisme, en tant qu’élément fédérateur, a aussi pu contribuer à placer les Italiens à l’avant-garde de ceux qui aspiraient à l’unité syndicale.