La campagne électorale de Jean-Louis Tixier-Vignancour pour l’élection présidentielle de 1965

BARBIER Christophe, La campagne électorale de Jean-Louis Tixier-Vignancour pour l’élection présidentielle de 1965, Maîtrise [Jacques Girault, Antoine Prost], Univ. Paris 1 CRHMSS, 1989, 323 p. + 1 vol. d’annexes

Jean-Louis Tixier-Vignancour fut un grand avocat promis à la postérité, mais en aucun cas un penseur politique de premier ordre. Néanmoins, et malgré de nombreuses compromissions, sa carrière politicienne satisferait bien des ambitions, couronnée qu’elle fut par la candidature à la magistrature suprême en décembre 1965. Dans cette élection présidentielle, première de son genre, Tixier-Vignancour est chargé de défier de Gaulle et d’unifier l’extrême droite atomisée par le conflit algérien. Il investit sans retenue son personnage dans cette aventure, aidé par un mouvement improvisé, porté par des alliés disparates et développant un programme aussi riche de propositions que dépourvu d’argumentations.

La voix mythique de l’avocat de Sôlan résonne donc, au cours d’une longue campagne truffée d’originalités ; toutefois, cette dernière n’a que l’apparence d’une campagne « à l’américaine » : le travail de propagande n’est pas scientifiquement organisé ni correctement relayé. Le succès partiellement inutile de la tournée des plages de l’été 1965 est encadré par deux échecs : la mauvaise campagne télévisée réalisée par Tixier et la fratricide participation aux municipales parisiennes de mars. Au cours de ces élections locales éclate la rivalité entre les deux factions du Comité TV : les « modérés » qui inspirent par la suite la dérive centriste de Tixier et les « durs », à la tête desquels Jean-Marie Le Pen jette les bases de ce qui deviendra le Front National.

Car si la médiocrité du score atteint le 5 décembre 1965 et la brouille qui déchire le Comité TV en janvier 1966 semblent consacrer un double échec de l’aventure Tixier, la véritable importance de celle-ci est ailleurs. La candidature Tixier-Vignancour voit la fin d’une certaine extrême droite, inspirée en proportions diverses par l’avant 1945, le poujadisme et la lutte pour l’Algérie française (extrême droite d’arrière-garde), et l’apparition virtuelle d’une nouvelle extrême droite, qui va mettre dix ans à bâtir son appareil, quinze ans pour trouver son créneau idéologique et vingt ans avant de connaître le succès des urnes. Dans cette transition est toute l’importance historique de la candidature Tixier-Vignancour à la présidentielle de 1965.