Les anarchistes à Paris et en banlieue, 1880-1914 : représentations et sociologie

DELOUS Olivier, Les anarchistes à Paris et en banlieue, 1880-1914 : représentations et sociologie, Maîtrise [Claude Pennetier, Antoine Prost], Univ. Paris 1 CRHMSS, 1996, 287 p.

Ce travail propose une approche des anarchistes du département de la Seine entre 1880 et 1914 et tente de démontrer la possibilité d’une prosopographie, à partir du Dictionnaire biographique du mouvement ouvrier français d’une part et des archives publiques, essentiellement policières, d’autre part.

Au préalable, une réflexion est menée sur les modes de représentation dont cette population est l’objet dans la société et notamment sur les mécanismes de construction d’un consensus très chargé négativement, qui n’est pas sans rapport avec la structure sociale du système des revendications. Le regard policier y est décrit dans sa double dynamique, l’une liée à sa fonction opératoire attendue et permanente de surveillance et de répression — qui se nourrit du consensus et l’entretient — l’autre, à la nécessité d’une évaluation au plus juste des nouveaux dangers anarchistes (anarcho-syndicalisme et antimilitarisme) et qui conduit le sommet de la hiérarchie policière à affiner sa perception du mouvement peu après l’ère des attentats, en lui concédant un ancrage historique séculaire et en écartant définitivement la thèse du complot terroriste.

Les 1 439 biographies retenues sont interrogées d’abord selon différents indicateurs, démographiques, géographiques ou socio-professionnels, pour autoriser une estimation des modes d’implantation et de diffusion des idées anarchistes dans le département durant toute cette période, ainsi qu’une analyse des traits significatifs du rapport des anarchistes au travail, à la famille, à la société. On peut alors dégager les éléments constitutifs d’une pratique politique originale — traversée par des tendances très diverses — à travers deux aspects fondamentaux : le mouvement d’une part et les milieux d’autre part. Sont ainsi présentées de façon complémentaire, mais distincte les tentatives d’organisation, les actions des anarchistes du département et une typologie des compagnons (selon leur degré d’investissement et leur adhésion à certaines tendances), le tableau synoptique des groupes et leur fonction, etc. En outre, une mention particulière est faite des rapports qu’entretiennent Paris et la banlieue, espaces d’expression anarchiste bien différents, notamment à travers les expériences de « milieux libres ». Enfin, nous sommes mieux à même d’analyser l’attitude des compagnons face à la Première Guerre mondiale et de quantifier leurs diverses positions.