NIVET Philippe, Une commune cheminote de la banlieue d’Orléans, Fleury-les-Aubrais (Loiret) de 1911 à 1971, Maîtrise [Antoine Prost], Univ. Paris 1 CRHMSS, 1987, 272 p.

Fleury-les-Aubrais est une commune suburbaine du nord d’Orléans. Avant 1840, ce n’était qu’un village de vignerons qui atteignait à peine 1 000 habitants ; en 1911, la population avait presque triplé avec 2 887 habitants en 1982, Fleury était devenue la deuxième ville du département du Loiret avec 19 568 habitants. C’est que, en 1843, la commune s’était trouvée sur la ligne de chemin de fer Paris-Orléans et que, malgré l’opposition des autorités orléanaises, une importante gare dut être installée, à partir de 1853, sur son territoire, au lieu-dit « Les Aubrais », là où les lignes bifurquent vers Tours et vers Vierzon, la gare d’Orléans se trouvant dans un cul-de-sac. C’est ainsi que Fleury devint une commune cheminote de proche banlieue, comparable à Longueau dans la banlieue d’Amiens et à Saint-Pierre-des ­Corps dans la banlieue de Tours.

L’étude de la commune entre 1911 et 1971 porte essentiellement sur les trois points suivants : l’évolution et la composition de la population, son comportement politique, le développement urbain.

Le dépouillement informatique des listes nominatives de recensement de 1911 et de 1936 et le dépouillement de la liste électorale de 1938 ont permis d’étudier la profession, le lieu de naissance et l’âge des habitants de la commune, ainsi que la structure des ménages. Cette partie de l’étude met notamment en valeur la part des cheminots dans la population active avant la Seconde Guerre mondiale : ils représentent 32 % de la population active en 1911, 29 % en 1936 et 33 % des électeurs en 1938. L’analyse des recensements de l’INSEE montre ensuite une diversification de la population après la Seconde Guerre mondiale : entre 1954 et 1975, on assiste à un phénomène de déprolé­tarisation et de tertiarisation de la commune.

Politiquement, contrairement à ce qui se passe à Longueau ou à Saint-Pierre-des-Corps, les communistes ne parviennent pas à conquérir la mairie avant la Seconde Guerre mondiale. Fleury-les-Aubrais est alors une commune radicale, où les communistes ne dépassent pas 30 % des suffrages exprimés. Ce comportement politique peut s’expliquer par le maintien à Fleury d’une population rurale et vigneronne au vote typiquement radical, mais aussi par la personnalité des candidats radicaux, Fernand Rabier et Jean Zay, qui se présentent comme défenseurs des cheminots. Sous la Quatrième République, les communistes obtiennent près de 40 % des suffrages exprimés, mais ce n’est qu’en 1971, malgré la diversification du corps électoral, qu’un maire communiste est élu à Fleury.

Le développement urbain de Fleury est apparu surtout après les bombardements de 1944, la commune ayant été détruite à 48 % à cause des installations ferroviaires installées sur son territoire. Fleury est alors inclus dans le plan de reconstruction de l’agglomération orléanaise et devient une commune industrielle. La reconstruction permet aux municipalités socialistes de l’époque de développer le logement social et, à partir des années 1950 surtout, de contrôler l’urbanisme, notamment grâce à la mise en place d’une ZUP.

Cette étude d’histoire urbaine montre essentiellement l’émergence d’une véritable ville de banlieue qui, par son opposition à tout projet d’annexion par Orléans de sa partie industrialisée et par sa volonté de développer une politique urbaine autonome, cherche de plus en plus à affirmer son identité par rapport à la métropole orléanaise et à défendre avec force l’autonomie communale.