Les attentats de l’Organisation Armée Secrète (OAS) à Paris et leurs représentations d’avril 1961 à juillet 1962

HERMAN Bernard, Les attentats de l’Organisation Armée Secrète (OAS) à Paris et leurs représentations d’avril 1961 à juillet 1962, Maîtrise [Michel Pigenet], Univ. Paris 1 CHS, 2003, 2 vol. : 331 p.+ 138 p. d’annexes

Du 22 avril 1961 au 30 juin 1962, cinq cent quinze attentats commis en en région parisienne, dont 70 % dans Paris même, sont attribués à l’OAS. 89 % sont dus à des engins explosifs conçus pour ne pas tuer, mais pour faire des dégâts matériels. On dénombre toutefois dix-sept morts, dont douze Nord-Africains, essentiellement par mitraillages devenus mode d’action préférentiel en fin de période. Ce sont des attentats ciblés contre les formations politiques (et plus particulièrement le PCF à partir de décembre 1961), la communauté nord-africaine, les symboles de l’État, les médias et les militants de la paix en Algérie. Ils sont le fait de réseaux autonomes jusqu’en décembre 1961 puis des Missions II et III de l’OAS d’obédience algérienne jusqu’en juin 1962. Les « plastiqueurs » sont des hommes jeunes. 73 % sont métropolitains, civils en majorité (l 8 % sont des militaires). 74 % ont une formation de parachutiste. Beaucoup sont militants ou sympathisants de l’extrême droite. Leur choix de la violence, dont le but est de renverser le régime, s’explique par leur parcours politique et militaire, les exemples tirés du conflit algérien, la haine de De Gaulle qu’ils accusent de trahison et la croisade qu’ils mènent contre le communisme international. Contre les activistes, le Pouvoir met en jeu sa police, sa justice et son administration. Contre les attentats, collectivités et citoyens organisent leur protection. Contre les objectifs de l’OAS, syndicats, partis politiques et associations de gauche développent des manifestations. Certains sont tentés par le contre-terrorisme, que le PCF refuse, évitant la guerre civile. Les Parisiens, qui jugent les attentats incompréhensibles et intolérables, manifestent en masse leur refus de la violence le 13 février 1962 lors des obsèques des morts de Charonne, signant l’échec de l’OAS. Celle-ci, consciente des effets négatifs de la violence sur l’opinion, tente de forger d’elle-même une représentation valorisante, celle de nouvelle Résistance, dont les sigles, le vocabulaire, l’organisation, les modes d’action, les valeurs, les référents politiques, les symboles ainsi que les ennemis sont comparables à ceux de la première Résistance. Cette représentation ne peut s’imposer face à celles développées par De Gaulle, des criminels et des soldats perdus à visées subversives, et par le parti communiste, une organisation fasciste. C’est cette dernière que retient une importante fraction de l’opinion publique. Cette bataille des représentations, perdue par l’OAS qui entraîne dans sa chute l’extrême droite et le CNIP, est gagnée par De Gaulle qui consolide son pouvoir et le régime, ainsi que par le parti communiste qui sort de son ghetto et fait de la gauche, sous son égide, la seule forme d’opposition réelle au Pouvoir.