Appel à communications pour le dossier « Écouter la justice », de la revue Criminocorpus, co-dirigé par Sylvie Thénault et Jean-Sébastien Noël (maître de conférence en histoire contemporaine, La Rochelle Université)
Les propositions, d’une longueur de 1500 signes, accompagnées d’une courte présentation bio-bibliographique de l’auteur, sont à renvoyer pour le 15 juin 2022 à cette adresse : ecouterlajustice@gmail.com
La question des images en justice et de la captation audiovisuelle des procès a été largement traitée. Christian Delage, qui s’attachait précisément au statut de preuve des images dans les procès de Nuremberg, proposait la notion de « prérogative herméneutique de l’image1 ». Au contraire, l’histoire sonore de la justice n’a pas été explorée. L’historiographie récente de la justice2, comme les travaux relevant des sound studies3 et de l’écoute4, permettent pourtant de l’envisager avec profit.
Ouvert, dans une perspective diachronique, à toutes les périodes de l’histoire, ce dossier propose d’ « écouter la justice » à toutes les étapes, des premiers temps de l’enquête jusqu’aux audiences, sans oublier les moments de détention. Les contributions ne sont pas limitées d’emblée au seul prétoire mais elles pourront être élargies aux phénomènes acoustiques du fourgon unicellulaire (ou « panier à salade »), du commissariat, de la garde à vue et de l’interrogatoire ou encore de l’emprisonnement. Tous les environnements sonores, y compris la mémoire auditive des actes de torture (telle qu’analysée, notamment par Juliette Volcler)5 ou celle de l’exécution des condamnés à mort, peuvent être appréhendés. Le choix d’une approche au temps long invite en outre à investiguer des contextes judiciaires variés.
La dynamique de la recherche initiée depuis une vingtaine d’années dans le champ des sound studies permet une appréhension des phénomènes sonores dans toutes leurs dimensions : sociales, culturelles, politiques mais aussi techniques et juridiques. Ainsi, entre autres thématiques, les contributions pourront porter sur :
- Les usages de la voix et de l’art oratoire
- L’évolution des cadres institutionnels et des législations réglementant la procédure sur ces aspects
- La sonorisation des prétoires et tout dispositif ad hoc (de traduction, de sonorisation, de diffusion de la parole des acteurs)
- La construction de l’écoute (architecture et acoustique des tribunaux et cours de justice)
- Les aspects juridiques et légaux de l’enregistrement des procès
- Les processus d’archivage, de conservation et/ou de numérisation de documents sonores des grands procès
- Les usages coercitifs du son (actes de torture)
Si les coordinateurs du dossier donneront la priorité aux travaux de recherche empiriquement fondés, les contributions pourront prendre la forme d’entretiens avec des acteurs du monde judiciaire ou des professionnels concernés par ces questions (comme les architectes).