Approche critique de l’histoire des résistants et de la résistance dans le département de l’Aisne, 1940-1944

BERNATETS Jean-Claude, Approche critique de l’histoire des résistants et de la résistance dans le département de l’Aisne, 1940-1944, Maîtrise [Claire Andrieu, Denis Peschanski], Univ. Paris 1 CHS, 2005, 182 p.

Elle met en évidence des parcours singuliers qui ne s’en inscrivent pas moins dans une aventure collective, à la nature plurielle, populaire, minoritaire. Elle coïncide partiellement avec ce qui a pu être dit. Elle s’éloigne par contre fortement des mythes forgés de toutes pièces dans l’immédiate après-guerre et qui se perpétuent même aujourd’hui dans le département. Le corpus choisi permet d’établir sinon de rétablir nombre de vérités. La Résistance dans l’Aisne ne naît nullement du néant. Militants communistes, socialistes et syndicalistes y jouent un rôle essentiel. FN et FTP, pour leur part, y apportent une contribution majeure. Elle n’est pas unie, mais au contraire profondément divisée sur fond d’anti-communisme bien que les combattants fassent preuve de solidarités, se prêtent assistance. L’intégration de ses forces para militaires au sein des FFI reste pour une large part formelle, virtuelle, jamais achevée. Il n’apparaît pas que gaullistes et alliés, au-delà de la subordination et de l’obéissance qu’ils exigent de sa part aient eu réellement l’intention de l’armer convenablement. Son bilan, toutefois, se présente comme très honorable. Certains des chefs de l’OCM ont tenté de travestir et de réécrire la part prise par leur mouvement pour en masquer la modestie. L’épopée de la Résistance axonaise repose en fait avant tout sur le travail ingrat, obscur, obstiné, persévérant où chacun outre sa propre vie, risque celle des siens. À l’héroïsme ordinaire correspond un parcours jalonné de multiples tragédies, de sang et de larmes, de lâchetés et d’ignominies. Pour les survivants et la mémoire des morts, en regard des sacrifices consentis, il s’achève d’espoirs déçus, d’espérance vaine dans l’avènement d’un monde nouveau. L’âme de ce mouvement de résistance, ce sont les humbles, les sous grades, soutiers inconnus ou méconnus d’une gloire qu’ils n’ont pas revendiquée et dont les circonstances seules en ont fait pourtant les véritables artisans. Ces quelques milliers d’hommes et de femmes, de jeunes et d’étrangers représentent la grandeur et l’honneur de l’Aisne. Ils payent chèrement leur goût de la liberté, leur aversion du fascisme, l’amour de leur terroir et de leur patrie. Avant-garde éclairée et martyre d’une population axonaise profondément germanophobe, qui dans sa masse se tient éloignée de la collaboration, elle permet que cette dernière n’y sombre jamais. Au-delà de ces faits d’armes, il s’agit-là de sa plus grande victoire. Leur participation à la lutte contre le nazisme et son satellite le régime vichyssois, pour libérer le territoire, restaurer la démocratie et la République, ouvrir le chemin à des lendemains qui chantent, impose et mérite gratitude, respect et reconnaissance. Ce premier travail de recherche ne permet toutefois pas d’élucider un certain nombre de problèmes loin d’être subsidiaires.