« À nous deux Paris » : comparaison du Temps des copains et de Seule à Paris

DECROUX Bérengère, « À nous deux Paris » : comparaison du Temps des copains et de Seule à Paris, Maîtrise [Pascal Ory, Myriam Tsikounas], Univ. Paris 1 CHS, 2003, 2 vol. 160 p. + annexes

Le Temps des copains et Seule à Paris sont deux grands feuilletons sociaux qui ont marqué la télévision du début des années soixante. Tous deux ont été réalisés par un même réalisateur, Robert Guez, et ont la particularité de traiter d’un même sujet, l’arrivée à Paris de jeunes provinciaux, sous un angle masculin et féminin. Ils ont été coproduits par l’ORTF, qui était également leur diffuseur. Les deux feuilletons sont deux représentations liées à des contextes socio-historiques. La jeunesse était une classe d’âge prédominante dans la société de l’époque. Le désir d’affirmation de ces jeunes gens et l’amorce de l’émancipation féminine sont les sujets respectifs de chacune des deux histoires. Le Temps des copains expose l’intégration à Paris de trois jeunes étudiants, d’horizons sociaux confondus, dans un univers de bohème. Seule à Paris décrit l’arrivée d’une jeune femme issue d’un milieu social bourgeois, qui aspire à une brillante carrière d’étalagiste dans un Paris hostile. Ces deux feuilletons se distinguent également par leur style télévisuel. Le premier feuilleton revêt une tonalité comique, et dépeint une ambiance conviviale et théâtrale. Le deuxième se veut plus réaliste avec un réalisateur qui s’est mis à l’école du « cinéma-vérité ». Des thèmes communs sont évoqués comme l’ambition professionnelle, le rapport à l’autorité parentale et l’accomplissement social. Les deux récits sont les parcours initiatiques de jeunes personnes vers leur réalisation sociale. Mais la comparaison de ces deux feuilletons révèle pourtant un réel antagonisme entre la vie des trois protagonistes masculins et de l’héroïne de Seule à Paris. Ces deux fictions télévisuelles transcrivent deux conceptions de la réussite sociale. Dans Le Temps des copains comme dans Seule à Paris les personnages féminins apparaissent comme des jeunes femmes menant des vies difficiles, parfois proches du misérabilisme. Les dénouements des deux histoires définissent l’accomplissement du jeune homme essentiellement par son évolution professionnelle et l’amorce d’une vie aventureuse. Quant à la réalisation féminine, elle se distingue principalement par l’annonce de son statut de future épouse. La question de la carrière professionnelle n’est pas évoquée pour la femme. En exposant précisément des images propres aux représentations masculines et féminines de la réalisation sociale, ces deux feuilletons sont alors deux témoignages de la période culturelle des années soixante.