Le service culturel du musée d’Orsay : un nouvel outil de médiation, 1973-1994

LOOS Carine, Le service culturel du musée d’Orsay : un nouvel outil de médiation, 1973-1994, Maîtrise [Pascale Goetschel, Pascal Ory], Univ. Paris 1 CHS, 2002, 201 p.

Face à une fréquentation croissante des musées français, à un attrait vers le patrimoine et à une demande culturelle en hausse de la part d’un certain public, l’État devait proposer de nouveaux espaces. Le musée d’Orsay en est un, à la fois espace de conservation et de diffusion de l’art, c’est en effet le premier musée français à disposer d’un service culturel indépendant.

Dès les prémices du projet en 1973, cette demande du public est prise en compte, le bâtiment est classé monument historique sous George Pompidou. Le conseil interministériel d’octobre 1977, sous l’égide de Valery Giscard d’Estaing, lance le projet et la loi programme votée en juillet 1978 insiste sur les nouvelles missions des musées qui doivent désormais se tourner davantage vers les publics. Le changement politique de 1981 amplifie le projet, François Mitterrand lui donne de nouveaux objectifs dont la réorientation historique des programmes permettant de faire le lien entre la création artistique et le cadre sociohistorique. Cette tâche est attribuée à Madeleine Rebérioux nommée vice-présidente de l’Établissement Public du Musée d’Orsay. Cette historienne du social, spécialiste du monde ouvrier et femme de combat au sein de la Ligue des droits de l’Homme, voit sa nomination controversée. Ses projets ne seront que partiellement développés, mais ses idées se retrouvent dans le futur service culturel qu’elle défend et qu’elle contribue à créer en nommant avec les autres membres de la direction le chef du service Roland Schaer, agrégé en philosophie, en septembre 1985. L’équipe, une quinzaine de personnes, est peu à peu recrutée. Beaucoup sont membres de l’Éducation Nationale ce qui apporte une couleur particulière. Tous sont très motivés et ont conscience d’être des pionniers, d’avoir une place à se trouver au sein du musée, aux côtés de la conservation.

Les objectifs du service sont de trois ordres. Tout d’abord une politique des publics qui comprend deux axes : l’ouverture et la fidélisation. L’ouverture passe par une recherche de contacts auprès des associations, du monde de l’entreprise. Les correspondants servent alors de relais entre attentes du public et propositions du service. La fidélisation se fait par le biais d’un outil, la Carte Blanche, carte d’adhésion qui permet de nombreux avantages. La politique envers le jeune public est aussi un axe fort du service qui se concentre autour d’une expression de Roland Schaer « apprendre à voir ». « L’espace des jeunes » leur est réservé, lieu d’accueil, de préparation, d’expérimentation au sein des ateliers. Celui-ci est cependant celui de la cristallisation des oppositions en matière de pédagogie, mais aussi au niveau du personnel entre différents membres. La diversification des activités est aussi un facteur d’ouverture. Le cinéma muet, l’audiovisuel, l’informatique, la musique, les conférences et débats, les publications sont autant de moyens de donner de nouvelles voies d’accès aux œuvres, ainsi qu’une nouvelle forme de fréquentation du musée.

À l’ouverture, en décembre 1986, la presse fançaise a bien relayé la nouveauté d’un tel service et de ses activités, particulièrement la politique envers la jeunesse et l’aspect audiovisuel et informatiques. Le public a également bien suivi l’ensemble des manifestations. L’espace des jeunes est presque victime de son succès, les festivals de cinéma sont plébiscités, la volonté d’« apprendre à voir » d’un certain public est également visible dans la fréquentation des conférences. Enfin, l’influence du premier service culturel est très sensible sur le paysage muséal français.