Marie-Claude Blanc-Chaléard, En finir avec les bidonvilles. Immigration et politique du logement dans la France des Trente Glorieuses, Paris, Publications de la Sorbonne, collection « Histoire contemporaine, 15 », 464 p. ill.
La résorption des bidonvilles est l’une des grandes questions sociales de la France des années 1960-1970. Question urbaine, à l’heure où se façonnent les banlieues modernes et où s’estompe la crise du logement. Question d’immigration aussi, les bidonvilles étant à 80 % peuplés par les travailleurs immigrés qu’attire la croissance des Trente Glorieuses.
Les premiers viennent d’Algérie, et c’est dans l’urgence de la décolonisation qu’est lancé, par l’État, le premier plan de résorption et de relogement en 1959. D’autres suivent, longtemps impuissants à enrayer l’« épidémie », mais finissant par en venir à bout dans un climat de scandale national.
Cette politique n’a jamais été étudiée. Du « temps de Nanterre », phase coloniale ciblant les bidonvilles algériens, au « temps de Champigny », où se croisent enjeux humanitaires et urbanistiques, ce livre propose de suivre le cas emblématique de la région parisienne, au fil de deux décennies de résistances et d’enlisement, mais aussi de colère et d’engagements. Le climat politisé d’après-Mai 68 impose finalement d’« en finir avec les bidonvilles », selon les termes du Premier ministre Jacques Chaban-Delmas.
Derrière le volontarisme de l’action publique dans le domaine de l’habitat insalubre et précaire et l’émergence d’un mouvement associatif en soutien aux immigrés, le principal enjeu demeure la place faite aux immigrés dans la société urbaine contemporaine. Cette histoire interroge le devenir des ségrégations et permet de comprendre comment les questions d’habitat et de logement, encore peu sensibles avant-guerre, sont devenues décisives dans l’émergence d’un nouveau « problème de l’immigration » au cours des années 1970.
Marie-Claude Blanc-Chaléard est historienne et spécialiste des questions de migrations. Professeur émérite à l’université de Paris Ouest Nanterre La Défense et membre du laboratoire IDHES, elle s’intéresse particulièrement aux relations entre les migrants et la ville. Ses premières recherches ont porté sur les Italiens en France et leur intégration en région parisienne depuis le XIXe siècle.