Maurice Pensuet, Écrit du front. Lettres de Maurice Pensuet,, 1915-1917, Édition établie par Antoine Prost, Taillandier, 2010, 383 p.
Alors que le dernier poilu a disparu, l’expérience des soldats de la Première Guerre mondiale ne cesse de nous fasciner. Maurice Pensuet a tout juste vingt ans lorsqu’il est mobilisé en 1915 comme soldat de 2e classe. Pendant vingt-sept mois de front, il écrit très régulièrement à ses parents. Issu d’un milieu modeste de commerçants d’une petite ville des bords de Loire il était apprenti horloger. Et par là même par la voix de ce « poilu comme les autres », c’est la majorité des jeunes hommes perdus dans la boucherie de la Grande Guerre qui se fait entendre. Jour après jour, il décrit son quotidien : désespoir, épuisement physique et moral mais aussi moments de joie partagés entre soldats. Car bien qu’il ne renâcle pas à monter à l’assaut, ce pacifiste comprend très vite que la guerre n’est pas près de finir. Il aspire alors à la bonne blessure, celle qui lui assurera la vie sauve sans l’amputer gravement.
Ainsi les lettres de Maurice Pensuet à ses parents constituent un témoignage exceptionnel sur un aspect de la guerre mal connu : les rapports entre l’avant et l’arrière. Que pouvait écrire un poilu à ses parents ? Pouvait-il se faire comprendre ? Manifestement non, ou du moins pas complètement. Là réside sans doute la qualité majeure de cette correspondance, qui manifeste à la fois la profondeur de l’amour filial et l’étrangeté radicale de l’expérience du feu, et nous rend ce jeune soldat infiniment sympathique.