Le mouvement anarchiste en mai-juin 1968

DAVID Bruno, Le mouvement anarchiste en mai-juin 1968, Maîtrise [Antoine Prost, Danièle Tartakowsky], Univ. Paris 1 CRHMSS, 1988, 226 p.

Une double interrogation sous-tend l’étude :

– Comment rendre compte de l’apparent paradoxe entre un mouvement social, qualifié de libertaire par beaucoup d’observateurs, et la déchéance du mouvement anarchiste organisé ?

– Au-delà du mythe et de l’image surfaite véhiculés par l’opinion, quels fut réellement l’importance et le rôle des militants libertaires, dans le déclenchement et le déroulement des événements de mai-juin 1968 ?

Au terme de l’étude, les conclusions s’écartent cependant de ce questionnement initial sans lui conférer une importance notable. Car, Mai 1968 intervient dans une période de restructuration du mouvement libertaire, com­mencée dès le début des années 1960. Il ne constitue pas une rupture dans l’histoire de l’anarchisme, mais le révélateur des crises et des bouleversements qui le traversent.

Deux phénomènes retiennent l’attention : la décadence et la sclérose de l’anarchisme traditionnel ; l’autonomisation du courant com­muniste libertaire par rapport à l’anarchisme, au cours d’un processus de dépassement de la référence libertaire spécifique et des théories révolutionnaires existantes.

L’une des conséquences majeures de ce mouvement de revitalisation de l’anarchisme réside dans la nécessité de rompre avec les stéréotypes traditionnels attachés au mouvement libertaire — l’accusation de nihilisme — ainsi qu’avec la perception folklorique et la vision fondée sur un a priori de décadence irrémédiable de l’historien des idées.

Le travail repose sur le dépouillement d’une presse pléthorique (trente-trois périodiques et revues), différents témoignages contemporains, des collections de tracts, des fonds d’archives privées, ainsi que sur une correspondance et une série d’entretiens réalisés avec d’anciens militants anarchistes.