MARSAUCHE (Arnaud), La « question des étrangers » à Paris 1914-1918

MARSAUCHE (Arnaud), La « question des étrangers » à Paris 1914-1918, Maîtrise [Antoine Prost, Jean-Louis Robert], Univ. Paris 1 CRHMSS, 1990, 159 p. + annexes

Avec l’octroi ou le refus du permis de séjour, rendu obligatoire dès le début de la guerre de 14-18 pour tout étranger résidant en France, un système nouveau se met en place (évacuations et internements, mais surtout une meilleure identification) à travers duquel la politique du ministère de l’Intérieur permet de mesurer l’impact du « nationalisme » sur l’administration responsable du contrôle des étrangers.

À Paris, c’est la préfecture de police qui en a la charge. Dès 1915, le conseil municipal lance des campagnes très virulentes contre le ministre de l’lntérieur, Léon Malvy. Principaux thèmes : la présence étrangère dans la capitale, les naturalisations, l’engagement dans la légion. La communauté russe, majoritairement juive, est la plus menacée. Pour répondre à ces attaques de la droite, une commission composée de notables et de fonctionnaires est chargée en janvier 1916 de revoir l’octroi des permis de séjour.

Ce sont les procès-verbaux de cette commission de révision qui forment jusqu’en juin 1917 l’essentiel de nos sources, faisant apparaître la complexité des identités nationales, particulièrement à Paris où vivaient à la veille du conflit environ 200 000 étrangers. La commission aura à connaître de 6 000 cas, notamment des Tchèques, Polonais, Roumains, Serbes et Trentins, sous tutelle austro-hongroise.

Il en ressort que les pouvoirs publics n’ont entrepris aucune mesure spectaculaire à leur encontre, comme le réclamait le conseil municipal. Cependant, seule l’intervention d’Émile Durkheim, vice-président de la Commission, a évité une expulsion massive des Russes. En faisant apparaître parallèlement la logique qui amène à la création d’une carte d’identité pour les étrangers (avril 1917), cette période montre clairement que c’est à Paris, pôle d’accueil, que l’étranger est devenu un enjeu politique, au point que Clemenceau s’en servira pour faire chuter Malvy.