L’utilisation du terme « anarchisme » dans l’Humanité avant la Première Guerre mondiale

AHN Hyun-Bae, L’utilisation du terme « anarchisme » dans l’Humanité avant la Première Guerre mondiale, Maîtrise [Jean-Louis Robert], Univ. Paris 1 CHS, 2003

Les anarchistes sont parfois considérés, d’une façon très sévère, comme terroristes par la Droite, et comme extrémistes, qui entravent les activités de la Gauche. Du point de vue socialiste, comment l’identification ou la définition de l’anarchisme ont-elles évolué ? Les socialistes ont comme point commun avec les anarchistes de protéger les droits des ouvriers, de revendiquer la réforme et de critiquer la politique du gouvernement, mais les socialistes se veulent agir dans un cadre légal et parlementaire, contrairement aux anarchistes, qui agissent dans l’illégalité et l’antiparlementarisme. De ce fait, les socialistes montrent une sorte de confusion dans leurs comportements face aux anarchistes, en les traitant tantôt comme des alliés, tantôt comme des ennemis. Avec l’oppression plus directe de l’anarchisme par l’État, les socialistes ont pour objectif de présenter leurs opinions, leurs idées sous forme d’une lutte légale, soit au sein du Parlement, soit auprès de la presse, soit par le biais des grèves, tout en refusant d’être identifiés aux anarchistes. Le terme « anarchisme » apparu dans L’Humanité, la presse représentative des socialistes de cette époque-là, ne peut être utilisé que dans un sens négatif afin de marquer une identité clairement différenciée des anarchistes. Depuis la création du journal socialiste, L’Humanité, jusqu’avant le déclenchement de la Première Guerre mondiale le terme « anarchie » est utilisé d’abord en un stéréotype négatif, comme chaos, désordre, etc. tout en perdant son sens idéologique originel. Il en est fait aussi une utilisation plus neutre comme dans les articles de Niel, fidèles à la charte d’Amiens, qui disent que le syndicat n’appartient ni aux socialistes, ni aux anarchistes, mais seulement aux ouvriers, ou dans les opinions de Bracke et de ses amis qui prétendent que les ouvriers doivent se rallier aux socialistes, en minimisant la montée du pouvoir des anarchistes au sein du syndicat. Enfin, L’Humanité montre la volonté de coopération de tous les membres de gauche, y compris les anarchistes et les syndicalistes révolutionnaires, pour l’émancipation sociale des ouvriers.