Filmer les grands ensembles

Camille Canteux, Filmer les grands ensembles, Paris, Créaphis, 2014, Coll. «Lieux habités», 380 p. ill.

Les grands ensembles n’ont pas toujours eu le visage banlieusard fait de façades lépreuses, d’uniformité grise et de violence qui est au coeur des images actuelles.
Au croisement de l’histoire urbaine et de l’histoire des représentations, cet ouvrage analyse l’évolution de la représentation audiovisuelle des grands ensembles à partir du milieu des années 1930, au moment où les prototypes sont construits et filmés, jusqu’au début des années 1980 quand on envisage leur démolition. Pour étudier la circulation des images ; dater leur apparition, leur diffusion et leur disparition ; comprendre le rôle des médias dans la définition des grands ensembles, cette étude s’appuie sur des films d’origines et de genres variés (télévision, cinéma de fiction et documentaire, films institutionnels). Alors que l’analyse diachronique restitue la complexité de la chronologie, l’approche synchronique révèle la mise en place d’un stéréotype : le grand ensemble est montré comme un lieu à part, durablement exclu de l’espace banal de la ville. Les faiseurs d’images contribuent ainsi à ériger en cliché sa singularité formelle, urbaine et sociale. Le livre met aussi en lumière la répétition des mêmes récits et images, qui font de chaque grand ensemble – Sarcelles, Le Mirail, La Grande Borne… – une nouvelle « ville nouvelle » chassant les édifices précédents hors de l’urbain, dans la quête perpétuelle d’une ville rêvée, toujours introuvable.